Découverte d’un nouvel état de la matière : le verre liquide

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Le verre est un matériau amorphe, c’est-à-dire sans structure cristalline ordonnée, pouvant être obtenu de différentes manières et à partir de différents composants. La particularité de son grand désordre structural (l’absence d’ordre à grande échelle le rapproche d’un liquide) fait de son étude un domaine de recherche actif. En effet, les transitions de phase prenant place dans le verre fascinent les physiciens depuis des décennies. Et récemment, des chercheurs ont découvert une nouvelle phase du verre (prédite depuis la fin des années 1990) à l’interface solide et liquide, appelée verre liquide.

Ce nouvel état semble exister entre un solide et un colloïde (une sorte de gel) : des mélanges homogènes avec des particules microscopiques, mais toujours plus grosses que les atomes et les molécules, et plus faciles à étudier. Dans ce cas, de minuscules colloïdes ellipsoïdaux en plastique faits sur mesure ont été créés et mélangés dans un solvant. Les résultats ont été publiés dans la revue PNAS.

« C’est incroyablement intéressant d’un point de vue théorique. Nos expériences fournissent le genre de preuves de l’interaction entre les fluctuations critiques et les transitions vitreuses que la communauté scientifique recherche depuis un certain temps », déclare Matthias Fuchs, professeur de théorie de la matière condensée molle à l’Université de Constance en Allemagne.

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Lorsque les matériaux passent de liquides à solides, leurs molécules s’alignent généralement pour former un motif cristallin. Ce n’est pas le cas avec le verre, c’est pourquoi les physiciens l’étudient si activement : avec le verre (et les matériaux semblables au verre), les molécules sont bloquées ou figées dans un état désordonné.

Deux transitions liquide-solide en concurrence

Dans le verre liquide, les chercheurs ont remarqué que les colloïdes pouvaient bouger, mais ne pouvaient pas tourner — ils avaient plus de flexibilité que les molécules du verre, mais pas assez pour les rendre comparables à des matériaux ordinaires qui ont déjà été largement étudiés. En utilisant des colloïdes ellipsoïdaux plutôt que les formes sphériques standard, ces rotations ont pu être observées. Les particules se sont réunies en groupes avec des orientations similaires, qui se sont ensuite obstruées à l’intérieur du matériau.

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Gauche : colloïdes ellipsoïdaux observés en microscopie électronique à balayage. Droite : les colloïdes ellipsoïdaux se réunissent en groupes de même orientation dans le verre liquide. © Jörg Roller et al. 2021

« En raison de leurs formes distinctes, nos particules ont une orientation — par opposition aux particules sphériques —, ce qui donne lieu à des types de comportements complexes entièrement nouveaux et non étudiés auparavant », explique Andreas Zumbusch, physicien à l’Université de Constance. Les chercheurs expliquent que le nouvel état de la matière se compose en fait de deux transitions liquide-solide concurrentes qui interagissent, créant le mélange de différentes propriétés.

La forme et la concentration des particules semblent être cruciales dans la création de ce verre liquide. Comme toujours avec les transitions du verre, il reste beaucoup de questions sans réponse, mais les auteurs de l’étude espèrent que la découverte du verre liquide — que les scientifiques prédisent depuis vingt ans — pourra aider à améliorer notre compréhension du fonctionnement des transitions en verre aux plus petites échelles.

Cette découverte porte également des implications allant au-delà de la structure du verre. Le mécanisme décrit par l’étude peut s’appliquer à tout système apparemment désordonné, des tissus biologiques aux grandes structures cosmiques. « Nos résultats donnent un aperçu de l’interaction entre les structures locales et les transformations de phase. Cela aide à guider des applications telles que l’autoassemblage de superstructures colloïdales et témoigne également de l’importance de la forme sur la transition vitreuse en général », concluent les auteurs.

Sources : PNAS

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