Des neutrinos d’antimatière détectés depuis un réacteur nucléaire distant de 240 km

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Vue du détecteur à scintillateur liquide du SNO+. | SNO+
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Le neutrino est l’une des particules les plus abondantes de l’Univers et de ce fait, ses propriétés, qui intriguent les scientifiques, sont une véritable fenêtre sur la structure microscopique du cosmos. Mais parce que les neutrinos ont très peu d’interaction avec la matière, ils sont extrêmement difficiles à détecter. Récemment, un détecteur à base d’eau a été utilisé pour détecter les antineutrinos provenant de réactions nucléaires à des centaines de kilomètres. Ce type de dispositif pourrait être utilisé à plus grande échelle pour surveiller les activités nucléaires distantes et détecter de potentielles installations impliquées dans la fabrication d’armes nucléaires.

Un neutrino est une particule dite fondamentale, ce qui signifie qu’elle n’est pas constituée de plus petits éléments, tout comme les électrons. Mais alors que ces derniers ont une charge négative, les neutrinos n’ont aucune charge. Ce sont les plus légères de toutes les particules subatomiques pourvues d’une masse. Les neutrinos proviennent principalement de réactions au cœur des étoiles et sont souvent le produit de particules lourdes se transformant en particules plus légères, un processus appelé « désintégration ».

De plus, les neutrinos sont de loin les particules les plus abondantes dans l’Univers. Environ 100 millions de millions de neutrinos traversent notre corps chaque seconde sans interagir avec aucune des particules le constituant. Parce qu’ils ont très peu d’interaction avec la matière, ils sont extrêmement difficiles à détecter. La combinaison de cette présence fantomatique et du rôle important que jouent les neutrinos dans l’univers captive les physiciens.

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Près de 100 ans après leur prédiction théorique, et près de 70 ans après leur détection, plusieurs propriétés des particules restent inconnues, notamment leur masse et leur « nature », à savoir s’il s’agit de leurs propres antiparticules, les antineutrinos, qui traversent également la matière sans avoir une interaction avec cette dernière la plupart du temps.

Récemment, un collectif de chercheurs nommé SNO+ a fait une découverte fortuite alors qu’elle préparait un détecteur particulier pour repérer une désintégration nucléaire extrêmement rare sans émission de neutrinos, appelée « double bêta sans neutrinos », permettant de savoir si un neutrino est sa propre antiparticule ou non. Les scientifiques ont capté le signal des neutrinos d’un réacteur nucléaire distant de 240 km, à l’aide d’un détecteur de neutrinos rempli d’eau, une première pour un tel dispositif. Leurs travaux sont publiés dans la revue Physical Review Letters.

Un détecteur hors nomes

Il faut savoir que le détecteur du SNO+ est un détecteur à scintillateur liquide pour l’étude des neutrinos. L’expérience est située à 2 km sous terre, profondeur que la plupart des particules ne peuvent atteindre, dans la mine Creighton de Vale près de Sudbury (Ontario, Canada).

Le cœur du détecteur SNO+ est une sphère acrylique de 12 m de diamètre remplie de 800 tonnes de scintillateur liquide qui flotte dans un bain d’eau. Ce volume est surveillé par près de 10 000 tubes photomultiplicateurs (PMT), qui sont des détecteurs de lumière très sensibles. Un filet de corde a été ajouté pour maintenir le récipient en acrylique au fur et à mesure qu’il devient flottant avec le scintillateur.

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Vue d’artiste du détecteur SNO+, sous terre. © SNO+

Concrètement, le scintillateur liquide est un liquide organique qui émet de la lumière lorsque des particules chargées le traversent. SNO+ détecte les neutrinos lorsqu’ils interagissent avec les électrons et les noyaux dans le détecteur pour produire des particules chargées qui, à leur tour, créent de la lumière lorsqu’elles traversent le scintillateur. Le flash de lumière est alors détecté par le réseau PMT.

Comme mentionné précédemment, les antineutrinos n’interagissent avec la matière que sous certaines conditions. Le cas échéant, ils la traversent simplement. Cependant, l’eau pure dans la sphère a les bonnes conditions pour que les antineutrinos interagissent — à savoir, un nombre particulièrement élevé de protons avec lesquels ils peuvent entrer en collision.

Détection inédite des antineutrinos et possible détection d’activité nucléaire

Rappelons à toutes fins utiles que la matière est constituée de protons, d’électrons et de neutrons, chacun ayant une masse et une charge (positive, négative ou neutre). Une particule d’antimatière a la même masse que sa particule opposée, mais elle est de charge inverse. De fait, l’électron a une charge électrique négative et le positron (un antiélectron) a une charge positive.

La collision entre un neutrino et un proton crée un positron et un neutron. Les positrons se déplacent très rapidement, créant un sillage fait de lumière bleue. Pour sa part, le neutron se combine avec le noyau d’un atome voisin et subit un processus qui consiste à émettre un rayon gamma.

En s’appuyant sur les résultats d’expériences précédentes avec des antineutrinos, les chercheurs savent que la lumière bleue précède le rayon gamma d’environ 200 microsecondes, un schéma unique permettant d’identifier la présence d’un antineutrino dans l’eau.

Pour obtenir cette détection particulière, comme le rapporte un article de New Scientist, l’équipe a collecté des données pendant 190 jours et a déterminé qu’un antineutrino était entré 14 fois dans le détecteur. Il n’existe aucun moyen direct d’établir l’origine de chaque antineutrino, mais les données correspondaient bien à ce que produisent les trois réacteurs canadiens les plus proches, dont un à 240 kilomètres.

Plus précisément, les antineutrinos détectés présentaient des énergies attendues uniquement pour les particules créées dans un réacteur et non pour celles provenant de l’intérieur du Soleil ou du noyau terrestre. À terme, une approche similaire pourrait être utilisée pour détecter les processus impliqués dans la fabrication d’armes nucléaires.

Source : Physical Review Letters

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