Un froid extrême pourrait bientôt s’abattre sur l’Europe selon les experts

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Chaque année, en hiver, un courant d’air froid circule autour du pôle Nord. Le phénomène, qui se déroule haut dans la stratosphère, est étroitement surveillé par les météorologues : un comportement atypique de ce vent froid peut en effet suggérer que l’Europe s’apprête à subir une importante vague de froid. Or, actuellement, ce courant d’air semble se disperser…

Paradoxalement, cette intense vague de froid est due à une soudaine augmentation de température : en seulement 24 à 48 heures, des courants chauds s’infiltrent dans le vortex polaire, dont la température augmente alors de près de 40 °C. Cette brusque augmentation entraîne des changements rapides du courant froid : il change soudainement de direction ou se segmente en plusieurs courants plus petits. Les conséquences de ce phénomène, dénommé « réchauffement stratosphérique soudain » (ou sudden stratospheric warming, soit SSW en anglais), peuvent être dévastatrices.

L’Europe en a d’ailleurs fait l’expérience il n’y a pas si longtemps : en février 2018, un froid glacial en provenance de Sibérie — surnommé « la bête de l’est » par les médias européens — s’était abattu sur toute l’Europe pendant plusieurs jours, en particulier sur les pays de l’Est et la Scandinavie ; les températures relevées y étaient de 10 à 20 °C en dessous de la normale. Cette vague de froid avait également largement impacté le Royaume-Uni en semant pendant un temps le chaos dans les transports, entraînant la fermeture de milliers d’écoles et causant plusieurs décès. The Guardian avait alors fait état de « pires conditions météorologiques depuis des années ».

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Les signes caractéristiques d’un futur refroidissement

À noter cependant que tout changement au niveau du vortex polaire n’entraîne pas nécessairement des conditions glaciales. Ainsi, en 2019, ce fut tout le contraire : un SSW a précédé l’une des journées hivernales les plus chaudes de l’histoire au Royaume-Uni. Dans la communauté de Trawsgoed au Pays de Galles on a relevé une température de 20,6°C en plein mois de février, une valeur qui n’est que rarement atteinte dans la région, même en été ! Plusieurs autres localités avaient enregistré des températures supérieures à 20°C.

Pour les experts, il est donc essentiel de comprendre quels changements au niveau du vortex polaire sont responsables d’une intense vague de froid, et quels autres ne doivent pas soulever d’inquiétude particulière. D’autant que les SSW ne sont pas rares : ils se produisent tous les deux ans environ. Dans tous les cas, le phénomène n’est pas sans conséquence, comme l’explique Richard Hall, météorologue à l’Université de Bristol : « Bien qu’un événement de temps extrêmement froid ne soit pas une certitude, environ les deux tiers des SSW ont un impact significatif sur les conditions météorologiques de surface ».

Hall et ses collaborateurs ont donc travaillé à la mise au point de nouveaux modèles de prédiction, permettant de déterminer quels seraient les effets de divers changements au niveau de ce courant d’air froid majeur. Leur étude, publiée dans le Journal of Geophysical Research : Atmospheres, repose sur les observations enregistrées depuis plus de six décennies ; les chercheurs ont ainsi pu retenir 40 exemples d’oscillations et de segmentations au niveau du vortex polaire stratosphérique nord pour développer leur algorithme prédictif.

Les résultats suggèrent que chaque fois que le vortex polaire se divise en deux vents plus petits, cela aboutit à des événements de refroidissement plus sévères par rapport aux autres anomalies du SSW. Or, c’est justement le type de comportement qu’ont observé les météorologues au cours du week-end.

Une vague de froid… ou une chaleur anormale

« Comme prévu, les observations atmosphériques montrent maintenant que la stratosphère arctique subit un réchauffement soudain associé à un vortex polaire stratosphérique qui s’affaiblit », confirme Adam Scaife, responsable des prévisions à longue distance au UK Met Office. Devons-nous par conséquent nous attendre à une prochaine baisse des températures ? Il semblerait que oui. Selon les experts, le comportement du vortex présente toutes les caractéristiques du type le plus redoutable de SSW. En d’autres termes, l’Europe peut s’attendre à une très probable et importante baisse des températures.

Dans le cadre de leur étude, les chercheurs ont constaté que si la différence d’anomalies d’oscillation entre les divisions et les déplacements du vortex polaire est faible, les anomalies de température de surface sur le nord-ouest de l’Europe et le nord de l’Eurasie sont nettement plus froides pour les événements de division, en particulier au Royaume-Uni, juste avant la date d’impact de surface. De plus, les événements de déplacement sont en moyenne plus humides dans le nord-ouest de l’Europe au moment de l’impact de surface.

Néanmoins, il reste encore un espoir. Même si la modélisation proposée par les chercheurs repose sur des algorithmes solides, elle implique également certaines incertitudes. Il se pourrait ainsi que le scénario prédit ne se déroule pas exactement comme prévu. Le météorologue Matthew Lehnert pense que, comme au cours de l’hiver 2019, l’Europe pourrait au contraire connaître des températures situées exceptionnellement au-dessus des normales de saison dans les semaines à venir. En tout cas, le Met Office n’exclut pas cette possibilité.

Comme le souligne le mathématicien William Seviour de l’Université d’Exeter, qui a participé à la conception de l’algorithme, de plus amples recherches seront nécessaires pour bénéficier d’un système prédictif complètement fiable concernant le comportement du vortex polaire nord : « Malgré cette avancée, de nombreuses questions subsistent quant aux mécanismes à l’origine de ces événements dramatiques, et comment ils peuvent influencer la surface, et c’est donc un domaine passionnant et important pour de futures recherches ». En attendant, le nouvel algorithme créé par Seviour et ses collègues permet déjà de bénéficier de prédictions améliorées, et sera sans doute de plus en plus précis à mesure que les scientifiques enrichiront leurs connaissances de l’atmosphère.

Source : JGR : Atmospheres, R. Hall et al.

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