La gravité peut exister sans masse selon une nouvelle théorie, éliminant ainsi le besoin de matière noire

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Une nouvelle théorie suggère pour la première fois que la gravité peut exister dans l’Univers même en l’absence de masse. Selon cette dernière, « l’excès de gravité » nécessaire à l’agglomération des galaxies serait dû à des défauts topologiques en forme de coquille répartis dans l’ensemble de l’Univers. Cela pourrait ainsi potentiellement atténuer, voire éliminer, le «besoin» de matière noire.

Probablement l’un des concepts les plus déroutants de nos modèles théoriques, la matière noire est une forme hypothétique de matière qui représenterait 85 % de la masse totale de l’Univers. N’interagissant aucunement avec la lumière, la présence de cette matière invisible est uniquement déduite de son influence sur les galaxies et les amas de galaxies. L’agglomération de ces dernières ne peut notamment pas être expliquée par la relativité générale d’Einstein, à moins qu’il y ait un excès de masse considérable et indétectable par nos instruments.

Proposée pour la première fois en 1932 par l’astronome néerlandais Jan Oort, cette « masse manquante » a amené les physiciens à s’interroger sur la nature même de la gravité. En effet, malgré les efforts de recherche continus, elle n’a encore jamais été directement observée. Cela a alors abouti à différentes théories alternatives de la gravité permettant à une quantité de matière considérablement inférieure à celle requise par la gravité newtonienne (et la relativité générale) de produire l’intensité de champ gravitationnel que nous observons.

La nouvelle hypothèse de Richard Lieu, éminent physicien à l’Université d’Alabama à Huntsville (UAH), s’ajoute à ces théories en avançant que la gravité pourrait exister même en l’absence de masse. « Ma propre inspiration est venue de ma recherche d’une autre solution aux équations du champ gravitationnel de la relativité générale, qui donne une force de gravitation finie en l’absence de toute masse détectable », explique-t-il dans un communiqué. Cette théorie atténuerait (voire exclurait) ainsi le besoin de matière noire pour expliquer l’excès apparent de masse dans l’Univers.

« Cette initiative est à son tour motivée par ma frustration face au statu quo, à savoir la notion de l’existence de la matière noire malgré l’absence de toute preuve directe depuis un siècle », ajoute-t-il. Ses résultats sont détaillés dans la revue Monthly Notices of the Royal Astronomical Society.

Des structures en forme de coquilles expliquant l’excès de gravité dans l’Univers ?

Selon la relativité générale, la gravité se traduit par la déformation de l’espace-temps induite par la présence de masse et d’énergie. Plus un objet est massif, plus son influence gravitationnelle sur d’autres objets moins massifs est élevée. Cependant, des études et observations ont montré qu’elle permet à tous les objets avec ou sans masse d’interagir entre eux. L’une d’elles a par exemple montré que même sans masse, les photons peuvent être influencés par la gravité.

La nouvelle hypothèse proposée par Lieu avance que l’excès de gravité nécessaire à l’agglomération des galaxies est dû à la présence d’ensembles concentriques de défauts topologiques en forme de coquille. Ils auraient été créés dans l’Univers primitif lors d’une transition de phase, un processus au cours duquel l’état général de la matière change dans l’ensemble du cosmos. « On ne sait pas encore exactement quelle forme précise de transition de phase dans l’Univers pourrait donner lieu à des défauts topologiques de ce type », précise l’expert.

Selon le chercheur, il s’agirait de régions très compactes contenant une très forte densité de matière. Elles pourraient être soit de forme linéaire, soit en forme de coquille sphérique. Plus précisément, ces coquilles seraient constituées à l’intérieur d’une fine couche de masse positive, tandis que l’extérieur serait composé de masse négative. La masse mesurable totale serait ainsi nulle, car les masses interne et externe s’annuleraient. Cependant, lorsqu’une étoile ou une galaxie se trouveraient à la surface de ces structures, elles seraient attirées en leur centre par leur force gravitationnelle.

« La courbure gravitationnelle de la lumière par un ensemble de coquilles individuelles concentriques comprenant une galaxie ou un amas, est due au fait qu’un rayon de lumière est légèrement dévié vers l’intérieur, c’est-à-dire vers le centre de la structure à grande échelle, ou l’ensemble des coquilles, lorsqu’il passe à travers », explique le physicien.

L’effet de ce passage serait une déviation mesurable et similaire de la force gravitationnelle exercée par de la matière, dont la quantité est largement supérieure à celle de la matière visible (comme le serait la matière noire). Cela signifie également que la déviation de la lumière et la vitesse orbitale des étoiles et des galaxies seraient les seuls moyens de mesurer la force du champ gravitationnel dans une structure à grande échelle. « L’affirmation de mon article est qu’au moins les coquilles sont sans masse. Il n’est alors pas nécessaire de perpétuer cette recherche apparemment sans fin de matière noire », estime Lieu.

Toutefois, il est important de noter que des questions subsistent quant à la cohérence de la théorie, sans compter que des observations sont nécessaires afin de pouvoir la confirmer. Elle n’aborde pas par exemple le processus exact sous-tendant la formation des structures en forme de coquille ainsi que leur évolution. D’autre part, la manière dont les galaxies et les amas se forment par le biais de leur alignement doit aussi être explorée de façon plus approfondie.

« Bien entendu, la disponibilité d’une deuxième solution, même si elle est très suggestive, n’est pas suffisante en soi pour discréditer l’hypothèse de la matière noire — cela pourrait au mieux être un exercice mathématique intéressant », a précisé l’expert. Néanmoins, « c’est la première preuve que la gravité peut exister sans masse », affirme-t-il.

Source : Monthly Notices of the Royal Astronomical Society

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