Un trou noir supermassif émet un mystérieux jet de gaz en forme de « H »

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Carte du gaz chaud (rose) et danse autour de la galaxie M84, obtenue par l’observatoire à rayons X Chandra de la NASA. | X-ray : NASA/CXC/Princeton Univ/C. Bambic et al. ; Optique : SDSS ; Radio : NSF/NRAO/VLA/ESO ; Traitement d'image : NASA/CXC/SAO/N.Wolk
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Les trous noirs supermassifs sont parmi les phénomènes les plus fascinants et énigmatiques de l’Univers. Récemment, des astronomes ont observé une structure en forme de « H » dans le gaz chaud entourant le trou noir supermassif de la galaxie Messier 84 (M84). Cette découverte remet en question le modèle traditionnel d’accrétion de matière par les trous noirs, suggérant que leur alimentation peut être influencée par les jets de particules qu’ils émettent. Cette hypothèse ouvre de nouvelles perspectives dans la compréhension de ces entités titanesques et de leur interaction avec leur environnement.

Les trous noirs sont des phénomènes cosmiques intenses qui conservent une grande part de mystère, situés au cœur de nombreuses galaxies, y compris la nôtre, la Voie lactée. Ces entités massives, dont la densité est si élevée que rien — pas même la lumière — ne peut échapper à leur force gravitationnelle, constituent un domaine d’étude majeur en astrophysique.

Les trous noirs supermassifs peuvent avoir une masse allant jusqu’à des milliards de fois celle du Soleil. Jusqu’à présent, la compréhension de ces géants cosmiques repose sur des modèles théoriques, comme le modèle Bondi, qui décrit comment la matière est accrétée, ou attirée, par un trou noir.

Une invitation à rêver, prête à être portée.

Cependant, une récente découverte dans la galaxie Messier 84 (M84) a mis en évidence une structure en forme de « H » dans le gaz chaud entourant son trou noir supermassif, remettant en question les connaissances actuelles. Mise en évidence par le biais d’une image capturée dans les rayons X, cette observation a conduit l’équipe de recherche, menée par Christopher Bambic de l’Université de Princeton, à émettre l’hypothèse que certains trous noirs sont des « mangeurs sélectifs », les jets qu’ils émettent semblant limiter la quantité de gaz qu’ils peuvent absorber. Leurs résultats sont publiés dans la revue The Monthly Notices of the Royal Astronomical Society.

Un trou noir au cœur particulier

La galaxie M84, située à environ 60 millions d’années-lumière de la Terre dans la constellation de la Vierge, abrite le trou noir supermassif étudié par l’équipe de recherche. L’image de ce dernier a été obtenue par le biais de l’Observatoire à rayons X Chandra de la NASA et le Karl G. Jansky Very Large Array (VLA).

Le gaz présent dans l’image est capturé par l’influence gravitationnelle du trou noir supermassif. Alors qu’une partie de ce matériau tombe à la surface du trou noir, dont la masse équivaut à environ 1,5 milliard de fois celle du Soleil, une autre partie est expulsée sous forme de jets de particules. Ces jets peuvent créer des cavités dans le gaz chaud qui entoure le trou noir.

Ces cavités sont visibles dans l’image de Chandra, formant la structure en « H » en raison de l’orientation des jets par rapport à la Terre. Ce « H » s’étend sur une hauteur impressionnante de 40 000 années-lumière, soit environ la moitié de la largeur de la Voie lactée.

Les chercheurs ont estimé que chaque année, la matière tombant vers le trou noir supermassif depuis le nord, le long du jet, a une masse environ 500 fois supérieure à celle de la Terre. Cela ne représente que 25% de la masse de la matière alimentant le trou noir depuis des directions où le jet n’est pas orienté, comme l’est et l’ouest.

En d’autres termes, il n’absorbe pas autant de matière qu’on pourrait le penser. Les jets de particules qu’il émet repoussent une partie de cette matière, ralentissant ainsi la vitesse à laquelle elle est absorbée par le trou noir.

Une remise en question du modèle théorique

Pour tester cette idée, l’équipe de recherche a appliqué un modèle théorique, le modèle de Bondi, nommé d’après le scientifique Hermann Bondi. Selon ce modèle, toute la matière à une certaine distance d’un trou noir est suffisamment proche pour être affectée par la gravité de ce dernier et commence à tomber vers lui à la même vitesse, quelle que soit la direction à partir de laquelle elle se rapproche, c’est-à-dire de manière isotrope.

Après analyses des données, les auteurs révèlent que l’alimentation du trou noir supermassif au cœur de M84 ne correspond pas au modèle Bondi, car la matière ne tombe pas de façon identique dans toutes les directions, mais forme plutôt la structure en « H » visible dans les images de Chandra. Cette accrétion est donc influencée par la présence de jets de particules émis par le trou noir, qui peuvent repousser la matière et créer des cavités dans le gaz environnant.

Il est important de noter que la structure en « H » observée dans l’image de M84 n’est pas le résultat d’un trou noir tentant de s’engager dans une sorte de calligraphie cosmique. Il s’agit plutôt d’un exemple de paréidolie, un phénomène psychologique ou une illusion d’optique qui pousse le cerveau à distinguer des images ou des formes cohérentes, souvent humaines ou animales, à partir d’un stimulus visuel indéfini ou abstrait. La paréidolie peut nous amener à voir des animaux dans les nuages, ou un visage souriant à la surface du Soleil.

Cette analyse ouvre une nouvelle perspective sur la façon dont les trous noirs supermassifs interagissent avec leur environnement, et de nouvelles pistes pour comprendre les processus complexes qui se déroulent dans ces régions extrêmes de l’espace. Elle souligne également le rôle potentiellement important des jets dans la régulation de l’alimentation des trous noirs, jusque-là insoupçonnés.

Source : The Monthly Notices of the Royal Astronomical Society

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