Un implant cérébral, sécurisé par un mot de passe, traduit les pensées intérieures en paroles

Une garantit pour que le système ne traduise pas accidentellement les pensées confidentielles.

implant cerebral pensee interieures
| Pixabay
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Un nouvel implant cérébral permet de traduire les pensées intérieures en paroles, mais ne fonctionne que si l’utilisateur pense à un mot de passe prédéfini. Ce dispositif garantit que le système ne traduise pas accidentellement des phrases que les utilisateurs préfèreraient garder pour eux. Il offrirait ainsi aux patients la possibilité de s’exprimer plus aisément, sans nécessairement s’efforcer de parler, tout en préservant la confidentialité de leurs pensées – une première dans le domaine des implants cérébraux.

Les implants cérébraux ou interfaces cerveau-ordinateurs (« brain computer interface » ou BIC) constituent une alternative prometteuse pour restaurer les mouvements et la parole chez les personnes souffrant de paralysie à la suite d’un accident vasculaire cérébral (AVC) ou de maladies neurologiques, comme la sclérose latérale amyotrophique (SLA).

D’importantes avancées technologiques ont vu le jour au cours des dernières années, parmi lesquelles des dispositifs permettant d’utiliser des ordinateurs ou d’autres appareils intelligents uniquement par la pensée, ou encore des BCI capables de contrôler des prothèses robotisées, voire les propres membres des patients.

Récemment, des chercheurs ont présenté un implant cérébral capable de traduire les pensées d’un patient atteint de SLA en paroles, avec une précision et une rapidité élevées. Cependant, les BCI de ce type reposent généralement sur la tentative de parole : les utilisateurs doivent s’efforcer de prononcer mentalement les mots à voix haute pour que l’appareil fonctionne — un processus souvent fatigant et inconfortable.

Vers une parole intérieure accessible

Comme la génération de pensées intérieures (par exemple compter le nombre de personnes dans une salle ou lire un texte) est moins éprouvante, des chercheurs de l’Université de Stanford ont conçu un BCI capable de les traduire en parole. « Un BCI décodant la parole intérieure, dans laquelle les utilisateurs imaginent parler sans effort moteur, pourrait résoudre ces problèmes », expliquent-ils dans leur étude publiée dans la revue Cell. Pour la première fois, un système de mot de passe a été intégré afin de répondre aux préoccupations liées à la confidentialité des pensées des utilisateurs.

L’an dernier, des chercheurs ont mis au point le premier BCI capable de décoder les pensées internes. Il s’appuyait sur le décryptage des signaux du gyrus supramarginal, une région essentielle à la parole et au langage. Mais un risque subsistait : que le dispositif traduise accidentellement des pensées que l’utilisateur n’avait pas l’intention d’exprimer à voix haute. « Nous voulions examiner cette question de manière approfondie », explique Erin M. Kunz, chercheuse à l’Université de Stanford et coautrice de la nouvelle étude, dans un article publié dans la revue Nature.

Pour développer leur système, Kunz et ses collègues ont d’abord analysé les signaux liés aux mouvements volontaires en implantant des microélectrodes dans le cortex moteur de quatre patients. Tous présentaient des troubles de l’élocution, l’un à la suite d’un AVC et les trois autres en raison d’une maladie du motoneurone, une affection entraînant la dégénérescence des nerfs et une perte de contrôle musculaire. Les participants ont été invités à tenter de prononcer une série de mots (tentative de parole) ou à imaginer les prononcer (pensée intérieure).

BCI pensees interieures
Résumé graphique de l’étude. © Kunz et al.

Un taux de précision de 74%

Les chercheurs ont observé que les signaux traduisant les paroles tentées et ceux des paroles internes provenaient de la même région cérébrale, mais que ceux associés aux pensées internes étaient plus faibles. Ces données ont ensuite servi à entraîner un modèle d’intelligence artificielle à reconnaître les phonèmes (les plus petites unités de la parole) dans les enregistrements cérébraux. Le modèle a ensuite assemblé ces phonèmes pour former des mots et des phrases en temps réel à partir d’une base de 125 000 termes.

L’appareil a décodé les paroles imaginées par deux participants avec une précision de 74 %, un résultat comparable à celui des BCI précédemment développés pour les tentatives de parole. Dans certaines expériences, l’implant traduisait également des nombres lorsque les patients les imaginaient en comptant des figures affichées à l’écran. Cela suggère qu’il pourrait également détecter spontanément certaines pensées intérieures.

Afin d’éviter que le système ne décode des pensées confidentielles, les chercheurs y ont intégré une fonction de déclenchement par mot de passe. Lors des essais, les participants devaient imaginer le mot de passe « Chitty-Chitty-Bang-Bang » (tiré du titre d’un roman pour enfants anglais) pour activer le décodage. Le BCI a reconnu le mot de passe avec un taux de précision de 98 %.

Il sera toutefois important d’identifier d’autres régions cérébrales impliquées dans la traduction des pensées intérieures, afin d’affiner la technologie et d’en améliorer la rapidité comme la précision. « En étudiant d’autres parties du cerveau, nous pourrions peut-être aussi traiter davantage de troubles de la parole », souligne Kunz. L’équipe prévoit d’approfondir ses recherches dans ce sens.

Source : Cell
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