Avec l’avรจnement de la mรฉcanique quantique, la notion de ยซ vide ยป, dรฉjร complexe ร dรฉfinir pour les physiciens, a pris une toute nouvelle dimension. Aujourd’hui, les scientifiques savent que le vide n’est pas une entitรฉ physique inerte mais, au contraire, qu’il est animรฉ d’un mouvement chaotique permanent.
En effet, le vide est continuellement le siรจge de fluctuations quantiques ร l’รฉchelle microscopique. Mais que sont ces fluctuations ? Comment apparaissent-elles ? Sont-elles observables ?
Le vide quantique : รฉnergie, fluctuations et particules
Le vide quantique occupe l’ensemble de l’univers. Il possรจde une รฉnergie prรฉsente en tout point de l’espace appelรฉe ยซ รฉnergie du vide ยป. Cette รฉnergie fluctue en permanence autour de sa valeur moyenne selon une relation liant le temps et l’รฉnergie tirรฉe du principe d’indรฉtermination d’Heisenberg.

Cette inรฉgalitรฉ montre que l’รฉnergie d’un systรจme est inversement proportionnelle ร la durรฉe de la mesure effectuรฉe. Ainsi, il peut y avoir une variation spontanรฉe de valeur d’รฉnergie du vide pendant un intervalle de temps extrรชmement court, correspondant ร une ยซ crรฉation ยป ou ร un ยซ excรจs ยป d’รฉnergie.
En rรฉalitรฉ, le vide quantique รฉtant assimilรฉ ร un champ quantique (en thรฉorie quantique des champs), cette ยซ crรฉation d’รฉnergie ยป n’est autre qu’une trรจs brรจve variation locale du niveau d’รฉnergie du champ. Cela nโentre donc pas en contradiction avec le principe de conservation de l’รฉnergie. En d’autres mots, pendant un laps de temps trรจs court, de l’รฉnergie est empruntรฉe et restituรฉe au vide.
L’รฉnergie du vide est donc animรฉe de fluctuations quantiques permanentes. Mais ce n’est pas tout. Avec la relativitรฉ restreinte, Albert Einstein a introduit sa fameuse relation donnant l’รฉquivalence masse-รฉnergie :
E = mc2
Ainsi, les fluctuations d’รฉnergie du vide peuvent donc correspondre ร l’existence de particules massives. En effet, en thรฉorie quantique des champs, les fluctuations quantiques donnent lieu ร l’apparition spontanรฉe de paires particule-antiparticule virtuelles qui disparaissent presque aussitรดt en s’annihilant. Ces particules sont dites ยซ virtuelles ยป car leur durรฉe de vie est extrรชmement brรจve. Le vide quantique est donc animรฉ de paires de particules virtuelles apparaissant et disparaissant continuellement.

Si les mathรฉmatiques prรฉdisent rigoureusement l’existence des fluctuations quantiques, qu’en est-il de leur rรฉalitรฉ physique ? Les fluctuations quantiques รฉmergent ร l’รฉchelle microscopique et sont quasiment instantanรฉes, elles ne sont donc pas directement observables. Cependant, leurs effets sont quant ร eux mesurables. Il existe actuellement deux importantes preuves expรฉrimentales de l’existence des fluctuations du vide : l’effet Casimir et le dรฉcalage de Lamb.
L’effet Casimir
En 1948, le physicien Hendrik Casimir postule l’existence d’un effet d’attraction entre deux plaques parallรจles conductrices (deux miroirs par exemple). Pour cela, il dรฉmontre, grรขce ร la thรฉorie quantique des champs, que les fluctuations quantiques du vide exercent une pression de radiation (pression exercรฉe sur une surface par un rayonnement รฉlectromagnรฉtique) sur l’extรฉrieur des deux plaques qui tendent ainsi ร se rapprocher.
Les plaques sont ainsi attirรฉes sous l’effet d’une force,ย baptisรฉe ยซ force de Casimir ยป, inversement proportionnelle au carrรฉ de la distance qui les sรฉpare. La premiรจre preuve expรฉrimentale de l’effet Casimir est rรฉalisรฉe en 1997.
Plus prรฉcisรฉment, ce sont les fluctuations quantiques du champ รฉlectromagnรฉtique qui sont ร lโลuvre dans ce phรฉnomรจne. Comme expliquรฉ plus haut, les fluctuations correspondent ร des particules virtuelles ; dans le cas du champ รฉlectromagnรฉtique, il s’agit donc de photons virtuels caractรฉrisรฉs par leur longueur d’onde. Entres les deux plaques conductrices, seuls les photons dont la longueur d’onde est infรฉrieure ร la distance sรฉparant les deux plaques peuvent exister.
Dรจs lors, la somme des photons virtuels entre les deux plaques est nรฉcessairement infรฉrieure ร la somme des photons virtuels ร l’extรฉrieur des plaques (qui, eux, n’ont aucune contrainte de longueur d’onde pour exister). Les photons virtuels extรฉrieurs รฉtant plus nombreux, ils exercent une pression de radiation externe supรฉrieure ร la pression interne, crรฉant ainsi une force rapprochant les deux plaques.

Le dรฉcalage de Lamb
En 1947, les physiciens Willis Eugene Lamb et Robert Retherford, en รฉtudiant le spectre micro-onde de l’atome d’hydrogรจne, remarquent un รฉcart d’รฉnergie entre les deux niveaux de l’atome d’hydrogรจne. Or, selon le modรจle quantique de l’รฉlectron et l’รฉquation de Dirac, ces deux niveaux (notรฉs 2s1/2 et 2p1/2) devraient normalement possรฉder la mรชme รฉnergie. Il faut cependant attendre la fin des annรฉes 1940 pour que le physicien Hans Bethe fournisse la premiรจre explication thรฉorique au moyen des fluctuations quantiques du vide.
De nouveau, ce sont les fluctuations quantiques du champ รฉlectromagnรฉtique qui sont ร lโลuvre dans le dรฉcalage de Lamb. Autour du noyau atomique, le vide fluctue en permanence, donnant naissance ร des paires d’รฉlectrons-positrons virtuels. L’รฉlectron de l’atome d’hydrogรจne interagit ainsi un trรจs court instant avec les positrons virtuels. Cette interaction provoque alors une trรจs lรฉgรจre modification de l’orbite de l’รฉlectron, entraรฎnant finalement un รฉcart d’รฉnergie entre les deux niveaux de l’atome.
Les fluctuations quantiques dans l’univers
Avec le dรฉcalage de Lamb et l’effet Casimir, les physiciens ont pu mettre en รฉvidence des effets microscopiques et relativement macroscopiques sur la matiรจre, dus aux fluctuations quantiques. La thรฉorie quantique des champs prรฉvoit gรฉnรฉralement une contribution totalement nulle des fluctuations quantiques ร l’รฉchelle de l’univers. Toutefois, certaines thรฉories prรฉdisent que ces fluctuations ont pu jouer, et jouent encore, un rรดle ร l’รฉchelle cosmique.
C’est notamment le cas du modรจle du Big Bang et du mรฉcanisme inflationnaire. Lors de l’inflation, l’univers se dilate et s’รฉtend avec une vitesse, une tempรฉrature et une รฉnergie phรฉnomรฉnales. Ces conditions chaotiques secouent tellement l’espace-temps qu’elles engendrent des fluctuations quantiques d’amplitude extrรชmement รฉlevรฉe, qui agissent sur la structure mรชme de l’univers. Elles seraient ainsi responsables de la distribution de la matiรจre et de la formation des grandes structures cosmologiques.

En 1975, le physicien Stephen Hawking prรฉdit l’existence d’un phรฉnomรจne ยซ d’รฉvaporation ยป des trous noirs : le rayonnement de Hawking. Aux abords des trous noirs, le champ gravitationnel est si intense qu’il permet de sรฉparer les paires de particule-antiparticule virtuelles issues des fluctuations du vide avant qu’elles ne s’annihilent.
Du point d’un vue d’un observateur extรฉrieur, tout se passe comme si une particule d’รฉnergie positive รฉtait รฉmise tandis qu’une particule d’รฉnergie nรฉgative รฉtait absorbรฉe par le trou noir. L’absorption d’รฉnergie nรฉgative correspond ร une perte de masse pour le trou noir, qui s’รฉvapore alors progressivement.


Lโรฉlectron est une particule รฉlรฉmentaire qui, avec les protons et les neutrons, constitue les atomes. Cโest donc lโun des composants principaux de la matiรจre baryonique. ร ce titre, il revรชt... [...]

