Meta annonce officiellement Waterworth, le plus grand projet de câble sous-marin au monde, qui s’étendra sur 50 000 kilomètres pour relier cinq continents. Le projet constitue un investissement conjoint de 10 milliards de dollars entre l’entreprise et l’Inde. Il s’agira de la première infrastructure du genre à appartenir exclusivement à Meta. L’objectif est à la fois d’améliorer le réseau numérique mondial et de fournir le débit nécessaire pour stimuler l’innovation en matière d’IA.
Les câbles sous-marins constituent l’un des piliers de l’infrastructure numérique mondiale. Ils assurent notamment plus de 95 % du trafic intercontinental en permettant la communication numérique, les expériences vidéo, les transactions en ligne, etc. Meta, société mère de Facebook, Instagram et WhatsApp, accaparerait 10 % de l’ensemble du trafic fixe au niveau mondial et 22 % du trafic mobile selon de récents rapports.
Au cours de la dernière décennie, l’entreprise a multiplié les investissements dans les réseaux de câbles sous-marins, en contribuant au développement de plus d’une vingtaine d’entre eux. Elle est par exemple copropriétaire du câble 2Africa entourant le continent africain, aux côtés d’opérateurs mobiles tels qu’Orange, Vodafone et China Mobile. Elle est également copropriétaire du réseau Asia Pacific Gateway (APG) reliant neuf pays d’Asie du Pacifique et du câble Amitié, s’étendant entre la France et les États-Unis.
L’entreprise prévoit de renforcer l’infrastructure numérique mondiale et d’améliorer le contrôle de ses services avec son nouveau projet de câble sous-marin. « Le projet Waterworth sera un investissement pluriannuel de plusieurs milliards de dollars visant à renforcer l’échelle et la fiabilité des autoroutes numériques mondiales en ouvrant trois nouveaux corridors océaniques dotés de la connectivité abondante et à haut débit nécessaire pour stimuler l’innovation en matière d’IA dans le monde entier », expliquent dans un communiqué Gaya Nagarajan, vice-présidente de l’ingénierie de Meta, et Alex-Handrah Aimé, responsable mondial des investissements réseau.
Une fois achevé, Waterworth sera non seulement le plus long câble sous-marin au monde, mais également le premier dont Meta sera l’unique propriétaire. Elle deviendra ainsi, avec Google, l’une des seules entreprises au monde à détenir de manière exclusive ce type d’infrastructure. Cela renforcera l’influence économique de l’entreprise et consolidera sa position dans l’écosystème numérique mondial.
Le plus long câble à 24 paires de fibres optiques
Le réseau Waterworth traversera trois océans pour relier cinq continents et comprendra des points d’ancrage aux États-Unis, au Brésil, en Inde, en Afrique du Sud ainsi que dans d’autres régions stratégiques. Meta a révélé peu de détails techniques concernant le projet, mais son déploiement inclurait un routage inédit pour en optimiser la stabilité et la fiabilité.
Cela consisterait à privilégier la pose de câbles en eau profonde (jusqu’à 7 000 mètres) et à utiliser des techniques d’enfouissement améliorées dans les zones à haut risque, telles que les failles tectoniques et les eaux peu profondes près des côtes, plus vulnérables aux dommages causés par les ancres des bateaux et aux conflits territoriaux.
D’autre part, l’entreprise prévoit de déployer des câbles à 24 paires de fibres optiques (contre 8 à 16 habituellement), ce qui ferait également de Waterworth le plus long câble du genre au monde. « Ces investissements permettent une connectivité inégalée pour répondre aux besoins numériques croissants de notre monde », affirment Nagarajan et Aimé.
Un soutien aux besoins en matière de centre de données d’IA
L’une des raisons pour lesquelles Meta investit dans un câble sous-marin exclusif serait la volonté d’exercer un contrôle plus direct dans l’approvisionnement en contenus au niveau international. En effet, des rapports indiquent que l’entreprise génère plus de bénéfices en dehors de l’Amérique du Nord. Le fait de privilégier un câblage sous-marin dédié peut contribuer à garantir la qualité du service sur ce trafic extérieur.
D’autre part, cela permettrait également d’établir une influence économique et géopolitique. L’entreprise met par exemple en avant sa contribution économique en Europe et en Asie du Sud-Est à l’aide de projets de câbles sous-marins tels que Marea. Des rapports suggèrent que ce câble pourrait générer jusqu’à un demi-milliard de dollars de retombées économiques pour ces régions.
Pour le cas de Waterworth, Meta souligne en particulier les opportunités offertes par la collaboration avec l’Inde. La croissance fulgurante des besoins en matière de centres de données d’IA et des services cloud du pays serait l’une des raisons pour lesquelles il a été choisi par l’entreprise en tant que partenaire majeur. En tant que contributeur au projet, l’Inde prévoit de participer au financement, à la maintenance et à la réparation du câble dans l’océan Indien.
« Alors que l’IA continue de transformer les industries et les sociétés du monde entier, il est clair que la capacité, la résilience et la portée mondiale sont plus importantes que jamais pour soutenir les infrastructures de pointe », indique l’entreprise. Des experts estiment en outre que ce projet pourrait faire de l’Inde l’une des capitales mondiales de la formation d’IA.
Par ailleurs, l’itinéraire choisi par Meta pour l’implantation du câble viserait à éviter les zones de tension géopolitique. Au cours des dernières années, des câbles sous-marins ont été détruits dans la mer Rouge par des groupes armés s’en prenant aux bateaux de passage. La Russie serait également soupçonnée d’avoir sectionné un câble dans la mer Baltique, tandis qu’un navire chinois serait impliqué dans les dommages d’un autre câble dans les eaux européennes.
L’itinéraire de Waterworth contourne stratégiquement la mer Rouge, la mer de Chine méridionale, les côtes de l’Égypte et de Marseille, le détroit de Malacca et de Singapour — tous considérés aujourd’hui comme des points de tension majeurs.