Dans un système binaire, une naine blanche en rotation rapide entraîne l’espace-temps avec elle

naine blanche pulsar
| Mark Myers/OzGrav ARC Centre of Excellence
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Des trous noirs aux ondes gravitationnelles en passant par les effets de lentilles gravitationnelles, la théorie de la relativité générale d’Albert Einstein a fait de nombreuses prédictions qui ont été validées expérimentalement au cours du temps. Cependant, certaines de ces prédictions sont moins connues que d’autres. C’est le cas de l’effet Lense-Thirring, qui décrit un phénomène d’entraînement de l’espace-temps autour d’objets très denses en rotation très rapide. Lancé en 2004, le satellite Gravity Probe B de la NASA a permis de confirmer expérimentalement ce phénomène en 2011. Et récemment, des astrophysiciens ont de nouveau pu confirmer l’effet Lense-Thirring autour d’une naine blanche dans le cadre d’un système binaire.

Dans la vie de tous les jours, ce phénomène est à la fois indétectable et sans conséquence, car l’effet est ridiculement petit. La détection de l’entraînement de l’espace-temps causée par la rotation de la Terre nécessite des satellites tels que la sonde de Gravity probe B de 750 millions de dollars et la détection des changements angulaires des gyroscopes équivalant à un degré tous les 100’000 ans environ.

Heureusement, l’Univers contient de nombreux laboratoires gravitationnels naturels où les physiciens peuvent observer les prédictions d’Einstein en détails. Cette nouvelle étude, publiée dans la revue Science, révèle des preuves de l’effet Lense-Thirring à une échelle beaucoup plus notable, à l’aide d’un radiotélescope et d’une paire unique d’étoiles compactes tournant l’une autour de l’autre à des vitesses vertigineuses.

Une invitation à rêver, prête à être portée.

Une naine blanche et un pulsar pour confirmer l’effet Lense-Thirring

Le mouvement de ces étoiles aurait rendu les astronomes perplexes au temps de Newton, car elles se déplacent dans un espace-temps déformé, et nécessitent la théorie générale de la relativité d’Einstein pour expliquer leurs trajectoires. L’une de ses prédictions les moins connues de cette théorie est que les corps en rotation entraînent avec eux l’espace-temps. Plus un objet tourne vite et plus il est massif, plus l’entraînement est puissant.

Les naines blanches sont un excellent cadre pour étudier ce processus. Elles sont de taille similaire à la Terre mais des centaines de milliers de fois plus massives. Elles peuvent également tourner très rapidement, jusqu’à un tour par minute. L’entraînement provoqué par une telle naine blanche serait environ 100 millions de fois plus puissant que celui de la Terre.

lense thirring
Illustration montrant l’effet Lense-Thirring dans le cadre d’un système binaire naine blanche-pulsar. Crédits : Mark Myers/OzGrav ARC Centre of Excellence

Il y a vingt ans, le radiotélescope Parkes du CSIRO a découvert une paire stellaire unique composée d’une naine blanche (de la taille de la Terre mais environ 300’000 fois plus massive) et d’un radio-pulsar. Les pulsars sont constitués de neutrons étroitement liés, ce qui les rend incroyablement denses. En outre, ils tournent bien plus vite que les naines blanches : 150 tours/minute pour le pulsar étudié par les auteurs.

PSR J1141-6545 : un laboratoire gravitationnel idéal pour étudier la relativité générale

Cela signifie que, 150 fois par minute, un faisceau d’ondes radio émises par ce pulsar balaye notre point d’observation ici sur Terre. Les astrophysiciens peuvent l’utiliser pour cartographier la trajectoire du pulsar lorsqu’il orbite autour de la naine blanche, en chronométrant quand son impulsion arrive au télescope et en connaissant la vitesse de la lumière. Cette méthode a révélé que les deux étoiles orbitent l’une autour de l’autre en moins de 5 heures.

Cette paire, officiellement appelée PSR J1141-6545, est un laboratoire gravitationnel idéal. Depuis 2001, les chercheurs ont utilisé Parkes plusieurs fois par an pour cartographier l’orbite de ce système, qui présente une multitude d’effets gravitationnels.

Bien que PSR J1141-6545 soit à plusieurs centaines de quadrillions de kilomètres (un quadrillion représente un million de milliards), les données montrent que le pulsar tourne 2.54 fois par seconde, et que son orbite varie dans l’espace. Cela signifie que le plan de son orbite n’est pas fixe, mais tourne lentement.

Sur le même sujet : L’étude d’un pulsar confirme l’une des prédictions de la relativité générale

Système binaire : l’étoile compagnon permet l’accélération de la rotation de la naine blanche

Lorsque des paires d’étoiles naissent, la plus massive meurt en premier, créant souvent une naine blanche. Avant que la deuxième étoile ne meure, elle transfère de la matière à sa compagne naine blanche. Un disque se forme lorsque ce matériau tombe vers la naine blanche, et au cours de dizaines de milliers d’années, cela fait accélérer cette dernière, jusqu’à ce qu’elle effectue un tour complet toutes les quelques minutes.

systeme binaire
De nombreux systèmes binaires impliquent une étoile géante et une naine blanche, la seconde accrétant la matière de la première. Cette accrétion entraîne une accélération de la rotation de la naine blanche. Crédits : Pearson Ed

Dans de rares cas comme celui-ci, la deuxième étoile peut alors exploser en supernova, laissant derrière elle un pulsar. La naine blanche qui tourne rapidement entraîne l’espace-temps avec elle, faisant basculer le plan orbital du pulsar pendant qu’il se déplace. Cette inclinaison est ce que les astrophysiciens ont observé à travers la cartographie de l’orbite du pulsar.

Sources : Science

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