L’Agence spatiale américaine vient de mettre en place une équipe qui sera entièrement consacrée à l’étude des phénomènes aérospatiaux non identifiés (PAN). Pendant plusieurs mois, cette équipe va examiner de près les rapports d’observations qui ne correspondent à aucun aéronef ou phénomène naturel connu. L’objectif est de poser un regard scientifique sur ces événements et de déterminer s’ils constituent ou non une menace pour la sécurité nationale et aérienne.
Même si l’initiative est plutôt excitante, la NASA a rappelé d’emblée qu’« il n’y a aucune preuve que les PAN sont d’origine extraterrestre ». L’agence estime néanmoins nécessaire d’examiner plus avant les différents phénomènes, surtout pour des raisons de sécurité aérienne. Il est notamment question d’identifier en premier lieu lesquels des événements enregistrés sont d’origine naturelle, afin d’améliorer la sécurité des aéronefs actuels et futurs.
« Nous avons les outils et l’équipe qui peuvent nous aider à améliorer notre compréhension de l’inconnu. C’est la définition même de ce qu’est la science », a déclaré Thomas Zurbuchen, administrateur associé pour la science au siège de la NASA, lors d’une téléconférence qui s’est tenue hier. L’étude vise à caractériser les données disponibles sur les PAN et à déterminer la meilleure façon de collecter les données futures. L’équipe sera dirigée par David Spergel, ancien président du Département d’astrophysique de l’Université de Princeton.
Un sujet de recherche pris depuis trop longtemps à la légère
« Compte tenu de la rareté des observations, notre première tâche consiste simplement à rassembler l’ensemble de données le plus robuste possible », a déclaré Spergel. En effet, les observations de PAN ne sont pas si fréquentes que cela et il est plus difficile de tirer des conclusions à partir de si peu de données disponibles.
L’armée américaine a elle aussi montré un intérêt croissant pour ces phénomènes inexpliqués ces dernières années. De nombreux témoignages proviennent d’ailleurs de pilotes de l’US Navy. Il y a un an de cela, le Pentagone a publié un rapport déclassifié sur les observations d’ovnis ; malheureusement, le document (de neuf pages seulement) a déçu bon nombre de passionnés : la quasi-totalité des 144 événements examinés n’a finalement trouvé aucune explication et aucune hypothèse n’a été rejetée, ni confirmée.
Peu de temps avant la publication de ce rapport, le planétologue Ravi Kopparapu, du Goddard Space Flight Center de la NASA, et Jacob Haqq-Misra, astrobiologiste au Blue Marble Space Institute of Science, regrettaient que le sujet ne soit pas exploré par la communauté scientifique avec la même rigueur et la même persévérance que d’autres domaines plus traditionnels. « Avant de nous demander ce que sont ces phénomènes mystérieux, nous devons nous demander comment nous pouvons les comprendre. C’est là qu’interviennent les scientifiques, notablement absents de la conversation actuelle sur les PAN », écrivaient-ils dans un article d’opinion du Washington Post.
Selon eux, le manque de connaissances sur les PAN et ovnis a pendant des années été comblé par des affirmations non scientifiques, en raison du manque de recherches scientifiques. Un point de vue partagé par Jacques Vallée, un informaticien et ufologue qui a conseillé l’armée de l’air dans le cadre du projet Blue Book d’enquête sur les ovnis dans les années 1960 et qui a été récemment consulté dans le cadre des recherches du Pentagone. « Les enquêtes du Congrès sur ce sujet se sont souvent avérées avoir une valeur de divertissement et peu de substance », a-t-il déclaré à Politico.
Peut-être que l’équipe de la NASA, qui regroupe des experts des communautés scientifiques, aéronautiques et d’analyse de données, apportera enfin quelques réponses.
De probables phénomènes physiques encore inconnus
La NASA rappelle dans son communiqué qu’elle ne fait pas partie du Groupe de travail sur les phénomènes aériens non identifiés (UAPTF) du ministère de la Défense ou de son successeur, le Groupe de synchronisation de l’identification et de la gestion des objets aériens (AOIMSG), fondé en novembre 2021. Elle a néanmoins assuré une large coordination au sein du gouvernement sur la manière d’appliquer les outils scientifiques pour tenter d’expliquer les PAN.
Cette nouvelle étude indépendante sera lancée à l’automne et devrait durer environ neuf mois. Les experts commenceront par rassembler l’ensemble des données existantes sur le sujet. « Nous allons identifier les données – provenant de civils, de gouvernements, d’organisations à but non lucratif, d’entreprises – qui existent, identifier ce que nous devrions essayer de collecter en plus, et comment les analyser au mieux », détaille Spergel.
Quelles que soient les conclusions de l’équipe, toutes les données de cette étude seront à la disposition du public, comme toutes les données de la NASA, afin que chacun puisse les consulter. « Conformément aux principes d’ouverture, de transparence et d’intégrité scientifique de la NASA, ce rapport sera partagé publiquement », a confirmé Daniel Evans, administrateur adjoint délégué à la recherche au Science Mission Directorate de la NASA, et responsable de la NASA chargé d’orchestrer l’étude.
L’objectif n’est pas tant de prouver que nous ne sommes pas seuls dans l’Univers, mais surtout de démontrer la puissance d’une véritable démarche scientifique et des outils mis en oeuvre. « L’un des résultats de cette étude, pour moi, serait de faire comprendre à tout le monde […] que le processus scientifique est valable pour traiter tous les problèmes, y compris celui-là », a souligné Thomas Zurbuchen, qui pense que cette étude révélera sans doute de nouveaux phénomènes physiques naturels encore inconnus.