Après plusieurs semaines de concertation, la NASA a décidé de rapatrier l’équipage du Starliner de Boeing à bord de la capsule Crew Dragon de SpaceX en février 2025. Cela signifie que les deux astronautes resteront à bord de la Station spatiale internationale (ISS) pendant 6 mois supplémentaires au lieu des 8 jours initialement prévus, et que le Starliner atterrira en fin de compte à vide.
Alors que Boeing est depuis peu au cœur d’une polémique concernant certains de ses avions, il traverse une crise supplémentaire de relations publiques concernant son volet aérospatial. Le 5 juin dernier, la capsule Starliner a été lancée avec à son bord les astronautes Butch Wilmore et Sunita Williams. Alors que la mission était initialement censée durer 8 jours, le retour sur Terre de l’équipage a été reporté à plusieurs reprises en raison de problèmes techniques successifs.
Lors de l’ascension vers l’ISS, 5 des 28 propulseurs de la capsule ont enregistré des fuites d’hélium que les ingénieurs ont initialement considéré comme suffisamment mineures pour que la mission se poursuive comme prévu. Cependant, bien que 4 des propulseurs endommagés aient été réparés, il s’est avéré plus tard que les problèmes sont bien plus complexes que prévu. Les responsables ont commencé à craindre que la capsule ne se désamarre pas correctement et deviennent hors de contrôle lors du trajet de retour.
Depuis le mois de juillet, les équipes de Boeing et de la NASA ont alors assuré travailler sur la résolution de ces problèmes de sorte à rapatrier les astronautes en toute sécurité. Une option de dernier recours consistant notamment à rapatrier l’équipage à bord d’une autre capsule a été également été étudiée. Après plusieurs semaines d’enquête et de concertation, la NASA a finalement décidé que le voyage de retour s’effectuera avec la mission Crew 9 de SpaceX, dont le retour sur Terre est prévu pour le mois de février 2025.
« Les vols spatiaux sont risqués, même dans les conditions les plus sûres et les plus routinières. Un vol d’essai, par nature, n’est ni sûr ni routinier », explique dans un communiqué Bill Nelson, administrateur de la NASA. « La décision de garder Butch et Suni à bord de la Station spatiale internationale et de ramener le Starliner de Boeing à la maison sans équipage est le résultat de notre engagement en faveur de la sécurité », indique-t-il.
Une absence de consensus sur la véritable nature des problèmes
La décision de la NASA de rapatrier Wilmore et Williams à bord de la capsule Crew Dragon découle d’une absence de consensus sur la véritable nature des problèmes liés au Starliner. Bien que l’agence ait sollicité l’appui d’experts externes à la mission, y compris ceux du Jet Propulsion Laboratory, des désaccords et des incertitudes persistent. Cela ne répond pas aux exigences de sécurité de l’agence pour les vols spatiaux habités.
En conséquence, le lancement de la mission Crew 9 a été reporté pour le 24 septembre avec à son bord deux astronautes pour le voyage d’aller (au lieu des quatre initialement prévus) et quatre pendant le voyage de retour en incluant l’équipage du Starliner. La NASA travaille actuellement avec SpaceX pour la reconfiguration des sièges de la capsule à cette fin. Elle sera également configurée pour transporter une charge supplémentaire incluant les effets personnels ainsi que les combinaisons spatiales spécifiques au Crew Dragon destinées à Wilmore et à Williams.
En outre, la mission Crew 9 bénéficiera de la nouvelle aire de lancement Complex-40 de la base spatiale de Cap Canaveral en Floride, offrant une plus grande flexibilité opérationnelle. Parallèlement, le logiciel de vol du Starliner sera reconfiguré pour qu’il puisse se désamarrer de manière autonome et entamer la descente vers la Terre sans son équipage. Cette étape devra être effectuée avant le lancement de Crew 9 (probablement début septembre), afin que celui-ci puisse disposer d’un port d’amarrage libre au niveau de l’ISS. En attendant la fin de la mission Crew 9, Wilmore et Williams seront assignés aux travaux techniques habituels sur l’ISS.
Par ailleurs, les ingénieurs de la NASA et de Boeing continueront de collecter des données sur les performances du Starliner en vue des améliorations à apporter pour les futures missions avec équipage. En effet, l’obtention de la certification pour le programme commercial de la NASA exige que la capsule effectue au moins un vol d’essai réussi avec équipage, afin d’assurer qu’elle est prête pour des vols réguliers vers et depuis la station spatiale.
Des problèmes avant même le premier lancement avec équipage
Les problèmes rencontrés dans le cadre de la mission Starliner ont débuté avant même son premier lancement avec équipage. En effet, Boeing a été sélectionné par la NASA en même temps que SpaceX (en 2014) pour le développement de capsules pouvant acheminer ses astronautes vers l’ISS. Boeing figure d’ailleurs parmi les acteurs majeurs des missions spatiales de la NASA et s’est vu attribuer un financement de 4,2 milliards de dollars pour la construction du Starliner (contre 2,6 milliards de dollars pour SpaceX).
Cependant, les problèmes successifs liés à Starliner pourraient entamer considérablement la confiance de la NASA et des autres investisseurs. La capsule devait notamment être prête pour son premier vol avec équipage en 2017. Or, alors que SpaceX en est déjà à sa 9e mission de rotation, Boeing n’a réussi son premier lancement sans équipage qu’en 2022 avec un dépassement de budget s’élevant à 1,5 milliard de dollars. Et malgré des fuites d’hélium détectées avant le lancement du juin, la mission Starliner a finalement été poursuivie suite à la résolution d’un problème de parachute en 2023.