Des « passeports d’immunité » pour relancer plus rapidement l’économie ?

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Comme nous l’évoquions hier, plusieurs équipes de chercheurs tentent de déterminer aujourd’hui si le fait d’avoir été infecté par le SARS-Cov-2 conférait ou non une immunité et si oui, pour combien de temps ? Une fois ce mystère résolu, certains avancent l’idée de mettre en place des « passeports d’immunité », attestant de la protection d’un individu contre le Covid-19. De cette manière, les personnes dotées des précieux anticorps pourraient retrouver une vie normale et se rendre à leur travail…

Car si les conséquences sanitaires du Covid-19 sont dramatiques, les conséquences économiques, tant à l’échelle nationale que mondiale, sont et seront catastrophiques… Pour limiter les dégâts, un retour « à la normale » au plus vite des différents secteurs d’activité est vivement souhaité. D’où l’idée d’identifier dans la population les personnes qui pourraient retourner travailler sans risque.

Un laissez-passer vers la vie active

Ainsi, des scientifiques et politiciens britanniques ont récemment suggéré la mise en place de passeports d’immunité. Seules les personnes présentant des anticorps contre le Covid-19 dans leur sang obtiendraient ce passeport et pourraient circuler normalement, comme avant le confinement. Dans ce contexte, une équipe d’experts allemands, du Centre Helmholtz pour la recherche sur les infections, s’apprête à lancer une étude de masse. Ils prévoient d’analyser le sérum sanguin de plus de 100’000 donneurs anonymes et de tester régulièrement la présence d’anticorps contre le Covid-19 au sein de la population. L’objectif étant de connaître toutes les caractéristiques de l’immunité induite par l’infection, notamment son efficacité et sa durée. Pour garantir la représentativité de l’étude, aucun don volontaire ne peut être pris en compte pour le moment.

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Des analyses de sang à grande échelle pour contrôler la présence d’anticorps pourraient déboucher sur la mise en place de « passeports d’immunité ». Ce document permettrait à son porteur de circuler librement. Crédits : Pexels

Cette étude, coordonnée par l’épidémiologiste Gérard Krause, devrait débuter vers la mi-avril. Si les résultats sont concluants, les autorités pourraient émettre des laissez-passer, puis décider dans quelles zones les écoles peuvent rouvrir et quelles personnes peuvent retourner au travail en toute sécurité.

« Ceux qui sont immunisés pourraient se voir délivrer une sorte de carte de vaccination qui leur permettrait, par exemple, d’être exemptés des restrictions sur leur activité », a déclaré Gerard Krause, chef de l’épidémiologie au Centre Helmholtz.

Encore trop d’incertitudes sur la réponse immunitaire au Covid-19

L’initiative allemande inspire à présent d’autres gouvernements : « L’Allemagne semble ouvrir la voie en matière de tests et nous avons beaucoup à apprendre de leur approche », déclare Jonathan Ashworth, secrétaire d’État à la Santé du cabinet fantôme du Royaume-Uni. « J’ai déjà appelé à davantage de tests et de recherche de contacts au Royaume-Uni et nous devrions étudier plus attentivement des initiatives comme celle-ci ». Une députée du Scottish National Party, la doctoresse Philippa Whitford, estime toutefois que le déploiement d’un tel certificat à l’échelle du pays serait complexe, de par la lourdeur administrative que cela nécessiterait. En revanche, un usage réservé aux travailleurs jugés « clés », comme le personnel de santé, pourrait être envisagé.

Le problème est qu’actuellement les scientifiques ne sont pas certains que le fait d’être infecté une fois engendre une immunité permanente de l’organisme. Whitford souligne en effet qu’une personne contractant un SARS, un autre coronavirus, ne présente pas d’immunité à long terme ; celle-ci peut durer un an tout au plus. Le professeur Peter Openshaw, immunologiste à l’Imperial College London estime que, si l’on se base sur les données récoltées au sujet des coronavirus qui provoquent les rhumes, dans le pire des cas « les anciens patients n’auraient qu’une résistance partielle pendant environ trois mois ».

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Selon les spécialistes, la réponse immunitaire pourrait toutefois s’avérer suffisamment efficace pour garantir une immunité d’une ou plusieurs années. Mais personne à ce jour ne peut le garantir. À ce stade de l’épidémie et sur la base des connaissances acquises, Openshaw déclare que les passeports d’immunité sont une « mesure provisoire raisonnable ». La procédure devra toutefois être encadrée par un dispositif de surveillance accrue : les personnes retournant à la vie normale devront être régulièrement contrôlées pour vérifier qu’elles sont bel et bien protégées.

L’effet pervers qui pourrait cependant découler de l’utilisation de tels laissez-passer est une incitation à contracter le virus. Des personnes en situation délicate de par la perte de leur travail pourraient vouloir être infectées à tout prix dans l’espoir de développer une immunité qui leur permettrait de retourner gagner leur vie.

Source : Helmholtz Centre for Infection Research

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