Des chercheurs ont testé avec succès un traitement à base de protéines d’arachide. Après cet essai de plusieurs mois sur un large échantillon d’enfants et d’adolescents, plus de la moitié d’entre eux étaient capables de tolérer trois à quatre arachides. Un espoir pour ceux qui souffrent de cette allergie à l’origine de nombreux chocs anaphylactiques, pouvant conduire à la mort.
L’étude, publiée dans The Lancet Child & Adolescent Health, rapporte que plus de 6 millions de personnes souffrent d’allergie à l’arachide aux États-Unis ; c’est la principale cause d’anaphylaxie d’origine alimentaire. Les symptômes apparaissent quelques minutes seulement suivant le contact avec l’allergène : urticaire, rougeurs, œdème de Quincke, difficultés respiratoires, perte de connaissance, etc. L’issue peut être fatale.
Une allergie qui impacte la qualité de vie
Les allergies peuvent se manifester par des réactions cutanées, respiratoires ou généralisées. Leur prévalence a considérablement augmenté au cours des trois dernières décennies dans les pays industrialisés. Selon l’Inserm, on estime aujourd’hui que 25 à 30% de la population est concernée par une maladie allergique. Les enfants et les jeunes adultes sont les plus touchés.
On parle d’anaphylaxie lorsque la réaction allergique est généralisée ; elle est due à une activation inappropriée de cellules du système immunitaire (les mastocytes des tissus et des basophiles du sang), qui provoquent en quelques secondes ou minutes une libération massive d’histamine. Cette dernière est à l’origine des symptômes. Les allergènes en cause sont le plus souvent des aliments (dans 60% des cas).
Lorsque l’allergène est identifié, le traitement consiste à évincer complètement l’aliment concerné de son alimentation. Mais ce n’est pas toujours si simple, notamment dans le cas de l’arachide, qui peut être présente sous forme de « traces » dans de très nombreux produits salés et sucrés, sans pour autant en être l’ingrédient principal. Au quotidien, il faut se livrer à un vrai décryptage d’étiquettes et surtout, être particulièrement vigilant lorsque l’on prend ses repas à l’extérieur (restaurant, cantine scolaire, goûter d’anniversaire, etc.).
Or, l’allergie à l’arachide est en augmentation chez les enfants depuis quelques années. Une étude menée par l’American College of Allergy, Asthma and Immunology, publiée en 2017, révélait en effet que cette forme d’allergie avait augmenté de 21% depuis 2010 ! Et bien d’autres allergies alimentaires sont de plus en plus fréquentes : noix, crustacés, sésame, etc.
Dans une nouvelle étude, une équipe de chercheurs européens présente un nouveau traitement pour, non pas éliminer l’allergie, mais diminuer la gravité des réactions. Ils ont ainsi mené un essai clinique de phase 3, dénommé « essai ARTEMIS », sur des enfants dans 18 hôpitaux en Irlande, en France, en Allemagne, en Italie, en Espagne, en Suède et au Royaume-Uni. Au total, 175 enfants allergiques aux arachides, âgés de 4 à 17 ans, ont participé à la recherche.
Chaque jour, certains ont reçu des quantités croissantes de protéines d’arachides (une molécule désignée par AR101), d’autres un placebo. Les doses ont été augmentées toutes les 2 semaines pendant 6 mois, jusqu’à ce qu’une dose quotidienne de 300 mg soit atteinte et maintenue pendant 3 mois. L’objectif de ce traitement, qui s’apparente à de la désensibilisation, était d’évaluer quelle proportion de participants pouvait ensuite consommer une dose de 1 g de protéines d’arachide sans développer de symptômes.
Augmenter la tolérance à l’arachide
Résultat : à l’issue du traitement, 58% des enfants à qui l’on avait administré des doses progressives d’AR101 pouvaient tolérer au moins trois à quatre arachides (contre 2% parmi les participants du groupe placebo). En d’autres termes, ils pouvaient en ingérer sans pour autant développer des symptômes graves. Les chercheurs rappellent en effet que l’objectif n’était pas de permettre à ces patients de manger du beurre de cacahuètes à la petite cuillère, mais bien de diminuer la gravité des réactions en cas d’exposition accidentelle à l’allergène.
À noter que des événements indésirables ont été signalés par presque tous les participants, mais leur gravité était jugée légère ou modérée pour la plupart de ceux ayant reçu les protéines d’arachide. Ce traitement d’immunothérapie orale semble donc être une méthode efficace : en offrant une désensibilisation rapide à l’arachide, il augmente nettement la qualité de vie des patients, qui peuvent assumer plus sereinement leur allergie.
Sur le même sujet : Des chercheurs ont créé un « vaccin » contre les allergies aux chats
L’un des participants, James Redman, un jeune britannique de 12 ans, se réjouit d’avoir pu bénéficier de cette désensibilisation. « Participer à l’étude a été la plus grande opportunité de ma vie », a-t-il déclaré. Il avait 3 ans lorsqu’il a effectué un premier choc anaphylactique au contact d’arachides. Dès lors, il a dû vivre avec cette menace permanente, potentiellement mortelle. Grâce au traitement, il peut désormais tolérer jusqu’à sept cacahuètes sans développer de réaction sévère.
Ce n’est pas le premier essai visant à désensibiliser les personnes allergiques aux cacahuètes. Plus tôt cette année, la Food and Drug Administration avait d’ores et déjà donné son feu vert pour un médicament destiné à réduire les allergies aux arachides chez les enfants. Tout comme la formule testée ici, le Palforzia contient des protéines d’arachide et vise uniquement à augmenter la tolérance du patient vis-à-vis de cet aliment. Aucun traitement curatif n’existe à ce jour.