Il est possible que des trous de ver aient déjà été détectés, selon une nouvelle étude

détection trous de ver
Vue d’artiste d’un trou de ver. | Mark Garlick/Getty Images
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Les trous de ver sont des objets hypothétiques reliant deux points dans l’espace-temps. Ils demeurent cependant du domaine de la théorie, car leur existence n’a encore jamais été prouvée. Dans une nouvelle étude, des physiciens avancent l’idée que ces tunnels de l’espace-temps, présentant des similitudes avec les trous noirs, pourraient en réalité se cacher à la vue de tous et auraient pu être détectés depuis longtemps.

Un trou de ver est un objet hypothétique qui relierait deux régions distinctes de l’espace-temps. Considéré comme un potentiel raccourci à travers l’espace-temps, il ressemblerait à un tunnel dont l’entrée serait un trou noir, et la sortie un trou blanc — c’est du moins de cette façon qu’il est décrit dans les films de science-fiction. Un vaisseau spatial pourrait ainsi emprunter un tel trou de ver pour se déplacer rapidement (plus vite que la lumière) dans l’Univers. Leur existence a été prédite en 1935, par Albert Einstein et Nathan Rosen. Ces objets n’ont toutefois jamais été observés à ce jour.

Des physiciens de l’Université de Sofia en Bulgarie proposent toutefois l’idée suivante : les trous de ver pourraient tant ressembler à des trous noirs qu’il est possible qu’ils aient déjà été détectés. Petya Nedkova et ses collègues ont simulé les émissions de lumière polarisée d’un hypothétique trou de ver, statique et traversable. Ils ont ensuite comparé l’image de cette lumière polarisée au spectre de celle émise par le disque d’accrétion d’un trou noir statique. Ils ont alors constaté que les deux spectres étaient quasiment identiques. Les deux objets seraient donc particulièrement difficiles à distinguer.

Une invitation à rêver, prête à être portée.

Des trous noirs qui pourraient être des trous de ver

Différents types de trous de ver ont été théorisés : le trou de ver de Schwarzschild, infranchissable ; le trou de ver de Reissner-Nordstrøm ou de Kerr-Newman, franchissable dans un seul sens ; et le trou de ver de Lorentz, franchissable dans les deux sens. Ils sont généralement représentés comme une sorte de tunnel reliant deux trous noirs. Or, les trous noirs sont connus pour absorber toute matière passant à proximité ; aucun rayonnement ne peut s’en échapper.

Mais les scientifiques pensent que dans certaines conditions, il pourrait être possible de traverser ce tunnel cosmique et d’en demeurer indemne. Pour déterminer à quoi pourrait ressembler un trou noir avec une issue — issue qui serait dès lors ce que l’on appelle un « trou blanc » — en particulier du point de vue des observatoires tels que l’Event Horizon Telescope, Nedkova et son équipe ont développé un modèle simplifié de la « gorge » d’un tel trou de ver, sous la forme d’un anneau de fluide magnétisé. Ils ont ensuite formulé diverses hypothèses sur la façon dont la matière en ferait le tour avant d’être « avalée ».

Ils sont arrivés à la conclusion que des particules capturées par ce trou de ver généreraient de puissants champs magnétiques, polarisant toute lumière émise par la matière chauffée. Mais en comparant les images directes polarisées pour différents angles d’inclinaison à l’image de la lumière polarisée émise par le disque d’un trou noir, l’équipe a constaté que l’intensité et la direction de la polarisation différaient de moins de 4% !

Or, c’est justement le traçage des ondes radio polarisées qui a fourni les toutes premières images de M87* en 2019, et de Sagittarius A* plus tôt cette année. Ainsi, ces trous noirs pourraient tout aussi bien être des trous de ver, car jusqu’à présent, il n’existe pas vraiment de moyen de distinguer les deux…

À la recherche d’autres signes distinctifs

Mais l’équipe de Nedkova a peut-être trouvé un moyen. Dans le cadre de leur étude, ils ont également créé des images indirectes du trou de ver, vu à travers une lentille gravitationnelle. Ces images indirectes montraient des schémas de polarisation similaires, mais les rayons observables des objets étaient considérablement différents. « La détection du rayonnement provenant de la région située de part et d’autre de la gorge du trou de ver conduit à la formation d’une structure supplémentaire d’images annulaires présentant des propriétés de polarisation distinctes », écrivent les chercheurs.

En outre, dans ces images, les intensités de polarisation des trous de ver étaient supérieures d’un ordre de grandeur à celles des trous noirs. Ceci pourrait donc aider à distinguer les trous de ver des trous noirs.

Cette approche nécessite toutefois la présence d’une masse idéalement placée entre un télescope et un potentiel trou de ver, afin de disposer d’une lentille permettant d’amplifier ces différences minimes. Un trou de ver observé depuis un angle parfait, directement à travers sa gorge, fournirait également une signature caractéristique qui pourrait permettre de l’identifier sans doute possible.

L’équipe envisage à présent, à l’aide d’une modélisation plus poussée, de rechercher d’autres signaux qui pourraient aider à distinguer les deux objets, mais qui ne nécessitent pas les conditions d’observations précises requises pour repérer les effets de polarisation. Certaines de ces mesures exigeraient en effet un niveau de précision que les télescopes actuels ne peuvent atteindre. « Nous chercherons quelque chose qui nous permettra de faire la différence plus facilement », a déclaré Nedkova.

Imposer de nouvelles contraintes à la physique des trous de ver pourrait ouvrir de nouvelles pistes pour explorer non seulement la relativité générale, mais aussi la physique décrivant le comportement des ondes et des particules.

Source : V. Deliyski et al., Physical Review D

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