L’an dernier, des astrobiologistes ont publié une étude confirmant que l’océan d’eau liquide sous la surface d’Encelade — l’une des lunes de Saturne — abrite les composés organiques nécessaires à la vie. Une vie extraterrestre pourrait donc potentiellement s’y trouver. Et parce que la recherche d’autres formes de vie est l’un des piliers de l’exploration spatiale, les ingénieurs de la NASA ont développé un nouveau robot autonome, destiné à explorer les eaux glacées de notre système solaire.
L’engin, baptisé BRUIE (pour Buoyant Rover for Under-Ice Exploration), est le fruit d’un travail de collaboration entre le Jet Propulsion Laboratory (JPL) de la NASA et l’École d’ingénierie de l’Université d’Australie occidentale (UWA). Il s’agit d’un rover flottant, équipé de deux roues indépendantes, capable de rouler sur la face interne des couches de glace. Il est en outre équipé de deux caméras haute définition et de divers instruments de mesure, permettant de détecter la présence de certains composés dans l’eau.
Une exploration dans des conditions extrêmes
Le Système solaire comporte beaucoup de satellites naturels couverts par des océans profonds, dissimulés sous d’épaisses couches de glace. Des scientifiques comme Kevin Hand, responsable du projet BRUIE au JPL, pensent que ces océans lunaires, tels que ceux d’Europe (l’une des lunes de Jupiter) et d’Encelade (une lune de Saturne), constituent les meilleurs endroits pour rechercher une forme de vie dans notre système solaire.
Selon les estimations des scientifiques, la température moyenne à la surface d’Europe est aux alentours de -162 °C ; – 200 °C pour Encelade. C’est pourquoi l’engin vient d’être testé pendant un mois en Antarctique, à la station de recherche australienne Casey, afin d’étudier son comportement en conditions extrêmes. De précédentes phases de test ont eu lieu en Alaska il y a cinq ans :
Les eaux antarctiques sont l’analogue terrestre le plus proche des océans d’une lune glacée, ce qui en fait un terrain d’essai idéal pour le robot BRUIE. Les scientifiques s’intéressent en particulier à ce qui se trouve à l’endroit où l’eau et la glace se rencontrent, car la glace pourrait servir de source d’oxygène et de nutriments à d’éventuels organismes vivant dans l’eau – c’est du moins ce qui a déjà été observé sur Terre.
Bientôt à la recherche de la vie sur Europe ?
« Nous avons constaté que la vie se situe souvent aux interfaces, que ce soit au fond de la mer ou à l’interface glace-eau en surface », explique Andy Klesh, ingénieur en chef au JPL. « La plupart des submersibles ont du mal à enquêter sur cette zone, car les courants océaniques peuvent les faire s’écraser, et ils gaspillent beaucoup de puissance pour maintenir leur position ». BRUIE a été conçu pour pallier toutes ces difficultés : sa flottabilité lui permet de rester ancré contre la glace et il est imperméable à la plupart des courants. En outre, il peut s’éteindre en toute sécurité, ne s’allumant que lorsqu’il a besoin de prendre une mesure, de sorte qu’il puisse fonctionner pendant des mois.
Parmi les mesures effectuées en Antarctique : le taux d’oxygène dissous, la salinité de l’eau, la pression et la température, soit la plupart des paramètres liés à l’existence de la vie sur Terre. Les scientifiques soulignent que dans l’espace, néanmoins, il ne sera certainement pas aussi aisé de détecter une forme de vie, car celle-ci peut s’avérer très différente de ce que l’on connaît sur Terre.
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La prochaine destination de BRUIE ? Peut-être Jupiter. Le lancement de l’orbiteur Europa Clipper, prévu pour 2025, est destiné à l’étude du satellite océanique de Jupiter, Europe. « Europa Clipper pourrait être suivie d’une mission ultérieure, qui viserait à atterrir à la surface d’Europe et à déployer une évolution de BRUIE, commençant ainsi la recherche de vie sur la lune glacée », a déclaré le Dr Dan Arthur, de l’UWA.
En attendant, l’équipe du projet veillera à ce que ce robot soit capable de fonctionner sous la glace pendant plusieurs mois, de naviguer à distance sans attache et d’explorer l’océan à de plus grandes profondeurs. Même s’il est principalement destiné à la recherche spatiale, BRUIE peut également être largement utilisé sur Terre dans le cadre de recherches océanographiques.