Des données satellitaires révèlent une fuite de méthane extrêmement importante aux États-Unis

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| Nick Simonite
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Le Bassin Permien est un bassin sédimentaire situé aux États-Unis et l’une des régions productrices d’hydrocarbures les plus prolifiques du monde. Cependant, ce rendement spectaculaire ne se fait pas sans conséquences. Des mesures de l’instrument TROPOMI du satellite Sentinel-5P de l’ESA effectuées sur une année ont révélé que le Bassin permien était à l’origine d’une émission extrêmement importante de méthane. En plus d’être gaspillé, le gaz contribue pour une part non négligeable à l’effet de serre et au réchauffement climatique. 

Les résultats publiés dans la revue Science Advances montrent que les opérations pétrolières et gazières dans le vaste bassin permien des États-Unis rejettent du méthane à un rythme deux fois plus élevé que dans les études précédentes de 11 autres grandes régions pétrolières et gazières des États-Unis.

« Ce sont les émissions les plus élevées jamais mesurées dans un grand bassin pétrolier et gazier américain. Il y a tellement de méthane s’échappant des activités pétrolières et gazières du bassin qu’il triple presque l’impact climatique de 20 ans de la combustion du gaz qu’ils produisent. Ces résultats démontrent la capacité croissante de la technologie satellite à suivre de telles émissions et à fournir les données nécessaires aux entreprises et aux régulateurs pour savoir où les réductions d’émissions sont nécessaires », déclare Steven Hamburg.

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Une importante fuite de méthane évaluée par TROPOMI

Sur la base de 11 mois de données satellitaires englobant 200’000 relevés individuels effectués sur le bassin de 160’000 kilomètres carrés par l’instrument TROPOMI de l’Agence spatiale européenne de mai 2018 à mars 2019, les opérations pétrolières et gazières du Permien émettent du méthane à un taux égal à 3.7% de leur production de gaz. Le méthane gaspillé — qui est le principal composant du gaz naturel — est suffisant pour approvisionner 2 millions de foyers américains.

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Relevés des émissions de méthane effectués par l’instrument TROPOMI dans la zone du Bassin permien. Crédits : Yuzhong Zhang et al. 2020

Le méthane est un puissant gaz à effet de serre, dont les émissions anthropiques provoquent plus du quart du réchauffement actuel. La réduction du méthane provenant des opérations pétrolières et gazières est le moyen le plus rapide et le plus rentable de ralentir le taux de réchauffement, même si la transition nécessaire vers une économie nette zéro en carbone se poursuit.

Les satellites : des outils fiables pour mesurer les émissions de gaz

Les satellites offrent un nouvel outil de mesure du méthane important qui peut couvrir de grandes surfaces plus rapidement et plus fréquemment que les méthodes conventionnelles. Ils peuvent également fournir des données sur les régions productrices de gaz dans le monde qui sont impossibles à atteindre par avion ou depuis le sol.

« Les progrès de la technologie satellitaires et de l’analyse des données permettent de générer des informations régulières et fiables sur les émissions de méthane des opérations pétrolières et gazières, même dans les coins les plus reculés du monde. Notre objectif est d’utiliser ces nouvelles données pour aider les entreprises et les pays à trouver, mesurer et réduire les émissions de méthane plus loin et plus rapidement, et permettre au public de suivre et de comparer les progrès », explique Mark Brownstein.

Lancé en 2017, l’instrument TROPOMI offre des mesures plus précises, une résolution plus élevée et une meilleure couverture que ses prédécesseurs. Il fait partie d’un écosystème émergent de satellites de suivi du méthane avec une gamme croissante de capacités, dont un avec une précision encore plus élevée, actuellement développé par la filiale MethaneSAT LLC pour un lancement prévu en 2022. MethaneSAT suivra le méthane pétrolier et gazier dans le monde entier sur une base quasi hebdomadaire, en identifiant et en mesurant des événements d’émission plus petits et des sources plus largement dispersées non discernables avec la technologie actuelle.

Vers une réduction des émissions de méthane par l’amélioration des conditions d’exploitation

Le bassin permien est devenu l’une des régions productrices de pétrole les plus prolifiques au monde ces dernières années, produisant 3.5 millions de barils de brut et 311 milliards de mètres cubes de gaz naturel par jour (environ 30% et 10% du total américain respectif en 2018). Les nouvelles conclusions valident un ensemble de mesures au sol et aéroportées publiées il y a deux semaines par l’initiative PermianMAP d’EDF, qui a trouvé le méthane s’échappant des opérations pétrolières et gazières dans la partie la plus productive du bassin à un taux de 3.5%.

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Graphiques montrant le taux d’émission (haut) et le taux de fuite (bas) de méthane dans le Bassin permien. Crédits : Yuzhong Zhang et al. 2020

Ce projet recueille actuellement un an de données sur le méthane dans une zone d’étude de 10’000 kilomètres carrés dans le bassin via des avions à voilure fixe, des hélicoptères, des tours et des capteurs mobiles au sol. Les taux de fuite élevés dans le bassin impliquent la possibilité de réduire considérablement les émissions de méthane dans cette vaste région productrice de pétrole et de gaz, grâce à une meilleure conception et développement des infrastructures, des opérations plus efficaces et une meilleure réglementation à la fois au niveau des États et au niveau fédéral.

Les futures opérations satellitaires à l’assaut des émissions de gaz à effet de serre

L’étude TROPOMI utilise les dernières technologies et méthodes disponibles pour analyser et présenter les données, un processus qui prend actuellement beaucoup de temps et d’efforts. Mais les chercheurs apprennent rapidement comment automatiser et accélérer ces calculs complexes. Le projet MethaneSAT, par exemple, devrait fournir des données basées sur des mesures hebdomadaires en temps quasi réel.

« Les premières images TROPOMI ont montré que le Permien était l’un des plus grands points chauds de méthane aux États-Unis. Mais le satellite était nouveau et l’analyse des données n’avait même pas commencé. Quantifier les émissions et calculer un taux de fuite pour une vaste zone était une tâche très importante, même avec les meilleurs outils. les missions qui suivent seront plus performantes, fournissant plus de données beaucoup plus rapidement, de manière plus exploitable par les parties prenantes », conclut Ritesh Gautam d’EDF.

Sources : Science Advances

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