Des chercheurs simulent des voyages temporels pour résoudre des problèmes physiques « impossibles »

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Des physiciens suggèrent dans une nouvelle étude que, par le biais de l’intrication quantique, la simulation de voyages dans le temps pourrait résoudre des problèmes normalement insolubles avec la physique conventionnelle. Les particules intriquées pourraient notamment voyager à travers une boucle spatiotemporelle fermée, de sorte que leurs caractéristiques initiales puissent être modifiées par le biais d’un processus de rétroaction. De cette manière, il serait possible de modifier les résultats présents d’une expérience passée.

La trajectoire unidirectionnelle du temps implique que les joueurs, les investisseurs et les physiciens quantiques, ne peuvent obtenir que des résultats qui ne sont pas nécessairement optimaux. Dans le domaine de la métrologie quantique par exemple, on expérimente des phénomènes afin d’en estimer les paramètres qui sont initialement inconnus. C’est-à-dire que les critères optimaux pour mener à bien une expérience ne sont connus qu’à la fin de celle-ci.

Le moyen de contourner ce problème est de modifier le fil du temps, de sorte à créer des boucles temporelles fermées (CTC). Selon le point du vue des observateurs respectant la chronologie normale, les particules se déplaçant au sein d’une CTC voyagent dans le temps. Cependant, la supposition de l’existence de ces boucles conduit à des paradoxes, dont le paradoxe du grand-père. Par exemple, si un individu X voyageait dans le temps pour assassiner son grand-père avant qu’il n’ait d’enfants, ce dernier n’aurait jamais pu naître. Or, la boucle fermée doit impliquer qu’il puisse rester en vie malgré son voyage temporel — un manque de cohérence qui ne manque pas de susciter le scepticisme chez de nombreux scientifiques.

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Pour résoudre ce problème de cohérence, des chercheurs de l’Université de Cambridge se sont basés sur la théorie des « CTC post-sélectionnés » (PCTC). Il s’agit de circuits quantiques utilisant une post-sélection ou un conditionnement de certains résultats de mesure. Afin de pouvoir effectuer des mesures suffisamment sensibles pour capturer ces conditions et manipuler l’intrication des particules, la théorie a été combinée avec la métrologie quantique.

Les résultats de l’étude, décrite dans la revue Physical Review Letters, suggèrent qu’il est effectivement possible de simuler un voyage temporel de particules. Ce serait une preuve de concept du PCTC, suggérant que dans certains cas, il est possible de modifier rétroactivement les actions passées de sorte à améliorer leurs résultats dans le présent.

Il est important de comprendre qu’il ne s’agit pas de « proposer une machine à voyager dans le temps, mais plutôt une plongée profonde dans les fondamentaux de la mécanique quantique », précise le chercheur principal, David RM Arvidsson-Shukur, affilié au laboratoire de recherche quantique Hitachi de l’Université de Cambridge. « Ces simulations ne vous permettent pas de revenir en arrière et de modifier votre passé, mais elles vous permettent de créer un avenir meilleur en résolvant aujourd’hui les problèmes d’hier », explique-t-il.

Modifier les résultats finaux par le biais d’une boucle de rétroaction

Pour comprendre l’expérience menée par les chercheurs de Cambridge, il faut imaginer une simple analogie : vous devez envoyer un cadeau à quelqu’un, et prévoyez de l’expédier le premier jour pour être sûr qu’il arrive à destination le troisième jour. Cependant, vous ne recevez la liste des souhaits de cette personne que le deuxième jour. Dans ce scénario, si l’on respecte la règle de chronologie classique, il est impossible de connaître ces souhaits à l’avance et de s’assurer d’envoyer le bon présent. Mais, imaginez que vous puissiez modifier votre cadeau envoyé le premier jour en tenant compte des informations obtenues le lendemain.

Les experts démontrent qu’il est possible de transposer ce scénario de rétroaction aux particules, en manipulant l’intrication quantique. L’intrication quantique se traduit par l’existence d’un lien invisible entre deux particules émises en même temps, quelle que soit la distance qui les sépare. Cela implique que si l’état de l’une est modifié, celui de sa jumelle change instantanément.

Dans le cadre de la nouvelle étude, deux particules ont été enchevêtrées et l’une d’entre elles a ensuite été envoyée pour être utilisée dans une expérience. Après avoir obtenu de nouvelles informations, la deuxième est manipulée de sorte que l’état passé de la première soit modifié. De cette manière, le résultat final de l’expérience est également modifié.

En appliquant la métrologie quantique au modèle, des photons sont projetés vers un échantillon spécifique et leur déplacement est capturé avec une caméra. Les caractéristiques des photons ont été manipulées avant qu’ils atteignent leur cible. Les chercheurs ont constaté que, même s’ils pouvaient déterminer les conditions optimales nécessaires aux photons pour atteindre l’échantillon, ils pouvaient utiliser des simulations de PCTC pour modifier rétroactivement leurs caractéristiques d’origine.

Cependant, « l’effet est remarquable, mais cela n’arrive qu’une fois sur quatre ! », indique Arvidsson-Shukur. Entre autres, la simulation a 75% de risques d’échouer et d’aboutir à un résultat incorrect. Si l’on revient à l’analogie du cadeau, une fois sur quatre, ce dernier serait non désiré (par exemple un pantalon au lieu d’une veste). Une autre fois, il pourrait s’agir d’un pantalon, mais de la mauvaise taille ou de la mauvaise couleur, etc.

Afin de pallier le risque élevé d’échec, les chercheurs proposent d’envoyer un grand nombre de photons au sein de la PCTC, sachant que certains d’entre eux finiraient bien par transporter les informations correctes et mises à jour. Ensuite, un filtre pourrait être utilisé pour trier les bons photons et rejeter ceux invalides. En appliquant cette hypothèse à l’analogie des cadeaux, cela consisterait à envoyer de nombreux colis dès le premier jour tandis que les instructions concernant le cadeau approprié ne sont reçues que le lendemain. Grâce au filtre, étant donné qu’au moins 1 cadeau sur 4 serait le bon par exemple, on pourrait faire le tri de sorte à déterminer ceux à éliminer parmi les premières livraisons.

« Le fait que nous ayons besoin d’utiliser un filtre pour faire fonctionner notre expérience est en fait plutôt rassurant », a déclaré Arvidsson-Shukur. « Le monde serait très étrange si notre simulation de voyage dans le temps fonctionnait à chaque fois. La relativité et toutes les théories sur lesquelles nous construisons notre compréhension de notre univers seraient abandonnées », conclut-il.

Source : Physical Review Letters

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