Nul n’est sans savoir que des horaires de sommeil irréguliers peuvent affecter notre humeur, voire notre santé. Dès lors, classifier les différents types de sommeil — influencés par des facteurs génétiques comme environnementaux — pourrait permettre de mieux diagnostiquer l’insomnie et les problèmes de santé qui en dépendent. Basée sur les données de bracelets intelligents, une étude a consisté à analyser le sommeil de plus de 100 000 personnes au Royaume-Uni, pour en révéler 16 phénotypes.
Le sommeil est un phénomène physiologique génétiquement conservé au sein des espèces dont les humains font partie. Cependant, en fonction de facteurs environnementaux tels que les modes de vie modernes, la structure du sommeil peut changer de façon transitoire ou chronique. Ainsi, la façon dont nous travaillons s’est diversifiée, le travail posté et d’autres types d’horaires de travail étant devenus plus populaires. Cette diversification des horaires de sommeil peut toutefois présenter des répercussions sur notre santé.
« Les divers phénotypes de sommeil ne sont pas indépendants des risques de mortalité liés aux maladies chroniques telles que les maladies cardiovasculaires, le syndrome métabolique et le diabète, bien que les relations complexes entre eux restent mal comprises », écrivent les chercheurs de la nouvelle étude. « Environ 20% de la population générale présente des symptômes d’insomnie trois nuits ou plus par semaine, dont la moitié environ a des conséquences diurnes et répond aux critères d’un diagnostic d’insomnie ».
Certains phénotypes du sommeil sont difficiles à évaluer sans une surveillance précise et à long terme du sommeil. Pour résoudre ce problème, les chercheurs se sont basés sur les données de bracelets intelligents utilisés par la United Kingdom Biobank pour surveiller les habitudes de sommeil et d’éveil d’environ 100 000 personnes. Les mouvements et les secousses du bras des participants ont été mesurés pendant six jours.
16 phénotypes de sommeil, classés en cinq grandes catégories
Baptisé ACCEL (classification et estimation des cycles veille-sommeil à long terme basées sur l’accélération), un algorithme optimisé a permis d’identifier 16 phénotypes de sommeil, regroupés en cinq catégories (1 à 5). Les personnes appartenant à la première catégorie souffrent généralement d’insomnie, avec une longue durée de sommeil et un réveil au milieu de la nuit. Appartenant à la cinquième catégorie, les personnes les plus chanceuses dorment toute la nuit, sans faire de sieste en journée.
Les catégories 2, 3 et 4 présentent des sous-divisions « a » et « b ». Le groupe 2a regroupe les personnes qui ont des horaires de sommeil irréguliers : le début du sommeil est retardé pendant quelques jours par rapport à d’autres jours. « Ces horaires de sommeil retardés sont observés chez les travailleurs de nuit en rotation ou fixes, comme un retard de l’endormissement d’environ 7 heures les jours de travail de nuit par rapport aux jours de travail en journée, ce qui suggère que le groupe 2a pourrait refléter le mode de vie des travailleurs de nuit qui travaillent 1 ou 2 jours par semaine », rapportent les auteurs de l’étude. Ainsi, la détection quantitative de l’éveil moyen et du sommeil diurne peut être importante pour la santé des travailleurs postés.
Le groupe 2b est défini par les auteurs comme un « sommeil fragmenté avec une courte durée de sommeil » en général. 3a est un groupe de personnes qui souffrent d’insomnie avec une durée de sommeil normale, et 4a comprend les personnes qui souffrent d’insomnie avec une courte durée de sommeil.
De plus, les groupes 3b et 4b sont encore divisés pour former huit sous-catégories de sommeil discontinu. 3b-1 comprend les personnes qui dorment profondément, mais qui, une fois réveillées, ne peuvent pas s’endormir facilement ; 3b-2 comprend les « petits dormeurs » qui présentent des réveils courts et parfois plus longs durant la nuit.
4b-1 est un grand groupe qui comprend les « grands dormeurs », 4b-2 regroupe toutes les personnes du matin et 4b-6 toutes les personnes du soir. 4b-4 et 4b-5 sont des sous-groupes définis par les chercheurs comme des « préinsomnies » : des durées de réveil normales au milieu de la nuit, mais les personnes du groupe 4b-4 se réveillent et s’endorment de manière fréquente, là où celles du groupe 4b-5 présentent un sommeil moins fragmenté dans son ensemble.
Des analyses encore très incomplètes
L’évaluation des cycles sommeil/éveil ayant duré seulement six jours, les chercheurs regrettent qu’elle n’ait pas été plus longue, de deux semaines par exemple. Si le groupe 2a représente environ 0,47 % de l’ensemble des données, les travailleurs postés représentent environ 16% de la population active, « ce qui peut être dû au fait que l’ensemble de données utilisé dans cette étude a été obtenu sur une période trop courte pour identifier le travail en équipe lorsque les postes ne sont pas très fréquents ».
Ces analyses incomplètes pour le moment devront se poursuivre pour avancer la recherche biomédicale sur les facteurs génétiques et environnementaux qui sous-tendent les habitudes de sommeil humain. Elles pourraient notamment aider à identifier les personnes souffrant d’insomnie et à révéler celles qui risquent le plus de développer des problèmes de santé mentale ou physique.