Une vague de matière noire serait en train de déferler sur le Système solaire

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| C. O'Hare; NASA/Jon Lomberg
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Représentant environ 27% de la densité d’énergie de l’Univers, la matière noire est une matière hypothétique intégrée au modèle standard cosmologique, permettant d’expliquer les courbes de rotation galactique et la formation des grandes structures cosmiques. En dehors des halos de galaxies et des filaments inter-amas, la matière noire peut également se déplacer au sein de véritables vagues de matière noire. Et selon les astrophysiciens, l’une de ces vagues serait en train de déferler sur le Système solaire à environ 500 km/s.

Introduite dès 1933 par l’astrophysicien suisse Fritz Zwicky, puis confortée dans les années 1970 par l’astrophysicienne américaine Vera Rubin, la matière noire est depuis lors intégrée au modèle standard de la cosmologie — le modèle Λ-CDM (pour cold dark matter ou matière noire froide) — pour expliquer certaines observations, comme la courbe de rotation des galaxies ou les fluctuations du fond diffus cosmologique. Elle offre également une explication à la formation des grandes structures de l’Univers et au maintient de leur intégrité.

Bien que jamais encore détectée directement, les indices de l’existence de la matière noire sont multiples. Les derniers relevés des missions WMAP et Planck concordent avec l’existence d’une masse manquante. De même que les études de galaxies par les effets de lentilles gravitationnelles qu’elles provoquent ; dans ce cas, la masse visible de la galaxie ne permet pas à elle seule de justifier la lentille gravitationnelle produite.

Une invitation à rêver, prête à être portée.

Un courant stellaire à la trajectoire inhabituelle

Comment, alors, les astrophysiciens savent-ils qu’une tempête de matière noire est en train de s’abattre sur le Système solaire ? La réponse se trouve dans le mouvement des étoiles. En analysant les données de la mission Gaia publiées l’année dernière, les chercheurs ont découvert plusieurs courants stellaires autour de la Voie lactée. Un courant stellaire est un groupement d’étoiles orbitant une galaxie et provenant de la destruction d’une ancienne galaxie naine.

Sur le même sujet : Les flux stellaires révèlent l’histoire chaotique de la Voie lactée, et peut-être la présence de matière noire

courant stellaire s1 galaxie
Graphique montrant le courant stellaire S1 dans le plan galactique. La sphère grise représente le bulbe galactique. Les flèches grises représentent les vitesses des étoiles de S1. Le Soleil et son mouvement sont représentés par une étoile et une flèche magenta. Crédits : Ciaran A. J. O’Hare et al. 2018

La Voie lactée a notamment déchiqueté une galaxie naine sphéroïdale (galaxie naine dont les étoiles prennent une distribution spatiale sphérique) dont les étoiles restantes — environ 30’000 — ont formé un courant stellaire appelé S1. Ce dernier est cependant très particulier, car sa trajectoire passe à proximité du Système solaire. Même s’il n’existe absolument aucun risque de collision, une telle trajectoire inhabituelle révèle cependant que de la matière noire se déplace avec S1, selon l’étude publiée dans la revue Physical Review D.

distribution etoile soleil s1
La distribution des étoiles du courant stellaire S1 projetées dans le plan galactique. Les flèches bleues indiquent la vitesse des étoiles de S1, tandis que la flèche jaune indique la vitesse du Soleil ; la position du Soleil est quant à elle indiquée par la croix grise. Crédits : Ciaran A. J. O’Hare et al. 2018

Le physicien théoricien Ciaran O’Hare de l’Université de Saragosse en Espagne, a tenté de comprendre l’effet de S1 sur la matière noire lors de son passage au voisinage du Système solaire. Ses collègues et lui ont examiné différents modèles de densité et de distribution de la matière noire accompagnant le courant stellaire, puis ont prédit les signatures de la matière noire pouvant être détectées par les instruments terrestres.

Détecter les particules de matière noire depuis la Terre

L’une de ces signatures potentielles provient de particules hypothétiques appelées WIMP (Weakly Interacting Massive Particles, « particules massives interagissant faiblement »). Ces particules candidates à la matière noire n’interagissent que très faiblement avec la matière ordinaire et possèdent une masse de l’ordre de celle du noyau atomique.

Si les WIMPs existent, alors elles devraient être détectables via leurs collisions avec des électrons ou des noyaux atomiques, provoquant un recul des particules chargées et produisant une lumière pouvant être captée par des détecteurs à xénon liquide ou à cristaux. Sur la base de leurs calculs, les chercheurs ont déterminé qu’il était peu probable que ces instruments puissent détecter les hypothétiques WIMPs constituant S1.

Les détecteurs d’axions — tels que ceux de l’expérience Axion Dark Matter Experiment — ont, eux, plus de chances de les détecter. Tout comme les WIMPs, les axions sont également hypothétiques. S’ils existent, ils sont incroyablement légers, environ 500 millions de fois plus légers qu’un électron. Les axions, introduits en 1977 par les physiciens Roberto Peccei et Helen Quinn, sont une solution au problème de la violation CP, et constituent des candidats à la matière noire.

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L’holoscope à axions situé à l’université de Washington, dans le cadre de l’expérience Axion Dark Matter Experiment. Crédits : Lamestlamer

Selon les calculs du physicien théoricien Pierre Sikivie, expert en cosmologie des axions à l’université de Floride et inventeur de l’haloscope à axions, ces particules ultra-légères pourraient être converties en photons en présence d’un fort champ magnétique. Cette conversion axion-photon se déroulerait au cours de l’effet Primakoff, qui décrit la production résonnante de mésons neutres par l’interaction de photons hautement énergétiques avec le noyau atomique.

« Les haloscopes à axions possèdent de loin le plus grand potentiel de sensibilité au flux S1 si sa composante de matière noire est suffisamment froide » expliquent les chercheurs. « Une fois que la masse des axions est isolée, la distribution de vitesse distincte de S1 peut facilement être extraite du spectre de puissance des axions ».

Source : Physical Review D

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