Voyager 1 transmet des données incohérentes : l’heure de la retraite a-t-elle sonné ?

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Illustration de la sonde Voyager 1 dans l'espace interstellaire. | NASA/JPL-Caltech
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Avec plus de 45 ans de loyaux services, les sondes spatiales jumelles Voyager 1 et 2 seraient en fin de vie. D’après les estimations de la NASA, elles seront à court d’énergie vers 2025. Cependant, elles sont allées largement au-delà des estimations initiales quant à leur durée de vie. Pour accomplir cet exploit de longévité, les équipes de la NASA les ont notamment adaptées pour qu’elles puissent se focaliser sur les tâches prioritaires et continuer à renvoyer des données sur Terre. Mais les dernières données reçues de Voyager 1 semblent présenter des incohérences, le signe qu’il serait peut-être temps de leur dire au revoir. Les deux sondes laisseront derrière elles l’héritage inestimable de plusieurs décennies de données interstellaires, et marqueront à jamais l’histoire de l’exploration spatiale.

Actuellement, Voyager 1 et 2 se trouvent respectivement à 23,3 milliards et 19,5 milliards de kilomètres de la Terre. S’il faut près de 20 heures et demie à la lumière pour parcourir ces distances, il faut environ deux jours pour envoyer un message à Voyager 1 (ou obtenir une réponse radio de la sonde). Depuis son lancement en 1977, cette dernière a en effet parcouru plus de distance qu’aucun autre engin spatial.

Aujourd’hui âgées de 45 ans, les sondes jumelles continuent de fonctionner, mais les équipes de la NASA ont détecté des problèmes majeurs concernant Voyager 1, qui marqueraient peut-être ses limites fonctionnelles. Elle reçoit et exécute encore des commandes envoyées depuis la Terre et collecte et envoie des données scientifiques, mais étrangement, les analyses du système d’articulation et de contrôle d’attitude (AACS) ne reflètent pas ce qui se passe réellement à bord.

Une invitation à rêver, prête à être portée.

L’AACS contrôle en effet l’orientation de la sonde et maintient sa grande antenne radio pointée vers la Terre, pour que l’on puisse recevoir les données qu’elle envoie. Bien que l’AACS semble fonctionner normalement, les données télémétriques qu’il transmet ne sont pas valides, et peuvent sembler être générées de manière aléatoire ou ne refléter aucun état possible dans lequel l’AACS pourrait se trouver.

Avec ce genre de défaillance technique, la sonde aurait dû se mettre en « mode sans échec », et pourtant aucun système de protection ne s’est déclenché. De plus, le signal émis par Voyager 1 ne s’est pas affaibli, indiquant que l’antenne est toujours orientée vers la Terre.

« Un mystère comme celui-ci est en quelque sorte normal à ce stade de la mission Voyager », explique dans un communiqué Suzanne Dodd, chef de projet pour Voyager 1 et 2 au Jet Propulsion Laboratory de la NASA. Selon l’experte, les deux sondes sont allées tellement loin, bien plus loin que ce qui était initialement prévu. Sans compter que l’espace interstellaire est un environnement extrême à haut rayonnement, dans lequel aucun autre vaisseau ne s’est jamais aventuré. Un environnement très éprouvant pour les vieilles sondes.

Adaptations de secours

Chacune des sondes perdrait environ quatre watts de puissance électrique par an, ce qui limite au fil du temps le nombre d’appareils qu’elles peuvent faire fonctionner. Les ingénieurs de la NASA doivent alors sélectionner de temps à autre des dispositifs « à sacrifier », tels que les systèmes de chauffage, afin de garder suffisamment d’énergie pour les collecteurs de données.

Si les équipes de recherche n’identifient pas la source de l’anomalie, elles devront s’adapter en modifiant par exemple les logiciels ou en utilisant d’autres dispositifs à bord. Ce ne serait notamment pas la première fois que la NASA doive s’appuyer sur du matériel de secours. Par ailleurs, aucun dispositif scientifique n’a encore été éteint jusqu’ici pour des économies d’énergie, et les équipes d’ingénieurs tenteront de maintenir les sondes actives au-delà de 2025.

Jusqu’où ira Voyager 1 ?

Depuis son lancement en 1977, Voyager 1 a traversé la ceinture de Kuiper et les anneaux de glace de Saturne. Aujourd’hui, elle se situe largement au-delà de Pluton et atteindra peut-être bientôt le nuage d’Oort (un amas diffus de débris météoritiques entourant le système solaire).

Ce qu’il faut savoir, c’est que nous ne connaissons pas encore les véritables limites du système solaire. En plus de la lumière qu’il émet, le Soleil possède en effet une héliosphère, une sorte de bulle géante gonflée par des vents solaires chargés de milliards de particules. La taille réelle de l’héliosphère est encore inconnue, mais Voyager 1 aurait enregistré en 2004 des signaux qui pourraient peut-être indiquer le franchissement de sa « limite ».

Les vents solaires devaient apparemment ralentir brusquement quand elles atteignent les limites de la bulle héliosphérique, signe que la sonde a pu détecter. Sa jumelle Voyager 2 aurait détecté les mêmes signaux en 2007. Par ailleurs, Voyager 1 a enregistré, l’année dernière, une augmentation du taux de rayons cosmiques provenant de l’espace interstellaire, suggérant que l’influence du champ magnétique du Soleil diminue. Toutefois, Voyager 1 ne franchira vraiment l’héliosphère qu’une fois qu’elle aura senti les lignes de son champ magnétique basculer.

Une fois l’héliosphère franchie, Voyager 1 atteindra le nuage d’Oort, à moins qu’elle ne soit à court d’énergie avant d’y parvenir. Cette structure cosmique joue en effet un rôle dans la taille de l’héliosphère en la comprimant juste assez pour que la Terre ne se retrouve pas à l’extérieur de la bulle protectrice (une situation qui ne serait pas propice à la vie).

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