Contrôler ses rêves, ce n’est pas donné à tout le monde. Certains y parviennent à un certain degré, avec de l’entraînement (rêves lucides), dès qu’ils tombent dans les bras de Morphée, d’autres demeurent complètement « spectateurs » de leurs aventures rocambolesques. Et si l’on vous donnait le moyen de prendre réellement la main sur vos rêves ? C’est en tout cas ce que proposent des chercheurs du MIT, qui travaillent actuellement sur un appareil capable d’interagir avec les rêves…
Des scientifiques du Dream Lab du MIT ont en effet conçu un appareil portable open source, qui permet de suivre les cycles du sommeil et d’interagir avec les rêves de différentes manières. Il pourrait même offrir la possibilité de contrôler le contenu de nos rêves ! Un voyage merveilleux en perspective… L’objectif de l’équipe est simplement de prouver que les rêves ne sont pas anodins, ne sont pas complètement dénués de sens. Ils pourraient ainsi être influencés, augmentés et hackés pour notre plus grand plaisir.
Influencer le subconscient par stimulus sonore
Dans le cadre de ce projet, digne du scénario d’Inception, il est également question de profiter de ce temps de rêve pour améliorer ses fonctions cognitives : « Les gens ne savent pas qu’un tiers de leur vie pourrait être utilisé pour changer, se structurer ou s’améliorer », a déclaré Adam Horowitz, chercheur au Dream Lab. Parmi ces « améliorations », le scientifique évoque l’augmentation de la mémoire, le développement de la créativité, une meilleure humeur, voire une amélioration des capacités intellectuelles la veille d’un examen. Edison, Tesla, Poe et Dalí auraient d’ailleurs chacun accédé à cet état de semi-conscience pour y piocher des idées innovantes…
L’appareil en question, baptisé Dormio, se présente sous la forme d’un gant, équipé d’une multitude de capteurs. Ces derniers recueillent des données au niveau de la main, sur la perte de tonus musculaire, les changements de fréquence cardiaque et les changements de conductance cutanée. Lorsque ces signaux indiquent que la personne sombre dans le sommeil, plus précisément dans un état hypnagogique – un état de conscience intermédiaire entre éveil et sommeil qui intervient pendant la phase d’endormissement – le gant joue un signal audio préenregistré, qui répète un même mot-clé.
Par exemple, lors d’une expérience, l’équipe est parvenue à intégrer un tigre dans le rêve d’une cinquantaine de personnes équipées du gant ; celui-ci répétant « tigre » en guise de message pré-enregistré. Toujours dans ce même état hypnagogique, l’équipe enregistre les conversations entre les utilisateurs et un robot social, Jibo, destiné à conserver une trace du contenu du rêve – car l’amnésie hypnagogique est fréquente.
Les différentes phases du sommeil
Notre rythme de sommeil est parfaitement bien régulé par le cerveau, grâce à notre horloge circadienne située dans l’hypothalamus. Que l’on ait besoin de peu ou de beaucoup d’heures de sommeil, celui-ci est toujours divisé en plusieurs cycles, chacun comportant plusieurs phases :
- le stade N1 est un stade de transition entre l’éveil et le sommeil ; en d’autres termes, on somnole, c’est l’entrée dans l’inconscience. C’est là que se situe l’état hypnagogique dans lequel agit le gant Dormio. Et c’est une phase particulièrement propice à différents troubles sensoriels (tels que des hallucinations visuelles ou auditives) ;
- le stade N2 est le moment où l’on se trouve réellement dans le sommeil ;
- le stade N3 est ce que l’on appelle le « sommeil profond » et il est généralement difficile de réveiller une personne qui se trouve dans cet état ;
- le stade R, communément appelé « sommeil paradoxal » : dans cet état, l’activité cérébrale est particulièrement intense, proche de celle de l’éveil ; le corps lui, est complètement inerte, mis à part des mouvements oculaires très rapides (REM).
Une nuit comporte en moyenne 4 à 6 cycles de 90 minutes environ chez un adulte en bonne santé.
Exploiter pleinement notre inconscient
Les scientifiques ambitionnent de donner aux dormeurs la possibilité de prendre pleinement contrôle de leurs rêves, autrement dit, d’être « conscients » qu’ils sont en train de rêver. Un objectif que l’équipe du Dream Lab désigne par le « rêve lucide ». Mais emmener les gens vers le rêve lucide demeure très complexe. Seul 1% de la population serait capable d’entrer régulièrement dans cet état de contrôle et le fonctionnement du cerveau dans cet état particulier n’est pas encore complètement élucidé.
Sur le même sujet : L’odeur d’une rose durant le sommeil améliorerait l’apprentissage
Pourtant, certains spécialistes estiment qu’au lieu de contrôler nos rêves, nous pourrions largement tirer profit de notre inconscient si nous parvenions à en percer les mystères. « L’inconscient, c’est un autre type d’intelligence », déclare Rubin Naiman, spécialiste du sommeil et des rêves à l’Université de l’Arizona. « Nous pouvons en tirer des leçons. Nous pouvons dialoguer avec lui plutôt que de le dominer, de nous appuyer sur lui et d’essayer de le diriger dans les directions que nous souhaitons ».
En attendant, les chercheurs du Dream Lab ont vraiment à cœur de démocratiser la science du sommeil. Ainsi, comme précisé plus haut, l’appareil est régi par une licence open source. Autrement dit, quiconque veut s’essayer à sa fabrication dispose des instructions étape par étape ; le logiciel de suivi des biosignaux est également disponible sur Github.
Un appareil similaire au Dormio a été conçu par une autre chercheuse du Dream Lab, Judith Amores. Elle a toutefois opté pour un stimulus olfactif plutôt que sonore et se focalise sur une autre phase du sommeil, le stade N3 ou sommeil profond, considéré comme une phase de régénération. Le corps se répare et la mémoire se consolide. Dès que l’utilisateur parvient à ce stade, un parfum prédéfini est libéré de l’appareil afin de renforcer le processus.