L’âge de l’Univers remis en question par un amas globulaire apparemment âgé de 13,8 milliards d’années

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M92 serait âgé de 13,8 milliards d'années, un âge proche de celui de l'Univers. | ESA/Hubble et NASA
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Évaluer l’âge d’amas d’étoiles globulaires tels que M92 pourrait peut-être mettre fin à un débat cosmique de longue date : celui de l’âge de l’Univers. Une analyse suggère que cet amas — situé dans notre galaxie — a entre 13,1 et 14,5 milliards d’années, un âge étonnamment proche de celui estimé pour l’Univers, remettant ainsi en question son âge réel.

Les amas globulaires sont des amas stellaires très denses, pouvant contenir une centaine de milliers d’étoiles concentrées dans un diamètre allant d’une vingtaine à quelques centaines d’années-lumière. L’on dénombre environ 150 amas globulaires dans notre galaxie, orbitant autour de son centre. Ces amas habiteraient certaines des étoiles les plus âgées de la Voie lactée. La rareté des éléments constituant ces étoiles (des géantes rouges) indique qu’elles se sont formées peu après le Big Bang et constituent ainsi des éléments d’étude essentiels pour comprendre l’évolution de l’Univers.

Pour évaluer l’âge des étoiles ou des amas, les astronomes se basent généralement sur plusieurs méthodes. L’une d’entre elles consiste à s’appuyer sur les différences de masse. Les étoiles les plus massives consomment plus rapidement leur hydrogène et se mettent à gonfler puis à exploser, tandis que les moins massives ont une durée de vie beaucoup plus étendue. Cependant, le moment exact où se produit chaque étape du cycle de vie d’une étoile constitue une énigme bien plus complexe.

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Une méthode d’évaluation plus précise

Pour mesurer plus précisément l’âge des étoiles ou des amas, les astronomes se basent sur le diagramme d’Hertzsprung-Russell, qui consiste à retracer leur température en fonction de leur luminosité. Les courbes obtenues indiquent la chronologie des étapes du cycle de vie de chaque étoile. Déterminer le nombre d’étoiles ayant vieilli en même temps au sein d’un amas peut donner une idée de la date de naissance de l’ensemble. Grâce à ce diagramme, les astronomes ont pu découvrir que les étoiles d’un amas globulaire ont toutes approximativement le même âge.

Cependant, cette méthode manque de précision et ne peut aisément s’appliquer qu’aux amas globulaires ou aux étoiles isolées. Des astronomes du Dartmouth College suggèrent désormais des méthodes de mesure plus précises pour définir l’âge de M92, notamment en tenant compte de la fameuse constante de Hubble — le taux d’expansion de l’Univers. Leurs résultats indiquent un âge à la limite de celui estimé pour l’Univers.

« Cela nous aide à fixer la limite inférieure de l’âge de l’Univers. Nous ne nous attendons pas à ce que M92 soit né avant l’Univers », indique le chercheur de Dartmouth et auteur principal de l’étude, Martin Ying. Son collègue, Mike Boylan-Kolchin de l’Université du Texas à Austin, ajoute : « Si l’on prend la constante de Hubble au sérieux, alors il faut aussi dire que nous ne connaissons pas très bien l’âge de l’Univers ».

Un âge (trop) proche de celui de l’Univers ?

D’après des découvertes datant des années 1990, l’Univers s’étend selon une vitesse croissante — une accélération induite par l’énergie noire. Mais les récentes mesures de ce taux d’expansion (la constante de Hubble) indiquent des chiffres contradictoires. Certains experts estiment même que cette expansion pourrait n’être qu’une illusion. Selon Ying et ses collègues, la seule façon d’établir définitivement cette constante serait d’accepter que l’Univers puisse avoir un âge différent de celui précédemment estimé.

« La tension de Hubble elle-même est un problème vraiment difficile à résoudre. Cette mesure seule n’est pas assez précise pour trancher le débat. Mais plus nous avons de types de contraintes, mieux c’est », explique une experte extérieure commentant l’étude, Wendy Freedman de l’Université de Chicago.

À savoir qu’avant les mesures basées sur la première lumière émise après le Big Bang, les âges des amas globulaires étaient les meilleurs moyens d’évaluer celui de l’Univers. Toutefois, cette méthode a été laissée de côté depuis un moment. Néanmoins, les avancées en matière de modélisation informatique peuvent désormais conférer plus de précision à cette méthode.

Les chercheurs de la nouvelle étude réinventent la méthode dans ce sens, en évaluant l’âge de M92, un amas globulaire orbitant autour du centre de notre galaxie et distant d’environ 27 000 années-lumière de la Terre. Pour ce faire, un ensemble de 20 000 populations stellaires de différents âges de cluster a été modélisé.

En effet, l’âge de cet amas a déjà été estimé antérieurement. Mais la plupart des calculs étaient basés sur une modélisation unique de population d’étoiles et utilisaient des techniques d’évaluation relativement indépendantes de leur distance et de leur « décalage vers le rouge ». Dans le cadre de la nouvelle étude, en prépublication sur arXiv, les chercheurs ont modélisé des ensembles tenant compte d’une large gamme de paramètres physiques, tels que l’opacité, le taux de réaction nucléaire, l’abondance d’hélium et les mouvements de convection. En outre, les variations de distance et de décalage vers le rouge, ainsi que la métallicité globale (la fraction de la masse qui n’est pas constituée d’hydrogène ou d’hélium) ont également été pris en compte.

Le nouveau protocole aurait permis de réduire le taux d’erreur d’estimation à environ 50%. Les résultats obtenus avec les modélisations ont ensuite été comparés avec ceux des observations de l’amas, effectuées par le télescope spatial Hubble. Le croisement des deux ensembles de données a permis aux chercheurs d’estimer que M92 est âgé de 13,8 milliards d’années, plus ou moins 750 millions d’années. Cette incertitude de 5,4% serait due à celle liée à la distance réelle de l’amas, ainsi qu’à d’autres paramètres non intégrés.

D’une manière à la fois étonnante et plutôt contre-intuitive, cette estimation est (trop) proche de celle de l’âge présumé de l’Univers, qui est de 13,8 milliards plus ou moins 24 millions d’années (selon les dernières mesures du télescope spatial Planck). Ces nouvelles données suggèrent donc le besoin d’une réévaluation complète de l’âge véritable de notre univers.

Source : arXiv

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