Une batterie révolutionnaire alimentée par des déchets nucléaires mise au point aux États-Unis

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Alors que la transition énergétique impose d’explorer des alternatives aux combustibles fossiles, l’énergie nucléaire apparaît comme une solution décarbonée. Toutefois, la gestion des déchets radioactifs demeure un défi de taille. Une équipe de chercheurs américains propose une approche innovante : exploiter le rayonnement gamma de ces résidus pour alimenter une batterie. Leurs travaux, publiés dans la revue Optical Materials : X, pourraient déboucher sur des applications intéressantes, notamment pour l’alimentation de microcapteurs en milieux extrêmes.

Face à l’aggravation de la crise climatique, les scientifiques multiplient les mises en garde. Récemment, des chercheurs ont notamment mis en évidence une diminution annuelle de 0,25 % de la capacité des écosystèmes à absorber le CO₂, réduisant ainsi leur rôle de régulateurs naturels et accentuant le réchauffement global.

Par ailleurs, une analyse fondée sur l’intelligence artificielle suggère que le réchauffement climatique progresse à un rythme plus rapide que prévu. L’activité humaine, en particulier l’usage massif des combustibles fossiles, est directement pointée du doigt. Ces derniers sont responsables de 75 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre et contribuent à hauteur de 90 % aux rejets de dioxyde de carbone dans l’atmosphère.

L’énergie nucléaire représente aujourd’hui environ 10 % de la production mondiale d’électricité et près de 20 % du mix énergétique américain. Elle permet de limiter les émissions de gaz à effet de serre, mais engendre des déchets radioactifs dont la gestion reste un défi majeur. Actuellement, ces déchets sont stockés dans des piscines de refroidissement ou dans des sites d’enfouissement spécialisés. Depuis peu, des chercheurs s’emploient à trouver un moyen d’exploiter leur potentiel énergétique résiduel.

Dans cette optique, une équipe de l’Université d’État de l’Ohio, sous la direction de Raymond Cao, ingénieur nucléaire et directeur du laboratoire des réacteurs nucléaires de l’établissement, a mis au point une batterie miniature capable de convertir les radiations gamma (issues des déchets nucléaires) en électricité. « Nous récoltons quelque chose considéré comme un déchet et nous tentons d’en faire une ressource », explique Cao dans un communiqué.

Un principe de fonctionnement reposant sur les cristaux scintillateurs et le rayonnement gamma

Le dispositif mis au point par les chercheurs repose sur des cristaux scintillateurs, des matériaux capables d’absorber le rayonnement gamma et de le transformer en lumière. Cette lumière est ensuite captée par des cellules photovoltaïques, qui la convertissent en électricité.

Si le prototype actuel ne permet pas encore d’alimenter un réseau électrique, il génère néanmoins plusieurs centaines de nanowatts, atteignant jusqu’à 1,5 microwatt selon la nature du matériau radioactif utilisé. L’équipe de Cao a testé la batterie avec deux isotopes : le césium 137, sous-produit fréquent de la fission nucléaire, et le cobalt 60, utilisé notamment en radiothérapie. Si le premier n’a produit que 288 nanowatts, le second a permis d’atteindre 1,5 microwatt, soit une puissance suffisante pour faire fonctionner de petits capteurs.

Bien que ces performances restent modestes, cette technologie pourrait trouver des applications concrètes, en particulier dans les environnements où sont stockés des déchets nucléaires. De telles batteries miniatures pourraient ainsi assurer une alimentation durable aux capteurs chargés de surveiller les installations de stockage ou les sites d’enfouissement, réduisant ainsi les interventions humaines dans ces zones à risque.

« Ces résultats marquent une avancée très prometteuse en matière de puissance de sortie », souligne Ibrahim Oksuz, ingénieur en aérospatiale à l’Université d’État de l’Ohio et co-auteur de l’étude. « Ce processus en deux étapes est encore à ses débuts, mais la prochaine étape consiste à générer davantage de watts grâce à des constructions à grande échelle », ajoute-t-il avec enthousiasme.

Les chercheurs ont également étudié l’impact de la structure des cristaux scintillateurs sur l’efficacité du système. Ils avancent que des cristaux plus volumineux pourraient capter davantage de rayonnement et produire plus de lumière, augmentant ainsi la quantité d’énergie récupérable. Par ailleurs, l’optimisation des cellules photovoltaïques permettrait d’améliorer leur capacité à convertir la lumière émise en électricité.

Vers une nouvelle génération de batteries nucléaires ?

L’idée de recycler les déchets radioactifs en source d’énergie n’est pas nouvelle. En 2020, des physiciens de l’Université de Bristol avaient déjà tenté de transformer les isotopes de carbone 14 contenus dans des blocs de graphite usagés en batteries au diamant de longue durée. Une innovation qui, en plus de produire de l’énergie, réduisait la radioactivité résiduelle du matériau, facilitant ainsi son élimination.

Si la batterie développée par l’équipe de Cao reste à un stade expérimental, elle illustre néanmoins le potentiel d’une réutilisation intelligente des déchets nucléaires. « Il y a encore beaucoup de progrès à faire, mais je crois qu’à l’avenir, cette approche se taillera une place importante dans l’industrie de la production d’énergie et des capteurs », conclut Oksuz.

Source : Optical Materials : X

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