Comment le sucre agit-il sur le cerveau ? Comment nous rend-il accros ?

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Comme dans beaucoup de situations, une trop grande quantité d’une substance peut vite devenir néfaste, et le sucre n’échappe pas à cette règle. Le glucose est l’élément énergétique de base alimentant les cellules du corps, c’est une ressource vitale pour tout organisme. Cependant, pour qu’elle ne devienne pas problématique, la glycémie doit être correctement régulée et faire l’objet d’un régime équilibré. Car trop de sucre dans l’alimentation peut rapidement conduire à l’obésité, le diabète de type 2 ou encore une dégradation dentaire. Pourtant, le cerveau semble continuellement demander du sucre, et les neurobiologistes savent aujourd’hui pour quelles raisons.

Sur une base évolutive, nos ancêtres primitifs étaient des charognards. Les aliments sucrés sont d’excellentes sources d’énergie, nous avons donc évolué pour trouver des aliments sucrés particulièrement agréables.

Les aliments aux goûts désagréables, amers et aigres peuvent être non mûrs, toxiques ou pourris — causant des maladies. Donc, pour maximiser notre survie en tant qu’espèce, nous avons un système cérébral inné qui nous fait particulièrement apprécier les aliments sucrés, car ils sont une excellente source d’énergie pour alimenter notre corps.

La dopamine associée à la consommation de sucre

Lorsque nous consommons des aliments sucrés, le système de récompense du cerveau — appelé système de dopamine mésolimbique — est activé. La dopamine est une substance chimique du cerveau libérée par les neurones et peut signaler qu’un événement est positif. Lorsque le système de récompense se déclenche, il renforce les comportements — ce qui nous rend plus susceptibles de recommencer ces actions.

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Lorsque du sucre est consommé, le cerveau libère de la dopamine, un neurotransmetteur qui va actionner les neurones dopaminergiques et activer la sensation de plaisir (circuit de la récompense). Crédits : Shutterstock

Les « pics » de dopamine provenant de la consommation de sucre favorisent un apprentissage rapide pour trouver de préférence davantage de ces aliments.

Notre environnement est aujourd’hui riche en aliments sucrés et riches en énergie. Nous n’avons plus à chercher ces aliments sucrés spéciaux — ils sont disponibles partout. Malheureusement, notre cerveau est fonctionnellement très similaire à nos ancêtres, et il aime vraiment le sucre. Que se passe-t-il donc dans le cerveau lorsque nous consommons trop de sucre ?

Plasticité cérébrale : la consommation de sucre peut remodeler le circuit de la récompense

Le cerveau se remodèle et se recâble continuellement par un processus appelé neuroplasticité. Ce recâblage peut se produire dans le système de récompense. L’activation répétée de la voie de la récompense par des médicaments ou en mangeant beaucoup d’aliments sucrés, amène le cerveau à s’adapter à une stimulation fréquente, conduisant à une sorte de tolérance.

Dans le cas des aliments sucrés, cela signifie que nous devrions en consommer plus pour obtenir la même sensation — une caractéristique classique de la dépendance.

La dépendance alimentaire est un sujet controversé parmi les scientifiques et les cliniciens. S’il est vrai que vous pouvez devenir physiquement dépendant de certaines drogues, il est incertain de savoir si vous pouvez être dépendant de la nourriture lorsque vous en avez besoin pour survivre.

Sucre et neurones inhibiteurs : plus de sucre engendre toujours plus de sucre

Indépendamment de notre besoin de nourriture pour alimenter notre corps, de nombreuses personnes éprouvent des fringales, en particulier lorsqu’elles sont stressées, affamées ou simplement confrontées à une présentation séduisante de gâteaux dans un café. Pour résister aux envies, nous devons inhiber notre réponse naturelle. Un réseau de neurones inhibiteurs est essentiel pour contrôler le comportement.

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Le GABA est un neurotransmetteur impliqué dans l’inhibition des comportements. D’importants apports en sucre peuvent diminuer sa synthèse et ainsi favoriser les comportements de recherche de plaisir et de satisfaction. Crédits : Université Bordeaux-1

Ces neurones sont concentrés dans le cortex préfrontal — une zone clé du cerveau impliquée dans la prise de décision, le contrôle des impulsions et le retard de la gratification.

Les neurones inhibiteurs sont comme les freins du cerveau et libèrent le GABA. Des recherches chez le rat ont montré que le suivi de régimes riches en sucre peut altérer les neurones inhibiteurs. Les rats nourris au sucre étaient également moins capables de contrôler leur comportement et de prendre des décisions.

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Surtout, cela montre que ce que nous mangeons peut influencer notre capacité à résister aux tentations et peut expliquer pourquoi les changements de régime alimentaire sont si difficiles pour les gens.

Dans le cadre d’une étude récente, il a été demandé aux gens d’évaluer à quel point ils voulaient consommer des collations riches en calories quand ils avaient faim, par rapport à quand ils avaient récemment mangé. Les personnes qui suivaient régulièrement un régime riche en graisses et en sucre ont montré des envies de grignoter plus importantes, même quand elles n’avaient pas faim.

Comment protéger notre mémoire et notre santé des excès de sucre ?

Un autre domaine du cerveau affecté par des régimes riches en sucre est l’hippocampe — l’un des centres de la mémoire. La recherche montre que les rats ayant une alimentation riche en sucre sont moins capables de se rappeler s’ils avaient déjà vu des objets dans des endroits spécifiques auparavant. Les changements induits par le sucre dans l’hippocampe montraient à la fois une réduction des neurones nouveaux-nés, qui sont vitaux pour coder les souvenirs, et une augmentation des substances chimiques liées à l’inflammation.

L’Organisation mondiale de la santé (OMS) nous conseille de limiter notre apport en sucres ajoutés à 5% de notre apport calorique quotidien, soit 25 grammes (six cuillères à café). Étant donné que l’adulte moyen consomme 85 grammes (20 cuillères à café) de sucre par jour, il s’agit d’un changement de régime important pour beaucoup.

Surtout, les capacités de neuroplasticité du cerveau lui permettent de se réinitialiser dans une certaine mesure après avoir réduit le sucre alimentaire, et l’exercice physique peut augmenter ce processus. Les aliments riches en omega-3 (présents dans l’huile de poisson, les noix et les graines) sont également neuroprotecteurs et peuvent stimuler les produits chimiques du cerveau nécessaires à la formation de nouveaux neurones.

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