Découverte d’un nouveau type d’étoile, recouverte de cendres brûlantes

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Vue d'artiste d'un type rare de fusion stellaire entre deux naines blanches. | Nicole Reindl/Amélioration graphique par Trust My Science
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Des astronomes de l’université de Tübingen ont découvert deux étoiles aux propriétés inhabituelles. Elles sont recouvertes de carbone et d’oxygène provenant des cendres de la combustion de l’hélium. Il est possible que ces étoiles d’un nouveau genre aient été formées par un événement rare de fusion stellaire entre deux naines blanches.

Le cycle de vie typique d’une étoile, comme notre soleil, commence par la fusion nucléaire de l’hydrogène en hélium. Une fois l’hydrogène épuisé, le noyau se contracte et se réchauffe. Lorsqu’il (le noyau) est suffisamment chaud (100 millions de degrés), la fusion de l’hélium s’amorce ; il se transforme en carbone et en oxygène, c’est le stade de la géante rouge. La fusion nucléaire contre la gravité pour empêcher l’effondrement de l’étoile. Cependant, quand tout l’hélium est brûlé, l’étoile s’effondre sur elle-même et devient une naine blanche. Éventuellement, quand le noyau d’une géante rouge s’est refroidi, les gaz restants flottent dans l’espace, pour former une nébuleuse planétaire.

Les étoiles pré-naine blanches sont des étoiles compactes, elles présentent des températures de surface de l’ordre de 40 000–50 000 Kelvin. Leurs atmosphères sont dominées par l’hélium. S’ils sont présents, le carbone et l’oxygène sont des oligo-éléments (en très faible quantité).

Une invitation à rêver, prête à être portée.

Les schémas d’abondances sont expliqués en termes de nucléosynthèse. Dans le cadre de l’évolution d’une seule étoile, l’amorçage de la fusion de l’hélium produit ce que l’on nomme le flash de l’hélium, phénomène extrêmement puissant et bref (quelques secondes à peine) qui aboutit à l’état gazeux classique. Dans la cadre d’une fusion binaire de naines blanches : lorsque l’étoile évolue dans un système binaire avec un compagnon et accrète de la matière de ce compagnon. Si l’hydrogène qui s’accumule à la surface de la naine blanche est converti en hélium par fusion nucléaire, cet hélium peut être le siège d’un flash donnant alors naissance à une nova.

Abondances anormales de carbone et d’oxygène

C’est en recherchant des « étoiles chaudes » à courte durée de vie (dans le but de comprendre les dernières étapes de l’évolution stellaire) avec le grand télescope binoculaire en Arizona, que l’équipe de Klaus Werner de l’Université de Tübingen (Allemagne) a découvert des étoiles aux propriétés uniques.

Leurs surfaces sont recouvertes de carbone (20%) et d’oxygène (environ 20%) — loin de l’abondance en oligo-éléments attendue — et extrêmement chaudes. Ces éléments sont issus des cendres d’une fusion nucléaire d’hélium. La composition exotique est d’autant plus déconcertante que les températures et les diamètres des étoiles indiquent qu’elles brûlent encore de l’hélium dans leur noyau. C’est une propriété généralement observée dans des types plus évolués que ceux observés par les chercheurs de l’étude.

Klaus Werner, auteur principal de l’étude et professeur de l’Institut d’astronomie et d’astrophysique de l’Université de Tübingen, explique dans un communiqué : « Nous nous attendions normalement à ce que les étoiles ayant la composition chimique de surface des étoiles découvertes aient terminé la fusion de l’hélium en leur centre et soient en phase finale de devenir des naines blanches ».

Les auteurs pensent que l’origine de ces observations est une reprise explosive de la fusion de l’hélium, qui ramène alors les cendres brûlantes — carbone et oxygène — à la surface (voir figure ci-dessous). C’est une voie analogue aux flashs de l’hélium en coquille. L’étoile a brûlé la grande majorité de l’hélium disponible dans le cœur, qui est maintenant composé de carbone et d’oxygène. La fusion de l’hélium continue dans une coquille mince entourant son cœur, puis s’arrête quand l’hélium vient à manquer. La fusion de l’hydrogène, située dans une couche au-dessus de la couche d’hélium, débute. Après que suffisamment d’hélium se soit de nouveau accumulé entre les deux coquilles, la fusion de l’hélium est réamorcée, produisant une impulsion thermique. Cette dernière fait temporairement gonfler et briller davantage l’étoile, et remonter le carbone et l’oxygène vers la surface.

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Schéma des « coquilles de fusion » au sein d’une naine blanche, avec la remontée des éléments carbone et oxygène. © Laurie Henry

Les chercheurs estiment néanmoins que « cet événement ne peut pas expliquer ces étoiles nouvellement découvertes. Elles ont des rayons plus grands et effectuent pacifiquement la fusion de l’hélium en leurs centres ». Ce nouveau type d’étoile pré-naine blanche, riche en carbone et oxygène, serait alors une voie alternative à l’évolution typique des étoiles.

Un mariage stellaire rare

C’est une étude parallèle, publiée également dans les avis mensuels de la Royal Astronomical Society par des astronomes de l’Université de La Plata (Argentine) et dirigée par Marcelo Miller Bertolami de l’Institut Max Planck d’astrophysique, qui propose une explication.

Le Dr Miller Bertolami explique : « Nous pensons que les étoiles découvertes par nos collègues allemands pourraient s’être formées lors d’un événement de fusion stellaire très rare entre deux étoiles naines blanches ». Les naines blanches étant les restes d’étoiles plus grandes qui ont épuisé leur combustible nucléaire, elles sont généralement très petites et denses. Des fusions stellaires sont connues pour se produire entre deux naines blanches dans des systèmes binaires proches, en raison du rétrécissement de l’orbite causé par l’émission d’ondes gravitationnelles.

Effectivement, il existe deux types de naines blanches possibles dans un système binaire d’étoiles : celle dont le cœur est constitué de carbone et d’oxygène, et celle dont le cœur est essentiellement fait d’hélium.

Il faut savoir que les étoiles en système binaire échangent de la matière. L’étoile la plus massive au départ, dite « étoile primaire », évolue plus vite que sa compagne. Lorsqu’elle devient une étoile géante, une partie de sa masse est attirée par le champ de gravité de l’autre étoile. Si cet échange de masse intervient avant que ne démarre la combustion de l’hélium, au cœur de l’étoile primaire, cette dernière perd son enveloppe et se transforme en une naine blanche d’hélium, plutôt qu’en une naine blanche de carbone et d’oxygène.

Comme le précise le Dr M. Bertolami, « nous pensons que, pour des systèmes binaires formés avec des masses très spécifiques, une naine blanche riche en carbone et en oxygène pourrait être perturbée et se retrouver au sommet d’une étoile riche en hélium, conduisant à la formation de ces étoiles ».

Cependant, aucun modèle évolutif stellaire actuel n’est capable d’expliquer pleinement les étoiles nouvellement découvertes, ni d’évaluer si ces fusions peuvent réellement se produire. Le professeur Werner souligne que « ces nouvelles étoiles représentent un sérieux défi pour notre compréhension de l’évolution stellaire ».

D’autres études sont donc nécessaires à la construction de tels modèles afin de mieux comprendre ces corps stellaires. Ces modèles pourront fournir un aperçu plus approfondi de l’évolution tardive des systèmes binaires et de la façon dont leurs étoiles changent de masse au cours de leur évolution.

Source : Monthly Notices of the Royal Astronomical Society | Letters

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