Soleil : des émissions radio semblables à des aurores polaires détectées pour la première fois

Le mystérieux phénomène, qui a duré plus d'une semaine, s'est produit à 40 000 kilomètres au-dessus d'une tache solaire.

aurore tache solaire
| Sijie Yu
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Des astronomes ont détecté d’extraordinaires émissions radio semblables à des aurores polaires à 40 000 kilomètres au-dessus d’une tache solaire. Bien qu’elles partagent certaines caractéristiques avec les aurores terrestres, le phénomène nouvellement identifié diffère par son intensité et sa (longue) durée. Des phénomènes similaires pourraient avoir lieu sur d’autres étoiles développant de grandes taches stellaires. Leur étude pourrait nous aider à mieux comprendre les mécanismes géomagnétiques stellaires.

Sur Terre, les aurores polaires (boréales ou australes) se produisent lorsque l’activité solaire perturbe la magnétosphère. Cela favorise la précipitation de particules chargées vers les régions polaires, au niveau desquelles le champ magnétique converge. En interagissant avec les atomes d’oxygène et d’azote présents dans la haute atmosphère, ces flux de particules offrent d’incroyables spectacles lumineux et colorés. Leur accélération peut générer d’intenses émissions radio, avec des fréquences de l’ordre de quelques centaines de kilohertz. Des émissions radio aurorales similaires ont également été détectées sur d’autres planètes, dont Jupiter et Saturne.

Cependant, les émissions radio solaires nouvellement détectées sont particulièrement intenses et se forment au niveau de régions où les champs magnétiques sont extrêmement élevés. Étant donné que le champ magnétique d’une tache solaire est des milliers de fois plus intense que celui de la Terre, les émissions qui en émanent ont une fréquence pouvant aller jusqu’à un million de kilohertz. En outre, elles diffèrent à la fois spectralement et temporellement des sursauts radio solaires antérieurement détectés.

Une invitation à rêver, prête à être portée.

« Nous avons détecté un type particulier de sursauts radio polarisés de longue durée émanant d’une tache solaire, persistant pendant plus d’une semaine », explique l’auteur principal de l’étude, Sijie Yu, dans un communiqué de l’Institut de Technologie du New Jersey. « Cela est assez différent des sursauts radio solaires transitoires typiques, qui durent généralement quelques minutes ou heures. C’est une découverte passionnante qui a le potentiel de modifier notre compréhension des processus magnétiques stellaires », ajoute-t-il.

L’exploration du magnétisme solaire est essentielle à la compréhension de son activité magnétique et de sa dynamique interne, ainsi que de son influence sur les planètes. Cette compréhension pourrait ensuite être transposée à d’autres systèmes stellaires incluant des exoplanètes potentiellement habitables. L’observation des émissions radio fournit un aperçu unique des paramètres physiques régissant ces phénomènes.

Des phénomènes potentiellement transposables à d’autres étoiles

Dans le cadre de leur étude, Yu et son équipe ont utilisé les observations d’imagerie radio dynamique à large bande du radiotélescope Karl G. Jansky Very Large Array (au Nouveau-Mexique). Selon le rapport, publié dans la revue Nature Astronomy, les émissions radio analysées se sont produites à 40 000 kilomètres au-dessus d’une tache solaire. Il est suggéré qu’elles sont dues à des émissions de maser électron-cyclotron (ECM), impliquant des électrons hautement énergétiques piégés dans des champs magnétiques à géométrie convergente. Les régions plus froides et intensément magnétiques des taches solaires fournissent un environnement favorable aux ECM. Ces dernières peuvent ainsi offrir des mesures directes de l’intensité du champ magnétique à la surface solaire.

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Images photosphériques de l’émission radio « aurorale », au niveau d’une tache solaire située dans la région active NOAA 12529. © Sijie Yu et al. (Nature Astronomy, 2023)

Des sursauts radio ECM ont précédemment été observés au niveau des magnétosphères planétaires. Ce type de sursaut cependant, se distingue par sa nature fortement polarisée, sa large bande spectrale et son intense rayonnement. Des émissions plus ou moins similaires et de durée relativement longue ont été détectées au niveau d’étoiles de faible masse. Cependant, aucune émission radio ECM persistante n’a jusqu’à présent été observée au niveau du Soleil.

Les experts de la nouvelle étude ont également remarqué que les sursauts radio observés n’étaient pas nécessairement synchronisés aux éruptions solaires. Au lieu de cela, les éruptions se déroulant au niveau des régions actives environnantes semblent pomper des électrons énergétiques aux boucles de champ magnétique à grande échelle ancrées à la tache solaire. Ces boucles alimentent ensuite l’émission radio ECM.

D’autre part, les chercheurs suggèrent que la rotation des aurores de taches solaires serait modulée et synchronisée par rapport à celle de l’étoile, provoquant ainsi un « effet de phare cosmique ». « Lorsque la tache solaire traverse le disque solaire, elle crée un faisceau rotatif de lumière radio, similaire aux aurores radio modulées que nous observons à partir d’étoiles en rotation », explique Yu. D’ailleurs, étant donné que les caractéristiques des émissions sont comparables à celles d’autres étoiles plus éloignées, les résultats pourraient être appliqués à celles comportant aussi des taches. En effet, à l’instar des taches solaires, les taches stellaires au niveau d’autres étoiles du même calibre (que le Soleil) pourraient être à l’origine des intenses sursauts radio détectés dans leurs environnements.

« Nous commençons à reconstituer le puzzle de la façon dont les particules énergétiques et les champs magnétiques interagissent dans un système avec la présence de taches stellaires durables, non seulement sur notre propre étoile, mais aussi sur des étoiles bien au-delà de notre système solaire », indique le coauteur de l’étude Surajit Mondal, également de l’Institut de Technologie du New Jersey. Ces découvertes offrent ainsi une nouvelle voie pour décrypter des paramètres d’habitabilité clés d’autres systèmes planétaires.

Source : Nature Astronomy

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