Première détection de molécules d’eau à la surface d’astéroïdes supposés « secs »

eau asteroides secs
Les molécules d'eau ont été détectées dans les données de l'observatoire SOFIA. | NASA/Carla Thomas/SWRI
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Des chercheurs ont détecté pour la première fois des molécules d’eau à la surface d’astéroïdes supposés anhydres (secs). La signature des bandes spectrales indique une concentration comparable à celle de la face éclairée de la Lune. La répartition de l’eau sur ces objets pourrait fournir de précieuses informations concernant son acheminement vers la Terre primitive. Les résultats pourraient aussi éclairer comment elle est répartie dans d’autres systèmes stellaires abritant potentiellement la vie.

Les astéroïdes sont des vestiges des processus de formation planétaire. Leurs localisations et leurs compositions fournissent de précieuses informations sur la répartition et l’évolution des matériaux — dont les molécules nécessaires à la vie — dans la nébuleuse solaire primitive. En effet, leur composition varie en fonction de la région où ils se sont formés. Les silicates anhydres (ou secs) se forment plus près du Soleil, tandis que les composants glacés se forment plus loin.

« La répartition de l’eau sur les astéroïdes est particulièrement intéressante, car elle peut éclairer la manière dont l’eau a été acheminée vers la Terre », indique dans un communiqué Anicia Arredondo, du Southwest Research Institute (SWRI). Cela pourrait aussi fournir des indices sur la répartition de l’eau dans d’autres systèmes solaires et ainsi déterminer s’ils pourraient abriter ou non la vie.

Une invitation à rêver, prête à être portée.

À mesure que le système solaire a évolué, les astéroïdes qui ont subi des altérations aqueuses ont formé des composés tels que les phyllosilicates, les sulfates, les oxydes, les carbonates et les hydroxyles. Ces caractéristiques peuvent être détectées par le biais de la spectroscopie visible et proche infrarouge (0,4 à 4 micromètres). La technique la plus utilisée consiste à détecter une bande d’absorption proche de 3 micromètres.

Le spectrographe infrarouge moyen Faint Object InfraRed Camera for the SOFIA Telescope (FORCAST) — embarqué à bord du Stratospheric Observatory for Infrared Astronomy (SOFIA) — exploite cette technique pour détecter les molécules d’eau, y compris dans l’un des plus grands cratères de l’hémisphère Sud de la Lune. Les chercheurs ont pu quantifier à peu près l’équivalent de 0,3 litre d’eau (lié à des minéraux) par mètre cube de sol.

Des observations antérieures ont également détecté des composés hydrogénés sur des astéroïdes. Cependant, cela ne permettait pas de distinguer les molécules d’eau des hydroxyles (OH), leur proche parent chimique. La raison est que la bande d’absorption de 3 micromètres est caractéristique des liaisons oxygène-hydrogène (O-H), ce qui signifie que les signatures détectées pourraient correspondre à n’importe quelle molécule contenant ces liaisons. La caractéristique spectrale de 3 micromètres a d’ailleurs été détectée sur des centaines d’astéroïdes.

Dans le cadre d’une nouvelle étude récemment parue dans The Planetary Science Journal, Arredondo et ses collègues ont pour la première fois isolé les signatures spectrales dans l’infrarouge moyen de molécules d’eau, sur des astéroïdes anhydres. « Nous avons basé nos recherches sur le succès de l’équipe qui a trouvé de l’eau moléculaire sur la surface ensoleillée de la Lune. Nous avons pensé que nous pourrions utiliser SOFIA pour trouver cette signature spectrale sur d’autres corps », explique l’experte.

Des quantités d’eau comparables à celle de la face éclairée de la Lune

Des chercheurs ont récemment révélé que des astéroïdes de type S (majoritairement composés de silicates) présentent également la caractéristique spectrale de 3 micromètres. Cela est étonnant, car cette catégorie d’astéroïdes est censée être anhydre étant donné son lieu de formation. Les experts de la nouvelle étude ont analysé quatre astéroïdes de type S, dont trois (Iris, Melpomene et Massalia) qui présentaient cette caractéristique. Le 4e, Parthénope, ne montre pas la caractéristique et a donc été utilisé comme contrôle.

D’un autre côté, il existe une autre caractéristique spectrale, de 6 micromètres, qui est plus étroitement associée aux molécules d’eau — et ce sans risque de confusion avec les OH ou d’autres minéraux. Si cette bande a pu être attribuée aux molécules d’eau présentes sur la face éclairée de la Lune, elle n’a jusqu’à ici jamais été caractérisée sur des astéroïdes. « Dans ce travail, nous observons quatre astéroïdes de type S pour identifier et analyser la caractéristique de 6 micromètres, indicative de l’eau moléculaire », expliquent les experts du SWRI dans leur étude.

spectre eau asteroides
Sortie du pipeline de traitement SOFIA, montrant comment le spectre change avec différentes valeurs de vapeur d’eau précipitable (PWV). © Anicia Arredondo et al.

Après analyse, il a été constaté que deux des astéroïdes présentent des signatures nettes indiquant la présence de molécules d’eau. « Nous avons détecté une caractéristique attribuée sans ambiguïté à l’eau moléculaire sur les astéroïdes Iris et Massalia », indique Arredondo. De plus, l’intensité de la bande des caractéristiques spectrales suggère que la concentration est comparable à celle de la face éclairée de la Lune. De même, les molécules d’eau sont aussi très probablement liées à des minéraux, en étant par exemple absorbées par les silicates.

En revanche, les signatures détectées sur Parthénope et Melpomène étaient trop brouillées pour pouvoir tirer une conclusion. Selon l’équipe, FORCAST ne serait pas assez sensible pour y distinguer la caractéristique spectrale de l’eau. Néanmoins, les experts prévoient de s’appuyer prochainement sur le télescope James Webb pour obtenir davantage d’informations et observer d’autres cibles potentielles.

« Nous avons effectué des mesures initiales sur deux autres astéroïdes avec Webb au cours du deuxième cycle [d’observation] », a expliqué Arredondo. « Nous avons une autre proposition pour le prochain cycle, visant à examiner 30 autres cibles. Ces études amélioreront notre compréhension de la répartition de l’eau dans le système solaire », conclut-elle.

Source : The Planetary Science Journal

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