Les enfants se déplaceraient à la manière d’un gaz ou, en groupe, comme une transition de phase liquide-vapeur, suggère une étude

Des phases de mouvement collectif de type thermodynamique.

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En observant des enfants d’âge préscolaire, des chercheurs ont identifié deux nouvelles phases de mouvement collectif de type thermodynamique. Les mouvements libres et indépendants des enfants seraient comparables à une phase gazeuse, tandis que les rassemblements en petits groupes dynamiques évoqueraient un état de coexistence de la phase gazeuse et liquide. Ces observations pourraient avoir des implications à la fois pour les sciences comportementales, la biologie et l’épidémiologie.

Au cours des dernières années, les physiciens ont montré que les mouvements des animaux présentaient des phases de type thermodynamique. Chez les humains, ces mouvements ont surtout été étudiés au sein de foules à des échelles variables. Les volontaires sont généralement invités à effectuer des tâches spécifiques, tandis que les paramètres de leurs mouvements sont enregistrés en laboratoire. Des expériences ont par exemple montré que les flux dynamiques des foules présentent un comportement de fluide, avec des vitesses s’alignant sur la loi de distribution de Maxwell-Boltzmann (la distribution des vitesses d’un gaz ou d’un fluide à une certaine température).

De récentes études ont suggéré que les foules humaines présentent des comportements plus nuancés. Les rassemblements, comme les réunions et les conférences, sont par exemple caractérisés par des mouvements limités. Les interactions sociales peuvent donc en affecter les paramètres physiques. D’un point de vue physique, ces scénarios (rassemblements dynamiques ou non) peuvent correspondre à des phases différentes avec des propriétés distinctes.

Des chercheurs de l’Université de Miami ont exploré plus avant la manière dont les interactions sociales peuvent influencer les phases des mouvements collectifs. Ils avancent l’hypothèse selon laquelle ces interactions pourraient donner lieu à une transition de phase liquide-vapeur. Cette hypothèse a précédemment été explorée sur des animaux et des essaims robotisés.

Cependant, les phases de mouvements collectifs humains n’ont jusqu’à présent été étudiées que sur des cohortes se déplaçant en moyenne à des vitesses relativement élevées (supérieures à 1 m/s). « On n’a pas encore exploré la possibilité qu’une phase différente puisse potentiellement émerger dans des régimes à faible vitesse qui pourraient être affectés par de fortes interactions sociales », expliquent-ils dans leur document, publié dans la revue Physical Review E.

Identification de deux types de phases de mouvement

Les chercheurs ont sélectionné des groupes d’enfants d’âge préscolaire (2 à 4 ans) pour les observer dans 4 salles de classe et aires de jeu différentes. Cet âge permet d’étudier des déplacements dont la vitesse n’excède pas le mètre par seconde. Un dispositif d’identification par radiofréquence à bande ultra-large (UWB-RFID) a été utilisé pour collecter des données spatio-temporelles à haute résolution des mouvements des enfants. « L’utilisation de la technologie UWB-RFID permet de suivre avec précision les mouvements des enfants », indiquent les experts dans un communiqué.

Deux types de phases de mouvement distincts ont été identifiés. Le premier, qualifié de phase gazeuse, se manifeste lorsque les enfants se dispersent librement et de manière indépendante. Le second, qualifié de phase de coexistence liquide-vapeur, se produit lorsque les enfants se rassemblent en petits groupes, comparables à des gouttes de liquide, certains entrant ou sortant de ces groupes comme de la vapeur. Cette phase transitionnelle, confirmant l’hypothèse d’une transition de phase liquide-vapeur due à l’interaction sociale, est associée à une vitesse de déplacement plus faible et à une densité d’enfants plus élevée.

enfants gaz
Trajectoires et diagramme vitesse-densité. (a) Illustration de 300 secondes des trajectoires de neuf individus des salles de classe à faible taux libre-jeu (LC). Les couleurs et les flèches identifient respectivement les individus spécifiques et leur orientation. (b) La dispersion colorée représente respectivement LC1 (cercle rouge), LC2 (carré jaune), les salles de classe à haut niveau de jeu libre, ou HC (losange bleu) et les salles de classe à très haut niveau de jeu libre, PG (hexagone cyan). Les triangles gris représentent les données mesurées dans la littérature existante. Les triangles gris clair indiquent les données issues d’études incluant des participants individuels aux densités non enregistrées. © Yi Zhang et al.

L’équipe a ensuite développé à partir de ces données empiriques un modèle de physique statistique reproduisant les deux phases identifiées. Le modèle a été utilisé pour établir un diagramme de phase standard pour le mouvement collectif humain à des vitesses moyennes inférieures à 1 m/s. Ce diagramme pourrait potentiellement déboucher sur de précieuses informations permettant par exemple d’améliorer la gestion des foules et les stratégies éducatives, ainsi que sur une meilleure compréhension des données épidémiologiques.

Par ailleurs, « la technologie UWB-RFID proposée peut également être utilisée pour étudier la dynamique des systèmes de matière active, y compris le comportement animal, la coordination d’essaims robotiques et la surveillance des interactions humaines au sein de systèmes complexes, ce qui pourrait bénéficier à la recherche future en physique sociale », concluent les chercheurs.

Source : Physical Review E.

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