Mars renferme une source de chaleur radioactive, selon une nouvelle étude

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Vue d’artiste de la structure interne de Mars. | IPGP/David Ducros
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Les découvertes sur Mars continuent de surprendre la communauté scientifique. Le tremblement de terre le plus intense enregistré sur la planète rouge l’année dernière a permis de révéler plus de détails sur sa structure et une source de chaleur étonnante. Des scientifiques ont ainsi pu déterminer l’épaisseur et la densité globales de la croûte martienne. En moyenne, elle serait beaucoup plus épaisse que la croûte terrestre ou lunaire, et la principale source de chaleur de la planète serait radioactive. Cette découverte nous aide à améliorer notre compréhension de la planète la plus convoitée de notre système solaire.

Depuis l’arrivée de l’atterrisseur InSight sur Mars en novembre 2018, le nombre d’évènements enregistrés sur la planète dépasse les 1300. Sa mission était de collecter des données sur la structure interne de la planète rouge, à travers, notamment, son activité sismique. Malheureusement, à ce jour, la sonde ne répond plus, elle a perdu toute sa puissance à cause de la poussière accumulée sur ses panneaux solaires, qui n’a jamais été balayée par le vent martien.

La NASA constatait, après une tentative de communication le 18 décembre 2022 : « La puissance de l’atterrisseur diminue depuis des mois, comme prévu, et l’on suppose qu’InSight a peut-être atteint la fin de ses opérations ». Le dernier contact a​​ eu lieu le 15 décembre.

Une invitation à rêver, prête à être portée.

Mais la quantité exceptionnelle de données recueillies par la sonde permet de continuer à étudier la planète rouge et de découvrir plus en avant ses caractéristiques profondes, comme sa structure et, plus récemment, une source de chaleur dissimulée en son cœur.

Ainsi, le 4 mai 2022, elle a pu détecter, grâce à son instrument SEIS fourni par le CNES, un séisme de magnitude 5, le plus fort jamais mesuré sur une autre planète que la Terre. S’appuyant sur ces données, des chercheurs de l’ETH Zurich ont découvert que la croûte de Mars, sa couche la plus externe, est beaucoup plus épaisse que la croûte terrestre ou même que la croûte lunaire. Ils ont aussi déterminé la principale source de chaleur de la planète : elle serait radioactive. Leurs travaux sont publiés dans la revue Geophysical Research Letters.

Ondes de surface et structure globale

Doyeon Kim, sismologue à l’Institut de géophysique de l’ETH Zurich et auteur principal de l’étude, explique dans un communiqué que ses collègues et lui ont étudié les ondes générées par le plus puissant séisme enregistré, des ondes assez fortes pour faire trois fois le tour de la planète. Afin d’obtenir des informations sur la structure traversée par les ondes, les chercheurs ont mesuré la vitesse à laquelle ces ondes se propagent à différentes fréquences.

Ces vitesses sismiques donnent un aperçu de la structure interne à différentes profondeurs. Les ondes issues des deux grands impacts de météorites précédemment étudiés ont également permis des découvertes régionales le long de leurs chemins de propagation spécifiques. Mais avec des données sismiques, les données sont globales, concernant l’ensemble de la structure de Mars.

Terre et Mars, si proches, mais si différentes

Pour obtenir des résultats solides, les auteurs ont combiné leurs données avec celles existantes concernant la gravité et la topographie de Mars. Ils ont alors déterminé l’épaisseur de la croûte martienne : en moyenne 42 à 56 km, avec des régions plus minces — telles que le bassin d’impact d’Isidis (10 km) — et plus épaisses — comme dans la province de Tharsis, à environ 90 km.

En comparaison, la croûte terrestre a une épaisseur plus fine, entre 21 et 27 km, tout comme la croûte lunaire (entre 34 et 43 km) — déterminée par les sismomètres de la mission Apollo. Généralement, les corps planétaires plus petits dans notre système solaire ont une croûte plus épaisse que les corps plus grands.

Des hémisphères dichotomiques et une chaleur radioactive

L’un des résultats les plus importants de ces recherches concerne la différence entre les hémisphères nord et sud de Mars. Ce contraste est connu via des images satellitaires, mais les données sismiques corroborent ces observations préalables. L’hémisphère nord de Mars est constitué de basses terres plates, tandis qu’il existe de hauts plateaux au sud. La division entre les basses terres du nord et les hautes terres du sud constituent ce que les chercheurs nomment une dichotomie martienne.

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À gauche : carte topographique de la surface martienne : les basses terres (en bleu) dominent l’hémisphère nord, tandis qu’il y a des hautes plaines dans le sud. À droite, représentation de l’épaisseur de la croûte. © MOLA Science Team/Doyeon Kim, ETH Zurich

Kim explique : « On pourrait penser que cette différence s’explique par deux compositions rocheuses différentes. Une roche serait plus dense que l’autre ». Étonnamment, les scientifiques ont montré que la densité de la croûte dans les basses terres du nord et les hautes terres du sud est similaire. Notons que l’analyse des impacts de météorites sur Mars l’année dernière avait déjà fourni la preuve que les croûtes au nord et au sud étaient constituées du même matériau.

En revanche, la croûte dans l’hémisphère sud s’étend à une plus grande profondeur que dans l’hémisphère nord. Kim déclare : « Cette découverte est très excitante et permet de mettre fin à une discussion scientifique de longue date sur l’origine et la structure de la croûte martienne ».

Enfin à partir de leurs résultats sur l’épaisseur de la croûte martienne, les auteurs ont eu la possibilité de comprendre comment Mars a pu générer sa chaleur pendant des milliards d’années. En tant que planète à plaque unique, contrairement à la Terre et ses plaques tectoniques, la principale source de chaleur produite à l’intérieur de Mars aujourd’hui serait le résultat de la désintégration d’éléments radioactifs tels que le thorium, l’uranium et le potassium.

L’étude a révélé qu’au moins la moitié de ces éléments radioactifs producteurs de chaleur se trouvent dans la croûte martienne. Cette forte accumulation pourrait expliquer pourquoi il existe des régions sous lesquelles des processus de fusion peuvent encore avoir lieu aujourd’hui ! Une avancée certaine dans notre compréhension de la planète rouge.

Source : Geophysical Research Letters

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