Une météorite de 4,5 milliards d’années dévoile des indices sur la formation du système solaire

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Echantillon de la météorite Erg Chech 002. | Yuri Amelin
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La découverte d’Erg Chech 002, une météorite trouvée dans le désert saharien, offre un éclairage inattendu sur les débuts du système solaire. Cette roche, vieille de 4,5 milliards d’années, suggère une distribution inégale de l’aluminium-26 dans le nuage originel. Certaines théories sur la formation des premiers corps célestes et notre compréhension de l’histoire cosmique pourraient être enrichies par cette découverte.

En mai 2020, des roches inhabituelles contenant des cristaux verdâtres ont été découvertes dans la mer de sable Erg Chech, une région du Sahara en Algérie. Ces roches, provenant de l’espace, sont des fragments d’une météorite appelée Erg Chech 002. Selon les recherches récentes, c’est la plus ancienne roche volcanique jamais trouvée, datant de l’aube du système solaire.

En effet, datant de plus de 4,5 milliards d’années, elle révèle des informations inédites sur les premiers moments du système solaire, avec des implications majeures pour la recherche astronomique. Elle pourrait remettre en question certaines de nos hypothèses sur la formation et l’évolution des premiers corps célestes. Les résultats sont publiés dans la revue Nature Communications.

Une invitation à rêver, prête à être portée.

Une datation exceptionnellement précise

La météorite Erg Chech 002 est un témoin précieux de l’histoire cosmique. Lors de la formation de notre système solaire, il y a 4,567 milliards d’années, un nuage dense de gaz et de poussière s’est condensé pour donner naissance aux corps célestes. Dans ce nuage, l’aluminium existait sous deux formes isotopiques : l’aluminium-27, stable, et l’aluminium-26, radioactif. En se désintégrant, l’aluminium-26 est devenu un marqueur temporel, permettant de dater les événements des premiers instants du système solaire.

Cependant, pour une datation précise, il ne suffit pas de se baser uniquement sur l’aluminium-26, comme le rappellent les auteurs dans un communiqué. Ils ont donc combiné ces données avec celles des isotopes d’uranium et de plomb. Ces isotopes, variantes d’un élément ayant le même nombre de protons mais un nombre différent de neutrons, servent de « chronomètres » naturels. L’uranium, en particulier, possède des isotopes à demi-vie très longue, offrant une fenêtre temporelle étendue pour la datation.

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Graphique du rapport 26Al/27Al (échelle logarithmique naturelle) par rapport aux âges 207Pb-206Pb des achondrites. © E. Krestianinov et al., 2023

En combinant ces différents isotopes, l’âge de la météorite a été estimé à 4,56556 milliards d’années, une datation exceptionnellement précise pour un objet spatial, apportant ainsi un éclairage inédit sur les premiers moments de notre univers.

Erg Chech 002 : une achondrite non groupée

Les météorites sont classées en différentes catégories en fonction de leur composition et de leur origine. L’une de ces catégories est celle des achondrites, qui se distinguent par l’absence de chondrules, de petites sphères silicatées présentes dans de nombreuses météorites. Les achondrites sont le résultat de processus de fusion et de différenciation, similaires à ceux qui ont formé les croûtes et les manteaux des planètes. Elles proviennent de planétésimaux, de petits corps célestes qui se sont formés dans le nuage de gaz et de poussière à l’origine du système solaire. Ces planétésimaux ont subi des processus de fusion, formant des roches solides à partir de matériaux fondus.

La plupart des achondrites peuvent être rattachées à des groupes spécifiques, basés sur leur composition chimique et minéralogique, reflétant leur origine sur des corps parentaux spécifiques. Cependant, Erg Chech 002 est classé comme une « achondrite non groupée », ce qui signifie qu’elle ne correspond à aucun des groupes d’achondrites connus. Sa composition unique suggère qu’elle provient d’un corps parental qui n’a pas encore été identifié ou qui diffère considérablement des autres sources d’achondrites. Cette singularité fait d’Erg Chech 002 un spécimen particulièrement précieux pour les chercheurs, car elle offre un aperçu d’un environnement du système solaire primitif qui reste encore largement inexploré.

Une distribution inégale de l’aluminium-26

Comme mentionné précédemment, les isotopes sont des outils essentiels pour les géochimistes. Ils permettent de retracer l’histoire des roches et de comprendre les processus qui ont conduit à leur formation. Dans le cas de la météorite Erg Chech 002, l’analyse isotopique a révélé des informations cruciales sur sa provenance et son âge. La présence en grande quantité de plomb-206 et de plomb-207, ainsi que d’uranium-238 et d’uranium-235 non désintégrés, indique des processus radioactifs qui se sont produits au fil du temps.

En comparant la composition isotopique d’Erg Chech 002 avec celle d’autres achondrites, une différence notable a été observée en ce qui concerne l’aluminium-26. Les angrites, un autre groupe d’achondrites, contiennent généralement moins d’aluminium-26. Le fait qu’Erg Chech 002 contienne trois à quatre fois plus d’aluminium-26 que les angrites suggère que cet isotope n’était pas uniformément réparti dans le nuage de gaz et de poussière à l’origine du système solaire.

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Dichotomie carbonée (CC) et non carbonée (NC) parmi les chondrites, les achondrites et les planètes telluriques déduite des signatures isotopiques. © E. Krestianinov et al., 2023

Cette inégalité dans la distribution de l’aluminium-26 pourrait être le résultat de processus variés, tels que la proximité de régions du nuage à des étoiles en fin de vie émettant cet isotope, ou des mouvements turbulents au sein du nuage. Cette découverte remet en question certaines hypothèses sur la formation homogène du système solaire et souligne la complexité des processus à l’œuvre lors de la naissance de notre système.

Source : Nature Communications

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