Le « glacier de l’apocalypse » (Thwaites) ne tiendrait plus qu’à un fil et menace 40% de la population mondiale

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Le bateau d'expédition des chercheurs de l'étude devant le front du glacier Thwaites. | Alexandra Mazur/Université de Göteborg
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La fonte du glacier Thwaites pourrait avoir des conséquences désastreuses sur la planète entière. Suite à une récente expédition, des chercheurs ont découvert que ce glacier aurait fondu par le passé beaucoup plus rapidement que précédemment estimé, ce qui laisse présager que sa prochaine perte de glace pourrait être imminente et encore plus dramatique, alors que sa survie ne tiendrait aujourd’hui plus qu’à un fil. Surnommé à juste titre « glacier de l’apocalypse », il pourrait provoquer dans un futur proche une hausse des niveaux des mers allant jusqu’à trois mètres, tout en provoquant la perte des glaciers alentour. Une menace sans précédent, qui pourrait impacter 40% de la population mondiale — vivant à moins de 100 kilomètres des côtes.

Le glacier Thwaites, l’un des glaciers les plus massifs d’Antarctique, mesure pas moins de 120 kilomètres de large pour une longueur de 600 km (l’équivalant d’un tiers de la France). Il ferait plus de 3 km de haut. En vue de sa taille, il constitue un élément clé pour le maintien de l’équilibre géoclimatique de la planète. Il possède en effet une position stratégique, notamment à l’ouest de l’Antarctique à l’entrée de plusieurs vallées situées en dessous du niveau de la mer. De ce fait, il joue le rôle d’une sorte de cale, empêchant les autres glaciers de céder et de dériver.

Cependant, en retraçant son histoire, les glaciologues ont remarqué qu’au gré des épisodes de réchauffement par lesquels notre planète est passée, Thwaites serait particulièrement sujet aux changements en comparaison aux autres glaciers. En raison de sa fonte, il serait aujourd’hui responsable de 4% de la hausse des niveaux des mers chaque année, un chiffre qui pourrait passer à 25% en considérant l’accélération du réchauffement climatique. D’après les scientifiques, il serait maintenant dans une phase d’effondrement « rapide ».

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La nouvelle étude, parue dans Nature Geoscience, expose les résultats d’une expédition durant laquelle les chercheurs ont pour la première fois obtenu des images cartographiques en haute résolution du dessous du glacier. Cette zone constitue une région frontale fondamentale pour le maintien de sa structure. Si les chercheurs ont pu obtenir des images sous-marines d’une telle qualité, c’est notamment grâce au fait que la banquise était particulièrement fine et dispersée cet été.

Les images ont initialement été collectées afin d’estimer la vitesse de fonte du glacier dans le passé, dans le but d’estimer plus précisément les futures pertes de volume de glace.

fond en face glacier en 3D
Vue en 3D du fond marin, observé pour la première fois depuis une crête du fond marin située juste en face de la plate-forme du glacier. © Alastair Graham/Université de la Floride du Sud

L’équipe de recherche a alors découvert plus de 160 crêtes bathymétriques parallèles, telles que des empreintes marquant les mouvements du glacier (lorsque celui-ci a avancé ou s’est retiré au gré des marées quotidiennes). L’espace entre les crêtes révèle l’amplitude du retrait au cours des 200 dernières années. D’après les chercheurs de l’Université de la Floride du Sud, ayant participé à l’expédition, les retraits enregistrés par satellite entre 2011 et 2019 sont minimes par rapport à ce qu’il s’est produit par le passé.

Au rythme où progresse le réchauffement de la planète, le pire serait donc à venir. « Thwaites ne tient vraiment plus à qu’à fil aujourd’hui, et nous devrions nous attendre à voir de grands changements sur de petites échelles de temps à l’avenir – même d’une année à l’autre – une fois que le glacier se retirera au-delà d’une crête peu profonde dans son lit », prévient Robert Larter, géophysicien marin du British Antarctic Survey et co-auteur de l’étude.

Un véritable effet domino

D’après les analyses des chercheurs de la nouvelle étude, à un moment donné au cours des 200 dernières années, les bords du glacier se seraient détachés de l’une des crêtes du fond marin rocheux et auraient dérivé avec un rythme de 2,1 kilomètres par an, et ce en moins de six mois seulement. « Nos résultats suggèrent que des impulsions de recul très rapide se sont produites au glacier Thwaites au cours des deux derniers siècles, et peut-être aussi récemment qu’au milieu du 20e siècle », explique Alastair Graham, géophysicien marin à l’Université de Floride du Sud et auteur principal de l’étude.

Le glacier est notamment retenu par la roche sur laquelle il repose. Cependant, de l’eau issue de courants chauds s’infiltrerait dans les creux de cette roche, faisant fondre la glace. D’après des études antérieures, la température de cette eau sous le glacier serait d’un à deux degrés supérieure au point de congélation, accélérant la fonte. Le glacier perd donc en volume à la fois par le haut et par le bas (la partie immergée et reposant sur la roche).

Les conséquences de la perte du glacier Thwaites seraient désastreuses à l’échelle planétaire, car il sert de maintien aux autres glaciers situés derrière, Thwaites étant celui qui se jette directement dans la mer. S’il se désagrège trop ou disparait, les glaciers voisins seront donc également entraînés dans sa chute, engendrant la perte d’une grande partie des glaciers de l’Antarctique. Si cela venait à se produire, une importante hausse du niveau des mers a été estimée par les scientifiques, mais il y aura également un impact sur la température globale, la salinité des océans, et d’autres aspects clés du système climatique.

Source : Nature Geoscience

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