Inspiré de la photosynthèse, une batterie convertit le CO2 de l’air et le plastique en « carburant vert »

batterie solaire co2 plastique
| Ariffin Mohamad Annuar/Université de Cambridge
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À l’aide d’un nouveau type de batterie solaire, des chercheurs ont converti du CO2 extrait directement de l’air et du plastique en « carburant vert », ainsi que parallèlement en un produit cosmétique anti-âge. Véritable prouesse inspirée de la photosynthèse, le dispositif réutilise deux polluants environnementaux majeurs dans un système circulaire au sein duquel presque rien ne se perd.

L’accumulation anthropique de CO2 dans l’atmosphère a considérablement bouleversé l’équilibre climatique de la planète et engendre des conséquences dramatiques sur l’environnement et la biodiversité. L’utilisation à l’échelle mondiale de combustibles fossiles (fournissant 80% de l’énergie) figure parmi les principales causes de cette accumulation ou « empreinte carbone ».

empreinte carbone
Infographie illustrant les émissions de carbone pour chaque pays (à gauche), en comparaison avec celles par habitant (à droite). © Stanford Kay

Désormais, la réduction des émissions de carbone dans l’atmosphère est un enjeu climatique majeur. Pour ce faire, des efforts sont entrepris en faveur des technologies de capture et de stockage de CO2. L’une des plus populaires auprès des industries pétrolières consiste à pomper le CO2 et à le stocker dans des réservoirs souterrains (CSC), afin d’en réduire l’émission dans l’air au cours de leurs cycles d’exploitation.

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« Mais si au lieu de capter et de stocker le carbone, nous avions le captage et l’utilisation du carbone, nous pourrions fabriquer quelque chose d’utile à partir du CO2 au lieu de l’enfouir sous terre », suggère Erwin Reisner, auteur correspondant de la nouvelle étude et expert au département de chimie de l’Université de Cambridge. D’après lui, le stockage de carbone pourrait ne pas constituer une solution viable à long terme, sans compter qu’il ne permet nullement d’éliminer complètement les combustibles fossiles des systèmes énergétiques.

conversion carbone
Photographie montrant le système de capture du carbone de l’air et de conversion photoélectrochimique en carburant, avec une conversion simultanée des déchets plastiques en produits chimiques. © Ariffin Mohamad Annuar/Université de Cambridge

Une technologie inspirée des feuilles des arbres

Depuis quelques années, les chercheurs de Cambridge tentent de reproduire en laboratoire la photosynthèse, le processus naturel complexe au cours duquel les feuilles des arbres utilisent l’énergie du Soleil pour capturer et dégrader le CO2 dans l’atmosphère et y rejeter de l’oxygène. Les feuilles artificielles visent à convertir l’eau et le carbone en carburant durable, par le biais d’une batterie photonique.

Cependant, le dispositif comportait encore des limites dans la mesure où il ne pouvait être utilisé que pour du CO2 à l’état pur et pressurisé. Pour que ce carbone puisse être converti en énergie, il doit capturer des électrons issus de molécules d’eau — un processus énergivore. Mais la majorité de la demande d’énergie provient des étapes de désorption et de compression accompagnant la capture du CO2. Elles impliquent également le chauffage de grands volumes de solutions alcalines, sans compter la pressurisation du gaz ultérieurement libéré. De ce fait, cette solution est à la fois énergétiquement non viable et non transposable aux conditions atmosphériques réelles.

Étant donné que le CO2 n’est qu’un des nombreux gaz composant l’air, la technologie n’est véritablement pratique qu’en capturant le carbone qui en est directement issu ou bien extrait de rejets industriels. Le CO2 dans ces conditions étant fortement dilué, le dispositif doit être suffisamment sensible et sélectif pour qu’il puisse être isolé d’autres gaz. Le nouveau prototype, décrit dans la nouvelle étude parue dans la revue Joule, a surmonté ce défi technique en intégrant un plastique courant (le PET) dans son cycle de production. À terme, cette technologie permettrait d’éliminer complètement les combustibles fossiles des systèmes énergétiques.

Un cycle de production circulaire

Le nouveau dispositif consiste en un système de catalyse moléculaire comprenant une photocathode (utilisant l’énergie solaire) et une anode. Il est divisé en deux compartiments, dont l’un capture le CO2 et le convertit en gaz de synthèse (un combustible classique), tandis que l’autre convertit le plastique en acide glycolique, un composant courant des produits cosmétiques anti-âge.

batterie solaire carbone
Infographie résumant le fonctionnement du nouveau dispositif. © Université de Cambridge

L’ensemble est immergé dans une solution alcaline permettant d’enclencher un processus de « bullage », qui concentre le CO2 de l’air en solution. La présence du PET est une astuce essentielle, car le processus de catalyse lui permet de céder des électrons au CO2 en se décomposant en acide glycolique, et le tout à moindre consommation d’énergie. « Le composant en plastique est une astuce importante pour ce système, car capter et utiliser le CO2 de l’air rend la chimie plus difficile », explique le coauteur principale de l’étude, également chercheur à Cambridge, Motiar Rahaman.

Le gaz de synthèse obtenu est conservé, tandis que les autres composants de l’air tels que l’azote et l’oxygène sont rejetés, à l’instar d’un véritable processus photosynthétique. Le CO2 rejeté par la combustion du gaz obtenu peut être à nouveau réintégré et recyclé dans le système. L’ensemble permettrait ainsi de recycler quasi indéfiniment le CO2 de l’air et le plastique couramment utilisé pour les bouteilles et les emballages, selon un processus circulaire excluant complètement le carburant fossile.

Il faut néanmoins garder à l’esprit qu’il s’agit d’un prototype nécessitant encore des améliorations, afin de véritablement en établir les avantages. En effet, les chercheurs n’ont par exemple pas encore évalué si le cycle énergétique est réellement dépourvu d’émissions de carbone (sur toute la chaîne) ou si d’autres types de plastiques peuvent être recyclés. Pour l’heure, les chercheurs travaillent dans ce sens, en évaluant les avantages du couplage de la capture directe de l’air avec l’utilisation du CO2, en tant que voie vers un avenir zéro carbone.

Source : Joule

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