Des scientifiques découvrent la capacité naturelle des métaux à s’autoréparer

Maîtriser ce phénomène pourrait rendre toute structure métallique beaucoup plus durable.

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Étude des fissures métalliques à l'échelle nanométrique, par Ryan Schoell des Sandia National Laboratories, avec un microscope électronique à transmission spécialisée. | Craig Fritz
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Face aux défis de durabilité des matériaux, une découverte récente pourrait transformer notre approche : le métal autoguérissant. Cette percée, basée sur la capacité intrinsèque des métaux à se réparer, pourrait prolonger la durée de vie des composants dans divers secteurs, notamment l’aérospatiale. Toutefois, des défis subsistent, notamment l’optimisation et le contrôle de ce processus, ainsi que sa mise à l’échelle.

Dans un monde où l’innovation est le maître mot, les chercheurs se tournent vers des solutions inédites pour répondre aux défis de notre époque. L’un de ces défis est la durabilité des matériaux, un enjeu crucial pour de nombreux secteurs industriels.

Récemment, une équipe de recherche des Sandia National Laboratories et de la Texas A&M University a fait une découverte qui pourrait bien bouleverser notre compréhension des métaux tels que nous les connaissons : le métal autoguérissant.

Si ce phénomène peut être exploité à grande échelle, il inaugurerait une révolution technique dans laquelle les moteurs, les ponts et les avions autocicatrisants pourraient inverser les dommages causés par l’usure, les rendant plus sûrs et plus durables. Les travaux sont publiés dans la revue Nature.

Comprendre le concept de guérison

Loin d’être un concept tiré d’un roman de science-fiction, le métal autoguérissant est une réalité tangible, due à un processus naturel. En effet, les métaux possèdent une capacité intrinsèque à se réparer eux-mêmes. Cette propriété a été mise en lumière par des chercheurs qui ont observé que, sous l’effet de contraintes, les métaux peuvent développer des microfissures.

Ces microfissures, bien que minuscules, pourraient être perçues comme des blessures pour le matériau. Cependant, au lieu de s’aggraver ou de rester stables, ces fissures se referment d’elles-mêmes. Ce phénomène, connu sous le nom de « soudure à froid », est en quelque sorte un processus de guérison que le métal entreprend de lui-même, sans aucune intervention extérieure.

Il s’agit d’un mécanisme naturel qui permet au métal de maintenir son intégrité structurelle face aux contraintes auxquelles il est soumis. Cette découverte, qui révèle une nouvelle facette de la nature des métaux, ouvre des perspectives inédites pour l’avenir de l’ingénierie des matériaux.

Les métaux vus sous un nouveau jour, de manière impromptue

Mais précisons que cette découverte a été faite par hasard ! Effectivement, les auteurs voulaient seulement évaluer comment les fissures se formaient et se propageaient à travers un morceau de platine à l’échelle nanométrique. Pour ce faire, ils ont utilisé une technique de microscopie électronique spécialisée qu’ils avaient développée pour observer les conséquences d’une mise sous contrainte mécanique — consistant à tirer à plusieurs reprises sur les extrémités du morceau de métal, 200 fois par seconde.

L’échelle nanométrique, qui est de l’ordre du milliardième de mètre, est si petite qu’elle permet d’observer les phénomènes au niveau des atomes et des molécules. C’est à cette échelle que les chercheurs ont pu observer les microfissures se formant et se refermant, révélant ainsi le processus de guérison autonome des métaux.

Étonnamment, environ 40 minutes après le début de l’expérience, les dégâts se sont inversés. Une extrémité de la fissure a fusionné comme si elle revenait sur ses pas, ne laissant aucune trace de l’ancienne blessure. Au fil du temps, la fissure s’est régénérée dans une direction différente.

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Dans cette vue d’artiste de l’autoguérison du métal à l’échelle nanométrique, le vert marque l’endroit où une fissure s’est formée puis a fusionné. Les flèches rouges indiquent les directions des forces de traction qui ont déclenché le phénomène de manière inattendue. © Dan Thompson

Ces observations, rendues possibles par l’évolution des technologies d’observation, ont permis de constater que les métaux ont la capacité de se « guérir » de manière autonome, sans nécessiter d’intervention extérieure.

Les implications de la découverte

L’autoguérison des métaux remet en question notre compréhension traditionnelle des métaux et ouvre la voie à de nouvelles applications potentielles dans divers domaines de l’ingénierie et de la technologie. Comme le rappelle dans un communiqué Brad Boyce, scientifique des matériaux chez Sandia : « Des joints de soudure dans nos appareils électroniques aux moteurs de nos véhicules en passant par les ponts sur lesquels nous roulons, ces structures échouent souvent de manière imprévisible en raison d’une charge cyclique qui conduit à l’initiation de fissures et à une éventuelle fracture ».

Il ajoute : « Lorsqu’ils tombent en panne, nous devons faire face à des coûts de remplacement, à des pertes de temps et, dans certains cas, à des blessures, voire pire. L’impact économique de ces échecs se mesure en centaines de milliards de dollars chaque année pour les États-Unis ».

Effectivement, dans l’industrie aérospatiale, où les matériaux sont soumis à des contraintes extrêmes, l’utilisation de métaux autoguérissants pourrait prolonger la durée de vie des composants et réduire les coûts de maintenance.

Malgré l’enthousiasme suscité par cette découverte, rien n’est fait. En effet, les chercheurs n’ont pour le moment que constaté et étudié en surface le phénomène. Ils doivent encore comprendre comment optimiser ce processus d’autoguérison et comment le contrôler. De plus, il reste à déterminer si cette propriété peut être reproduite à grande échelle.

La découverte de cette capacité d’autoguérison des métaux représente tout de même un pas de plus vers un avenir plus durable. En prolongeant la durée de vie des matériaux et en réduisant la nécessité de remplacements fréquents, nous pourrions réduire notre empreinte environnementale et nous diriger un peu plus rapidement vers un avenir plus vert.

Source : Nature

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