Des « mini gratte-ciels » pour bactéries convertissent la lumière en électricité

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Les nanostructures imprimées en 3D pour accueillir les cyanobactéries. | Gabriella Bocchetti/Cambridge University
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Un type de bactérie bien particulier vient d’être « relogée » en grande pompe. Des chercheurs de l’Université de Cambridge ont conçu pour elle de minuscules « gratte-ciels », qui lui permettent de produire de l’électricité à partir de la lumière du soleil et d’eau.

Les scientifiques ont en effet imprimé en 3D des grilles de « nano-logements » en hauteur, à l’échelle de bactéries. Ces structures ont été créées en nanoparticules d’oxyde d’étain indium, et permettent à ses habitantes d’y développer rapidement une colonie. Ce « logement » n’est cependant pas gratuit ! Ces mini « gratte-ciels » sont en réalité des électrodes, puisque les chercheurs attendent des bactéries qui y élisent domicile qu’elles produisent de l’énergie exploitable par les humains.

En effet, c’est un type particulier de bactérie qui est visée par cette innovation : les cyanobactéries, ou bactéries photosynthétiques. Selon la définition de l’Anses, « les cyanobactéries sont des micro-organismes présents sur Terre depuis deux à trois milliards d’années. Présentes dans le monde entier, dans les plantes, dans l’eau, mais aussi dans le sable, elles façonnent notre planète. (…) Lorsque les conditions environnementales – température, nutriments – leur sont favorables, elles peuvent proliférer de manière massive et rapide, parfois en quelques jours seulement ».

C’est d’ailleurs ce qui fait que cette bactérie, lorsqu’elle se développe beaucoup dans l’eau, peut donner cette couleur verte et ces mauvaises odeurs assez peu appréciées… Vous l’aurez compris, les cyanobactéries sont tout sauf une ressource rare. C’est cette prolixité, associée à une de leurs particularités, qui fait tout leur intérêt pour les scientifiques. En effet, elles ont la particularité d’être capables de faire de la photosynthèse et de produire naturellement des électrons en guise de « déchets ».

La théorie paraît donc plutôt simple : il suffirait de « brancher » ces bactéries à des électrodes pour récupérer de l’énergie naturelle issue de la photosynthèse. Pourtant, de nombreux scientifiques s’y sont essayés sans vraiment parvenir à des résultats exploitables, expliquent les chercheurs dans un communiqué de l’Université de Cambridge : « Il y a eu un goulot d’étranglement en matière de quantité d’énergie que vous pouvez réellement extraire des systèmes photosynthétiques, mais personne n’a compris où il se trouvait », explique ainsi Jenny Zhang du département de chimie Yusuf Hamied, qui a dirigé la recherche. « La plupart des scientifiques ont supposé qu’il se situait du côté biologique, dans les bactéries, mais nous avons découvert qu’un goulot d’étranglement substantiel se situe en fait du côté matériel ».

Une « mini-ville » pour faire vivre les bactéries en communauté

En effet, selon la façon dont les bactéries sont installées, il semble que l’on puisse récupérer plus ou moins d’électricité. Plusieurs contraintes entrent en jeu. Pour récupérer l’énergie produite, les bactéries doivent être reliées à des électrodes. D’un autre côté, pour produire beaucoup d’énergie, elles doivent être dans un endroit très lumineux, comme la surface d’un lac en été. Ces bactéries vivent également en « communauté » et ne doivent donc pas être trop isolées.

C’est donc en prenant en compte tous ces paramètres que l’équipe de chercheurs a conçu une nanostructure composée d’électrodes qui forment de tout petits piliers adaptés au mode de vie des bactéries. Pour cela, ils ont développé une méthode d’impression 3D capable de contrôler plusieurs échelles de longueur, rendant les structures très personnalisables.

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a) Schéma d’une cellule chimique biophotoélectrique produisant de l’électricité solaire biologique en utilisant des biofilms photosynthétiques comme photocatalyseurs. Le flux d’électrons provenant de l’oxydation photosynthétique de l’eau est récolté à l’anode et transféré à une cathode, qui réduit l’oxygène en nanoparticules de H2O. b) Schéma de l’interface cyanobactérie-anode. La lumière est récoltée par le photosystème II (PSII), qui est utilisé pour oxyder l’eau, entraînant la libération d’électrons, O2 et H+. Les électrons sont transférés via la chaîne de transport d’électrons photosynthétique au photosystème I (PSI), qui pompe l’énergie lumineuse absorbée dans les électrons. © Jenny Z. Zhang et al./Cambridge University

« Les électrodes ont d’excellentes propriétés de gestion de la lumière, comme un appartement de grande hauteur avec beaucoup de fenêtres », explique Jenny Zhang, qui fait le parallèle avec des gratte-ciels. « Les cyanobactéries ont besoin de quelque chose auquel elles peuvent s’attacher et former une communauté avec leurs voisins. Nos électrodes permettent un équilibre entre une grande surface et beaucoup de lumière, comme un gratte-ciel en verre ». La structure finale pourrait d’ailleurs être comparée à une ville miniature composée de gratte-ciels.

Une fois installées de cette façon, les bactéries se sont avérées productives, et les chercheurs ont pu aussi observer de près la façon dont elles convertissent la lumière, afin d’optimiser sa récupération. « Notre approche nous permet d’exploiter leur voie de conversion d’énergie à un stade précoce, ce qui nous aide à comprendre comment ils effectuent la conversion d’énergie afin que nous puissions utiliser leurs cheminements naturels pour la production de carburants renouvelables », disent-ils.

La récupération d’énergie a donc atteint un niveau de rendement qui pourrait la rendre exploitable parmi les autres formes d’énergies renouvelables. Les chercheurs affirment même que la méthode est plus efficace que certaines technologies biotechnologiques en usage actuellement, notamment dans la création de biocarburants. « Notre approche est une étape vers la fabrication de dispositifs d’énergie renouvelable encore plus durables pour l’avenir », s’est donc félicitée Jenny Zhang. L’étude précise tout de même que les nanostructures sont composées d’indium étain, un matériau connu pour être rare et non renouvelable.

Source : Nature Materials

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