La NASA mise sur un essaim de robots nageurs pour explorer les océans extraterrestres

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Illustration de la mission Europa Clipper. | NASA/JPL-Caltech
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L’Agence spatiale américaine vient d’accorder un financement de phase 2 à un projet visant à développer de petits robots nageurs explorateurs. Ces « Sensing With Independent Micro-Swimmers » (SWIM) seraient spécifiquement conçus pour parcourir et analyser les océans et lacs souterrains de notre système solaire. Déployés en groupe, ils permettraient d’explorer ces eaux lointaines et mystérieuses dans leurs moindres recoins.

Europe et Encelade, des satellites de Jupiter et Saturne respectivement, sont de petites lunes recouvertes d’une épaisse croûte de glace. Les scientifiques pensent que d’immenses océans d’eau liquide se trouvent sous cette glace et qu’ils pourraient réunir les conditions propices à l’existence d’une forme de vie extraterrestre. L’objectif principal de la mission Europa Clipper est d’ailleurs de confirmer cette hypothèse, en s’assurant de la présence d’eau sous la surface et en déterminant ses caractéristiques. Le lancement est prévu pour octobre 2024 et la sonde parviendra dans l’orbite de Jupiter en avril 2030.

Elle embarquera plusieurs instruments scientifiques, dont le Radar for Europa Assessment and Sounding: Ocean to Near-surface (REASON), chargé de caractériser la croûte de glace qui s’étend de la surface jusqu’à l’océan interne, ou encore le spectromètre MASPEX, qui analysera l’atmosphère d’Europe pour déterminer la composition de sa surface et de l’océan souterrain. Mais une nouvelle technologie prometteuse a été proposée dans le cadre du programme NASA Innovative Advanced Concepts (NIAC) : de minuscules robots nageurs, qui pourraient directement plonger dans l’eau et se livrer à une analyse précise du milieu.

Une invitation à rêver, prête à être portée.

Étendre toujours plus les possibilités d’exploration

Concrètement, un atterrisseur se poserait sur la surface glacée, puis déploierait une sonde (un cryobot) qui creuserait un tunnel à travers la glace grâce à la chaleur d’une batterie nucléaire. Une fois la coque percée, un essaim d’une cinquantaine de petits robots — pas plus grands qu’un smartphone — s’extirperait de la sonde pour aller explorer les eaux souterraines. C’est du moins le concept imaginé par Ethan Schaler, ingénieur en mécanique robotique au Jet Propulsion Laboratory.

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Dans le concept SWIM (Sensing With Independent Micro-Swimmers) illustré ici, des dizaines de petits robots descendent à travers la coquille de glace d’une lune lointaine via un cryobot (représenté à gauche), jusqu’à l’océan situé en dessous. © NASA/JPL-Caltech

Après avoir passé une première phase visant à valider la faisabilité du projet, son équipe et lui viennent de recevoir un nouveau financement de 600 000 $ pour développer plus avant leur concept de Sensing With Independent Micro-Swimmers (SWIM). Ils pourront ainsi fabriquer et présenter des prototypes de leurs micro-nageurs au cours des deux années à venir.

Ces robots ne feraient qu’une douzaine de centimètres de long, pour un volume total de 60 à 75 cm3. Il est prévu que chacun soit doté de son propre système de propulsion, d’un ordinateur de bord et d’un système de communication par ultrasons, ainsi que de capteurs simples (de température, de salinité, d’acidité et de pression). Mais leur principal atout sera leur taille : ils seront beaucoup plus petits que les projets de robots explorateurs d’océans proposés jusqu’alors.

Par conséquent, tout un essaim de ces robots pourrait être embarqué dans le cryobot, permettant une exploration plus exhaustive des masses d’eau glacée — et donc, une probabilité plus grande de détecter des preuves de vie. « Avec un essaim de petits robots nageurs, nous sommes en mesure d’explorer un volume beaucoup plus important d’eau océanique et d’améliorer nos mesures en ayant plusieurs robots qui collectent des données dans la même zone », explique Schaler.

De meilleures chances de détecter des traces de vie

Des concepts de cryobots permettant de percer la croûte de glace d’Europe sont déjà en cours de développement, notamment dans le cadre du programme SESAME (Scientific Exploration Subsurface Access Mechanism for Europa) de la NASA. Il est prévu que le cryobot soit relié par un câble de communication à l’atterrisseur — ce qui limite évidemment les déplacements de l’engin. Le risque est malheureusement de percer la croûte d’Europe au « mauvais » endroit, là où aucun signe de vie ne peut être détecté, alors que les résultats pourraient être différents à quelques mètres de distance…

illustration cryobot
Illustration montrant le concept de cryobot de la NASA, Probe using Radioisotopes for Icy Moons Exploration (PRIME), déployant de minuscules robots cunéiformes dans l’océan sous la surface gelée d’un monde océanique. © NASA/JPL-Caltech

C’est tout l’intérêt de l’essaim de robots nageurs : ils permettraient d’explorer les eaux souterraines bien plus largement que ne le permettrait un seul cryobot. Pour Samuel Howell, scientifique de l’équipe SWIM au JPL, qui travaille également sur Europa Clipper, le concept n’est pas sans rappeler le duo formé par le rover Perseverance et l’hélicoptère Ingenuity sur Mars : « L’hélicoptère étend la portée du rover, et les images qu’il renvoie l’aide à comprendre comment explorer son environnement », a-t-il déclaré.

Par ailleurs, ces robots seraient capables de recueillir des données loin du cryobot — dont la chaleur pourrait modifier la chimie de l’eau à proximité. Les scientifiques seraient donc assurés de disposer de données fiables et non corrompues. Enfin, la collecte simultanée de données à plusieurs endroits de l’océan pourrait mettre en évidence des gradients (de température ou de salinité), signes d’une potentielle forme de vie. « S’il existe des gradients d’énergie ou des gradients chimiques, c’est ainsi que la vie peut commencer à apparaître », confirme Schaler.

Les SWIM sont donc très prometteurs pour l’exploration océanique extraterrestre. Grâce à leur nouveau financement, Schaler et son équipe vont s’atteler à mettre au point des capteurs chimiques permettant de détecter les biomarqueurs. Et peut-être que ces engins détecteront un jour une forme de vie aquatique aux confins de notre système solaire…

Source : NASA/JPL

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