Un nouveau traitement bloque durablement une protéine clé du cancer

Une avancée inédite qui pourrait changer la donne dans la lutte contre les tumeurs résistantes.

Percée des chercheurs ont réussi à neutraliser une protéine « incurable »
| Pixabay
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Dans le champ complexe de la recherche en oncologie, des chercheurs britanniques viennent de réaliser une avancée majeure : ils sont parvenus à neutraliser de façon permanente une protéine cancéreuse réputée jusqu’ici « intouchable ». Publiés dans la revue Advanced Science, ces travaux impliquent une nouvelle technologie de criblage pharmacologique baptisée TBS (Transcription Block Survival). Cette méthode a permis l’identification de plusieurs candidats-médicaments prometteurs.

Cette avancée intervient dans le sillage de découvertes récentes réalisées en Corée du Sud. En décembre 2024, des chercheurs du KAIST (Institut avancé des sciences et technologies de Corée) avaient mis au point une technologie capable de reprogrammer des cellules cancéreuses du côlon en cellules saines, sans les détruire.

Quelques semaines plus tard, le 5 février, ces mêmes scientifiques annonçaient avoir identifié un mécanisme permettant de détecter la phase critique de transition entre cellule saine et cellule cancéreuse. En analysant des organoïdes de cancer colorectal, ils avaient mis en évidence une enzyme responsable de la stabilisation de protéines associées à la tumeur. En inhibant cette enzyme, ils sont parvenus à interrompre la prolifération des cellules malignes et à restaurer, au moins partiellement, leurs fonctions normales.

Une stratégie ciblant un régulateur clé de la cancérogenèse

À l’instar de leurs homologues sud-coréens, de nombreux chercheurs à travers le monde concentrent leurs efforts sur des protéines jouant un rôle central dans la transformation des cellules saines en cellules cancéreuses. L’idée de les bloquer a longtemps été considérée comme une voie thérapeutique prometteuse. Toutefois, les tentatives de mise au point de molécules capables de les neutraliser se sont jusqu’ici heurtées à des obstacles insurmontables.

Face à cet échec, l’équipe de l’Université de Bath, dirigée par Andy Brennan — auteur principal de l’étude et chercheur au sein du département des sciences de la vie, a exploré une voie alternative : l’utilisation de peptides, ces courtes chaînes d’acides aminés, pour cibler des protéines régulatrices essentielles au développement tumoral.

C’est dans ce cadre que les scientifiques ont utilisé le test TBS, une technique de criblage permettant d’évaluer l’activité de centaines de peptides afin d’identifier ceux capables d’interrompre les fonctions des facteurs de transcription à l’origine de la croissance tumorale. Ce criblage leur a permis de mettre en lumière des peptides capables de s’attaquer à cJun, un facteur de transcription clé dans la prolifération des cellules cancéreuses, en le neutralisant de façon permanente.

Un mode d’action inédit

Le facteur cJun agit en s’associant à une autre molécule identique pour former un dimère, lequel se fixe ensuite à l’ADN afin de réguler l’expression de certains gènes. Pour enrayer ce mécanisme, les chercheurs ont conçu un peptide capable de se lier à une seule des deux moitiés de cJun, empêchant la formation du dimère indispensable à son action.

« L’inhibiteur fonctionne un peu comme un harpon : il s’accroche à sa cible et ne la lâche plus — il saisit cJun avec fermeté et l’empêche de se fixer à l’ADN », explique Andy Brennan dans un communiqué. Contrairement aux inhibiteurs réversibles testés jusqu’alors, cette nouvelle molécule établit une liaison irréversible avec cJun, bloquant ainsi durablement son action oncogène.

Selon le chercheur, il s’agit d’une première : « Nous avions déjà identifié des inhibiteurs réversibles, mais c’est la première fois que nous parvenons à bloquer un facteur de transcription de manière irréversible avec un inhibiteur peptidique », précise-t-il.

Pour valider leur approche, les scientifiques ont inséré, dans un gène essentiel de cellules cultivées en laboratoire, des séquences de liaison spécifiques à cJun. Le test TBS repose sur un principe simple, mais efficace : lorsque cJun est actif, il inhibe l’expression du gène cible, entraînant la mort de la cellule. En revanche, si un inhibiteur bloque cJun, le gène reste actif et la cellule survit — un indicateur direct de l’efficacité thérapeutique.

« Nombre de candidats-médicaments se montrent performants in vitro, mais s’avèrent ensuite toxiques ou incapables de pénétrer efficacement les cellules cancéreuses », souligne Jody Mason, directeur scientifique de Revolver Therapeutics et professeur de biochimie à l’Université de Bath. « Notre plateforme, en revanche, permet de tester directement l’activité des peptides dans un environnement cellulaire réel, ce qui lève plusieurs des limites rencontrées avec les petites molécules ou les anticorps », ajoute-t-il.

La prochaine étape pour l’équipe consistera à tester l’efficacité de l’inhibiteur dans des modèles précliniques. Si les résultats se confirment, cette approche pourrait ouvrir la voie à de nouvelles thérapies, potentiellement transposables à plusieurs types de cancers.

Source : Advanced Science

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