En octobre 2024, des chercheurs américains et néerlandais ont mené une étude aux résultats inquiétants sur les objets du quotidien fabriqués en plastique noir. Publiée dans la revue Chemosphere, l’enquête montrait que jusqu’à 85 % des articles analysés contenaient des produits chimiques toxiques, comme les retardateurs de flamme bromés (BFR). Face à ces résultats, plusieurs médias ont conseillé aux consommateurs de se débarrasser de leurs ustensiles de cuisine en plastique noir, évoquant des risques importants pour la santé. Cependant, une erreur dans les calculs, reconnue par les auteurs, a résulté en la correction de certains chiffres sans pour autant remettre en cause les conclusions principales de l’étude.
Dans de nombreuses cuisines, spatules, cuillères et louches en plastique noir sont omniprésents. Résistants à la chaleur et pratiques, ces objets se retrouvent pourtant au cœur d’une controverse scientifique. En octobre 2024, des chercheurs de l’Université libre d’Amsterdam et de Toxic-Free Future, un groupe environnemental basé à Seattle, ont analysé 203 produits ménagers en plastique noir vendus aux États-Unis. Résultat : 85 % des articles testés contiennent des retardateurs de flamme, notamment le décabromodiphényléther (BDE-209).
Ces substances chimiques, conçues pour limiter les incendies dans les appareils électroniques, se retrouvent dans des objets ménagers à cause des processus de recyclage insuffisamment réglementés. « Nous avons détecté des retardateurs de flamme, typiquement utilisés dans les boîtiers de téléviseurs, dans des produits ménagers qui n’en nécessitent pas », expliquent les auteurs dans leur rapport.
Ces plastiques recyclés se retrouvent dans divers objets : ustensiles de cuisine, jouets et emballages alimentaires. Lorsque ces produits chauffent, les retardateurs de flamme peuvent migrer dans les aliments. Cette exposition inquiète les experts, car des études montrent que le Déca-BDE et d’autres composés polybromodiphényléthers (PBDE) agissent en tant que perturbateurs endocriniens.
Plastiques recyclés : des substances dangereuses mal encadrées
Classés comme produits chimiques dangereux par les conventions internationales de Stockholm et de Rotterdam, ces substances perturbent potentiellement la fonction thyroïdienne. Cependant, les études s’appuient souvent sur des modèles animaux, ce qui crée une incertitude quant à leurs effets précis sur la santé humaine.
Les chercheurs ont initialement affirmé que les niveaux de BDE-209 dans ces plastiques frôlaient les seuils de sécurité définis par l’EPA (Agence de protection de l’environnement des États-Unis). Cependant, une analyse complémentaire récente a révélé que l’exposition réelle des consommateurs représentait un dixième de ces limites.
Le 15 décembre 2024, les auteurs ont donc publié une correction, qu’ils ont résumée dans un communiqué : « Une confusion s’est produite lors de la comparaison des doses estimées avec les seuils de l’EPA », précisent-ils. Cette erreur n’altère toutefois pas les conclusions générales de l’étude.
Une réglementation internationale nécessaire
La conclusion principale de l’étude, qui reste inchangée dans les faits, est que les plastiques noirs contiennent des produits chimiques dangereux issus du recyclage d’appareils électroniques. Les chercheurs appellent ainsi toujours à des mesures strictes pour limiter l’usage de ces substances dans des objets courants.
« Nos résultats montrent que des produits chimiques préoccupants persistent tout au long du cycle de vie des plastiques recyclés », déclarent les auteurs, qui demandent un renforcement des normes internationales, afin de réduire l’utilisation d’additifs toxiques.
Megan Liu, co-autrice de l’étude, souligne : « Il faut privilégier des alternatives sûres pour protéger les consommateurs et l’environnement. Nos travaux, ainsi que d’autres recherches similaires, montrent qu’une meilleure réglementation est indispensable ». Ces conclusions concernent non seulement les ustensiles de cuisine, mais également les jouets, les emballages alimentaires et d’autres produits en plastique noir.
Une polémique qui touche aussi la recherche
La publication de cette étude a entraîné des réactions vives. Bien que l’étude soit solide sur le plan scientifique, la revue Chemosphere, qui l’a publiée, a récemment été exclue de The Web of Science, en raison de problèmes liés aux normes éditoriales. Cette exclusion n’est toutefois pas directement liée à cette recherche précise.
Les plastiques noirs, pratiques mais toxiques, restent un problème sous-évalué. Les consommateurs doivent être mieux informés, tandis que les gouvernements doivent agir pour sécuriser les procédés de recyclage et interdire l’usage de substances chimiques dangereuses dans les objets du quotidien.