Des pluies diluviennes dans le désert du Sahara soulignent des perturbations climatiques inquiétantes

Des zones sèches et arides depuis 50 ans transformées en paysages lacustres...

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| Pixabay
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Le mois dernier, des pluies diluviennes ont frappé une région du désert du Sahara, dans le sud-est du Maroc, transformant des zones sèches et arides depuis près de 50 ans en paysages lacustres. Bien que ce phénomène extrêmement rare puisse potentiellement réapprovisionner les nappes phréatiques de la région, cela laisse présager des changements majeurs dans la dynamique climatique locale au cours des mois et années à venir.

Le désert du Sahara est notoirement connu pour être l’un des endroits les plus secs de la planète. Alors que la majeure partie du Maroc, dans la zone occidentale du désert, connaît un climat méditerranéen (hivers doux et humides et étés chauds et secs), sa partie sud-est beaucoup plus sèche et ne reçoit en moyenne que 100 millimètres de précipitations par an. Cette partie du pays a d’ailleurs subi six années consécutives de sécheresse intense, obligeant de nombreux agriculteurs à délaisser leurs champs et les villes, et les villages à rationner leur eau.

Cependant, le gouvernement marocain y a annoncé deux jours consécutifs de pluies diluviennes en septembre dernier — un phénomène extrêmement rare. Tagounite, l’une des régions les plus touchées, située à 450 kilomètres au sud de Rabat, la capitale, a enregistré plus de 100 millimètres de précipitations en seulement 24 heures.

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Les pluies ont littéralement transformé le paysage désertique, laissant derrière elles des lacs entourés de dunes. Dans les zones fréquentées par les touristes, des véhicules tout terrain circulaient entre les flaques nouvellement formées pour prendre des photos, tandis que les habitants s’émerveillaient du spectacle — certains n’ayant jamais été témoins de phénomènes similaires au cours de leur vie. « Cela faisait 30 à 50 ans que nous n’avions pas eu autant de pluie en si peu de temps », a déclaré Houssine Youabeb, de la Direction générale de la météorologie (DGM) du Maroc, à AP News.

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Aperçu des lacs formés par les fortes pluies dans la ville désertique de Merzouga, près de Rachidia, dans le Sud-est du Maroc, le mercredi 2 octobre 2024. © AP Photo

Une modification potentielle de la dynamique climatique de la région

Appelées « tempêtes extratropicales », ces précipitations soudaines seraient dues à l’interaction entre deux masses d’air opposées, dont l’une chaude et humide et provenant du sud, et l’autre froide et issue du nord. Cela a provoqué la formation de nuages très instables, engendrant des pluies torrentielles dans un très court laps de temps. D’autre part, « le relief a joué un rôle dans la concentration de ces précipitations, les montagnes et les collines dirigeant l’eau vers les vallées et les bassins, ce qui a augmenté le niveau de l’eau dans les oueds [des fleuves typiques des régions semi-désertiques] », indique Lhoussaine Youabd, un porte-parole de la DGM, à Le Monde.

D’un autre côté, ces phénomènes météorologiques extrêmes et imprévisibles figurent parmi les impacts prédits par les modèles climatiques. En d’autres termes, leur apparition souligne à quel point l’équilibre climatique de la planète est perturbé. D’après les météorologues, l’apparition de ces tempêtes dans le sud du Maroc pourrait modifier la dynamique climatique de la région au cours des mois et années à venir. En effet, en raison des précipitations inhabituelles, l’air retient davantage d’humidité, ce qui provoque plus d’évaporation, rendant l’atmosphère plus sujette aux tempêtes.

Des conséquences dévastatrices

Les récentes pluies diluviennes dans le sud du Maroc pourraient contribuer à réapprovisionner les nappes phréatiques de la région. Des taux de remplissages record ont d’ailleurs été signalés au niveau des barrages hydrauliques pendant tout le mois de septembre. Des images satellites de la NASA montrent les lacs Zagora et Tata, asséchés pendant près d’un demi-siècle, désormais remplis d’eau. Cependant, bien que ces précipitations puissent potentiellement constituer une aubaine pour l’agriculture locale, il est pour le moment impossible de savoir dans quelle mesure elles pourraient réellement atténuer la sécheresse sur le long terme.

Ci-dessous, deux images du désert du Sahara prises par le NASA Earth Observatory respectivement le 14 août 2024 (à gauche) et le 10 septembre 2024 (à droite), mettant en évidence les différences hydrologiques. (© Michala Garrison/NASA Earth Observatory) :

D’un autre côté, la tempête n’a pas eu que des avantages et a également engendré des dégâts. En effet, des inondations ont provoqué plus de 20 décès au Maroc et en Algérie, tandis que près de 60 habitations ont été emportées par les eaux dans les zones les plus touchées. Habituée à la sécheresse, la population avait pris l’habitude de construire les maisons à proximité des oueds, sans se douter de crues éventuelles.

Les crues ont également endommagé les récoltes et la majorité des palmiers de certaines oasis centenaires ont été abattus. Les routes, les réseaux d’électricité et les réserves d’eau potable ont également été impactés. Cela a contraint le gouvernement marocain à mobiliser des fonds de secours d’urgence, en particulier pour les zones se remettant à peine d’un séisme dévastateur qui a eu lieu dans le sud du pays l’année dernière et qui a fait au moins 2 960 victimes.

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