Pour quelles raisons serait-il intéressant d’installer un accélérateur de particules sur la Lune ?

collisioneur lune
| Shutterstock
⇧ [VIDÉO]   Vous pourriez aussi aimer ce contenu partenaire

Tandis que les prédictions des théories modernes en physique des particules atteignent des niveaux d’énergie toujours plus élevés, les physiciens réfléchissent à des solutions pour augmenter la puissance développée par les accélérateurs de particules. La solution la plus simple serait sans doute de construire un nouveau collisionneur sur Terre qui serait le successeur du LHC. Cependant, une autre solution serait de construire ce collisionneur sur la Lune. Températures très basses, vide naturel et verrouillage gravitationnel avec la Terre, autant d’arguments avancés en faveur de la construction d’un successeur lunaire au LHC.

À mesure que nous approfondissons nos connaissances sur l’Univers, nos expériences de physique des particules sont devenues de plus en plus complexes. Afin de révéler les secrets des plus petites particules subatomiques, les physiciens doivent maintenir les collisionneurs et les détecteurs aussi froids que possible, éliminer le plus d’air possible et les garder aussi immobiles que possible pour obtenir des résultats fiables.

La question de placer ces technologies sur la Lune s’est alors posée. Une proposition publiée sur arXiv plus tôt cette année fait valoir que la Lune est en fait un endroit assez optimisé pour faire de la physique des hautes énergies. D’abord, il fait froid. Très froid. Sans atmosphère et sans eau, il n’y a rien pour transporter la chaleur du Soleil d’un endroit à un autre. La nuit, avec le Soleil sous l’horizon, les températures chutent à -73 degrés C ; dans la gamme des configurations cryogéniques typiques sur Terre.

Une invitation à rêver, prête à être portée.

Très basses températures : elles sont nécessaires au maintien des aimants supraconducteurs

Pendant la journée, la surface se réchauffe un peu, atteignant par endroits plus de 38 °C.  Mais comme le prouve la glace cachée dans l’ombre des cratères lunaires, tout ce dont vous avez besoin pour refroidir le milieu est un peu d’ombre. Encore une fois, sans air ni eau, les zones à l’abri de la lumière directe du Soleil sont extrêmement froides.

Les physiciens ont besoin de ces températures froides pour plusieurs raisons. Dans les accélérateurs, les températures froides garantissent que les aimants supraconducteurs — utilisés pour projeter les particules à l’intérieur de l’accélérateur à des vitesses proches de celle de la lumière — ne se détériorent pas. Deuxièmement, plus un détecteur est chaud, plus il faut lutter contre le bruit de fond pour démêler les minuscules signaux des particules subatomiques (plus de chaleur équivaut à plus de molécules vibrantes, ce qui équivaut à plus de bruit).

Un vide lunaire naturel adéquat pour les conduits de collision et les détecteurs

Outre les températures fraîches, le fait que la Lune n’a pas d’atmosphère est également une aubaine. Les physiciens doivent faire le vide au sein des accélérateurs et détecteurs. Mais la Lune a un vide 10 fois meilleur que tout ce que les physiciens ont développé dans leurs expériences. Et il se fait naturellement, sans aucun effort.

Enfin, en raison du verrouillage gravitationnel, la Lune garde toujours la même face pointée vers la Terre. Cela signifie qu’un faisceau de particules provenant de la Lune pourrait être dirigé vers un laboratoire de détection sur Terre, profitant de la longue distance sans avoir à fournir beaucoup d’efforts pour aligner la configuration.

Sur le même sujet : Des physiciens créent un accélérateur de particules tenant sur une puce électronique

Une production lunaire de neutrinos pour mieux étudier le phénomène d’oscillation

L’utilisation la plus prometteuse d’une expérience de physique lunaire serait comme source de neutrinos. Inutile de dire que les neutrinos sont difficiles à étudier et à comprendre. Ils sont fabriqués en grandes quantités dans des réactions nucléaires, donc tout ce qu’il faudrait, ce serait d’installer une centrale nucléaire sur la Lune. Les neutrinos qu’elle produirait arriveraient sur Terre, où nous pourrions les capturer et les étudier.

Une propriété des neutrinos est qu’ils sont capables de changer de type (ou de saveur) lorsqu’ils se propagent ; un phénomène connu sous le nom d’oscillation. Avec une longue distance séparant la génération et la détection des neutrinos, nous donnons à plus de neutrinos une chance de « changer de saveur » et nous pouvons mieux comprendre ce comportement. La Lune est une source parfaite : elle est suffisamment éloignée pour que nous puissions obtenir de longues distances, mais suffisamment proche pour que nous puissions capturer des neutrinos en quantités suffisantes pour réellement les étudier (et probablement dépanner l’installation en cas de problème).

Sources : arXiv

Laisser un commentaire