Le GPS permettrait de prédire les séismes 2 heures à l’avance, mais un obstacle persiste

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Un homme passe devant des bâtiments effondrés à Antakya, dans le sud de la Turquie, le 20 février. | Yasin Akgul/AFP via Getty Images
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Des chercheurs affirment avoir identifié des déplacements presque imperceptibles le long des zones de faille jusqu’à 2 heures avant les grands séismes. Cette découverte pourrait ouvrir la voie à un avenir où les résidents pourraient se réfugier dans des abris sûrs avant les grands séismes. Cependant, les systèmes de surveillance existants ne peuvent pas encore détecter ce signal en temps réel. Une approche intéressante reposerait sur l’utilisation des systèmes GPS de surveillance, visant à détecter les mouvements tectoniques subtils précédant un séisme. Mais un obstacle majeur persiste.

Les séismes, phénomènes naturels parfois dévastateurs, défient les tentatives de prédiction précise. Leur survenue soudaine et leur potentiel destructeur font d’eux une menace constante pour les populations du monde entier. C’est dans ce contexte que s’inscrit le travail d’une équipe de chercheurs français, de l’Université Côte d’Azur, qui explore une nouvelle voie pour anticiper ces événements.

Leur approche repose sur l’utilisation des systèmes de positionnement global (GPS), couramment utilisés pour la navigation, mais ici détournés pour une tout autre finalité : la détection de mouvements tectoniques subtils précédant un séisme. Ils pourraient fournir un avertissement précieux avant un séisme. Cependant, la détection en temps réel nécessite une technologie plus précise, soulignant la nécessité de poursuivre les recherches dans ce domaine. Les travaux sont publiés dans la revue Science.

Les défis de la prédiction

Les séismes sont des phénomènes naturels complexes qui se produisent lorsque l’énergie accumulée dans les roches de la croûte terrestre est libérée, provoquant des secousses et des mouvements du sol. La capacité de prédire précisément quand et où ces événements se produiront pourrait sauver des vies et minimiser les dégâts, mais malgré des décennies de recherche, cette prédiction reste largement insaisissable.

Les prédictions à court terme des séismes visent à émettre des avertissements de quelques minutes à quelques mois avant qu’un séisme se produise. Ces prédictions dépendent de la détection de signaux précurseurs géophysiques définitifs et observables, tels que de petits tremblements de terre (appelés foreshocks), des changements dans la vitesse de propagation des ondes sismiques à travers la Terre, ou des modifications de la composition chimique des eaux souterraines.

Cependant, ces signaux ne sont pas toujours présents avant un séisme, et lorsqu’ils le sont, ils ne sont pas toujours détectés. De plus, ces signaux peuvent également être causés par d’autres phénomènes géologiques, ce qui rend leur interprétation difficile.

Un débat clé dans le domaine de la sismologie concerne la manière dont la rupture sismique commence. Certains chercheurs pensent que la rupture se produit en un instant, sans aucun signe avant-coureur. D’autres cependant, pensent que la rupture commence lentement, avec un glissement lent de la faille qui s’accélère ensuite rapidement, conduisant à un séisme.

Si ce dernier scénario est correct, il pourrait y avoir une fenêtre d’opportunité pour détecter le début de la rupture et émettre un avertissement avant que le séisme se produise. Cependant, la détection de ce glissement lent initial est extrêmement difficile, car il est souvent masqué par le bruit de fond des mouvements naturels de la Terre.

La technologie GPS à la rescousse

Une équipe de chercheurs français a utilisé le GPS dans cet objectif de détection des micro-glissements. Plus précisément, ils s’appuient sur la détection d’un glissement progressif et accéléré entre les plaques tectoniques précédant un séisme. Selon eux, il s’agirait d’un modèle relativement fiable qui pourrait potentiellement offrir un avertissement de séisme près de deux heures avant que les secousses ne se produisent.

Pour parvenir à cette conclusion, les chercheurs ont utilisé des données GPS recueillies par des satellites en orbite autour de la Terre. Elles peuvent fournir des informations précises sur la position et le mouvement des points sur la surface de la Terre. En analysant ces données, les chercheurs ont été en mesure d’identifier des mouvements subtils le long des zones de faille qui précèdent un séisme.

En effet, ils ont étudié 90 séismes de magnitude supérieure à 7 qui se sont produits au cours des deux dernières décennies. Ils ont compilé les enregistrements des stations GPS proches des tremblements de terre qui capturent le mouvement du terrain toutes les 5 minutes avec une précision de quelques millimètres. Résultat : plus de 3000 séries temporelles de mouvement ont été identifiées dans les fenêtres de 48 heures menant aux principales ruptures.

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Séismes et stations GPS utilisées dans l’étude. La taille des mécanismes est indicative de l’ampleur des événements. Les couleurs indiquent le nombre de séries chronologiques disponibles pour chaque événement. © Q. Bletery and J.-M. Nocquet, 2023

Un obstacle majeur

Malgré l’optimisme suscité par cette nouvelle approche de prédiction des séismes, un obstacle persiste : la précision des capteurs GPS actuels. Certes, ils sont incroyablement précis, capables de déterminer la position d’un point sur la Terre à quelques centimètres près. Cependant, pour détecter les mouvements subtils des plaques tectoniques qui précèdent un séisme, une précision bien plus grande est nécessaire.

Les niveaux de bruit — des fluctuations aléatoires qui peuvent masquer un signal — des capteurs GPS actuels sont tels que la détection de ces mouvements subtils n’est possible que lorsqu’on analyse un grand ensemble de données, et non à partir d’un seul site. Pour détecter ces mouvements à l’échelle d’un seul séisme, il faudrait des capteurs GPS capables de détecter des mouvements de seulement 0,1 millimètre.

Cela signifie que, bien que cette nouvelle approche offre un espoir pour la prédiction des séismes, elle est actuellement limitée par la technologie existante. Cependant, cela ne signifie pas que la situation est sans espoir. Comme le souligne l’un des chercheurs dans un article de Science lié à la publication de l’étude : « Cela nous dit qu’il se passe quelque chose. Et que quelque chose peut être fait ».

Des progrès significatifs doivent être réalisés, soit au niveau de la sensibilité des capteurs, soit au niveau de leur nombre global autour de la Terre. Il pourrait alors être possible de percevoir ces mouvements subtils et de permettre de prédire les séismes avec grande précision, ce qui pourrait sauver de nombreuses vies.

Source : Science

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