Le prix Nobel de physique 2020 met les trous noirs à l’honneur

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| ESO/L. Calçada/Spaceengine.org
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L’Académie royale des sciences de Suède vient de désigner les lauréats du prix Nobel de physique 2020. Celui-ci a été décerné à trois astrophysiciens : Andrea Ghez de l’UCLA, Reinhard Genzel de l’Institut Max Planck de physique extraterrestre en Allemagne et Roger Penrose de l’Université d’Oxford. Tous trois ont été récompensés pour leurs recherches sur les trous noirs.

La moitié du prix revient à Roger Penrose, un théoricien qui a établi des modèles mathématiques pour expliquer l’existence des trous noirs dans le cadre de la théorie de la relativité générale d’Einstein. Andrea Ghez et Reinhard Genzel se partagent l’autre moitié du prix pour leurs observations de Sagittarius A*, le trou noir supermassif situé au centre de notre galaxie.

Une présence révélée par les étoiles environnantes

Situé à 26’000 années-lumière de notre système solaire, Sagittarius A* (ou Sgr A*) est plus de 4 millions de fois plus massif que le Soleil. Il est longtemps demeuré caché et invisible, du fait d’un impénétrable nuage de gaz cosmique. Impossible de l’observer directement, puisqu’il n’émet aucune lumière. Mais à l’aide des plus grands télescopes du monde et des outils de visualisation infrarouge, Ghez et Genzel ont conçu de nouvelles techniques pour scruter ce gaz et avoir un meilleur aperçu du centre de la Voie lactée.

Une invitation à rêver, prête à être portée.

Depuis le début des années 1990, tous deux étudient de près cette région de la galaxie. Aujourd’hui, selon le Comité Nobel, ils ont apporté « la preuve la plus convaincante à ce jour d’un trou noir supermassif au centre de la Voie lactée ». À noter qu’Andrea Ghez n’est que la quatrième femme à remporter le prix Nobel de physique, après Marie Curie en 1903, Maria Goeppert Mayer en 1963 et Donna Strickland en 2018.

Chacun de leur côté, Ghez et Genzel ont cartographié les étoiles les plus brillantes situées près du centre de la galaxie, avec une précision croissante, afin de déterminer ce qui pourrait se trouver au centre. Leurs mesures respectives concordaient et chacun est arrivé à la même conclusion. Les deux astrophysiciens ont observé des étoiles comme S2 — l’une des plus proches de Sgr A*, 15 fois plus massive que le Soleil — évoluant autour du centre de la Voie lactée à des vitesses vertigineuses.

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Andrea Ghez et Reinhard Genzel sont tous deux arrivés à la conclusion qu’un objet extrêmement lourd et invisible attirait les étoiles environnantes, au point de les accélérer à des vitesses vertigineuses. Crédits : Johan Jarnestad/Académie royale des sciences de Suède

S2 a tendance à orbiter à environ 18 millions de kilomètres par heure, ce qui est 200 fois plus rapide que la vitesse orbitale de la Terre. Or, l’année dernière, les deux équipes de chercheurs ont constaté que S2 accélérait à environ 25 millions de kilomètres par heure, grâce à l’intense attraction gravitationnelle du trou noir. Les résultats de leurs recherches ont permis une fois de plus de corroborer la théorie de la relativité d’Einstein en ce qui concerne les trous noirs, et aussi, d’apporter la preuve que Sgr A* se trouve vraiment au milieu de notre galaxie. L’observatoire Keck d’Hawaï propose en vidéo une illustration du phénomène (l’orbite de S2 y apparaît en jaune) :

Une conséquence directe de la théorie de la relativité

De son côté, le mathématicien et astrophysicien britannique Roger Penrose a utilisé des modèles mathématiques pour prouver que les trous noirs sont une conséquence directe de la théorie de la relativité générale d’Albert Einstein. À savoir que ce dernier était pourtant lui-même particulièrement sceptique sur l’existence de ces monstres galactiques, absorbant tout ce qui y pénètre et dont rien ne peut s’échapper, pas même la lumière.

C’est en janvier 1965, soit dix ans après la mort d’Einstein, que Penrose prouve par ses calculs que les trous noirs peuvent vraiment se former et les décrit alors en détail. Il démontre qu’ils sont une conséquence de la relativité générale et que la plupart des galaxies logent en leur centre un trou noir supermassif. Il met en évidence l’existence d’une singularité, un point de densité infinie où le temps s’arrête, où cessent toutes les lois connues de la nature. Seuls des effets gravitationnels trahissent sa présence. Avant cet article, les astronomes ne pouvaient se représenter ce qu’il se passait en cas d’effondrement d’une étoile sur elle-même. « Son article révolutionnaire est toujours considéré comme la contribution la plus importante à la théorie de la relativité générale depuis Einstein », écrit le Comité Nobel.

Sur le même sujet : Des astrophysiciens observent la destruction et la réapparition de la couronne d’un trou noir

« Les découvertes des lauréats de cette année sont de véritables avancées dans l’étude des objets compacts et supermassifs », a déclaré David Haviland, président du Comité Nobel de physique. Cependant, bien d’autres recherches restent à effectuer pour mieux comprendre l’un des phénomènes les plus exotiques de l’univers.

L’Event Horizon Telescope (EHT) a résolu la toute première image d’un trou noir en avril 2019 (M87*), celui qui occupe le centre la galaxie Messier 87. Dans les années à venir, le réseau de huit radiotélescopes de l’EHT pourrait très bien fournir davantage de détails sur le centre de notre galaxie et ainsi capturer enfin cet objet mystérieux que Ghez, Genzel et Penrose n’ont pu décrire jusqu’à présent qu’à travers les mathématiques et les étoiles environnantes.

Source : The Nobel Prize

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