Qu’est-ce qui est apparu en premier : les trous noirs ou les galaxies ? De récentes observations apportent des éléments de réponse

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Illustration des jets de plasma d'un trou noir transformant des nuages de gaz en étoiles dans l'univers primitif. | Roberto Molar Candanosa / JHU
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De récentes découvertes par le biais du télescope spatial James Webb (JWST) éclairent certains mécanismes clés de l’Univers primitif, en particulier le rôle des trous noirs dans la formation des galaxies. Ces observations suggèrent une interaction complexe entre ces derniers et la formation stellaire et permettent de tenter de répondre à une question fascinante : qu’est-ce qui est apparu en premier, les trous noirs ou les galaxies ?

Depuis longtemps, les astronomes cherchent à percer les mystères de l’univers primitif. Le télescope spatial James Webb (JWST), détectant l’infrarouge, a révélé des galaxies parmi les plus anciennes. Ces dernières, lumineuses et compactes, abriteraient des trous noirs défiant les théories actuelles sur la chronologie de l’univers. De récentes observations avec le JWST révèlent des mécanismes clés des premiers stades de l’univers, en particulier concernant le rôle des trous noirs dans la formation des galaxies.

Publiée dans la revue The Astrophysical Journal Letters par une équipe de l’Université du Colorado à Boulder et de l’Université Johns Hopkins, l’étude présente des résultats indiquant que les trous noirs pourraient avoir existé bien avant ce que les théories actuelles suggèrent, jouant un rôle crucial non seulement dans le « quenching » au sein des galaxies, mais aussi dans la stimulation de la formation stellaire dans les galaxies primitives. Le « quenching » est le processus par lequel la formation de nouvelles étoiles dans une galaxie est ralentie ou complètement arrêtée. Ces découvertes vont jusqu’à secouer les paradigmes établis sur la séquence des événements cosmiques majeurs suivant le Big Bang.

Une invitation à rêver, prête à être portée.

Une nouvelle compréhension des trous noirs ?

Mitchell Begelman et Joseph Silk, deux des auteurs principaux de l’étude, remettent en cause l’ordre établi de la cosmogonie en suggérant que les trous noirs ne sont pas simplement le produit final de l’évolution des étoiles, mais existaient de manière concomitante dès les premières phases de l’univers. Cette hypothèse marque un tournant dans notre compréhension de la structure cosmique, plaçant ces entités mystérieuses au centre de la dynamique de formation galactique.

Selon leur modèle, les trous noirs agiraient comme des catalyseurs dans le processus de création stellaire. Dans ce scénario, les trous noirs, par leur intense activité d’accrétion et les jets énergétiques qu’ils émettent, compriment le gaz environnant, favorisant ainsi la condensation de la matière et déclenchant la naissance d’étoiles. Cette interaction dynamique entre les trous noirs et le milieu interstellaire contribue à une augmentation rapide du taux de formation stellaire dans les galaxies naissantes, soulignant un rôle constructif des trous noirs dans l’évolution cosmique.

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Transition des taux de formation d’étoiles et de croissance des trous noirs à mesure que le décalage vers le rouge diminue, depuis les régimes où la rétroaction positive domine jusqu’à une époque ultérieure où la rétroaction est largement négative. © Steven Burrows, Rosemary Wyse et Mitch Begelman.

Begelman explique dans un communiqué : « La théorie actuelle décrit une transition des premières générations d’étoiles vers des galaxies dominées par les étoiles. Puis, vers la fin de ce processus, les trous noirs commencent à se développer ». La vision renversée du rôle des trous noirs dans l’évolution cosmique s’appuie quant à elle sur des données plus récentes, recueillies par le télescope spatial James Webb — qui a permis d’observer des galaxies lointaines avec une précision inégalée. Les observations de Begelman et Silk montrent que les galaxies primitives, lumineuses et actives, contiennent des trous noirs supermassifs qui, plutôt que d’éteindre la formation stellaire, semblent l’encourager, dans un feedback positif.

Implications pour la formation des galaxies

Cependant, cette relation symbiotique entre les trous noirs et la formation stellaire ne dure pas éternellement. Au fil du temps, à mesure que les trous noirs croissent et consomment la matière à un rythme effréné, ils épuisent les réserves de gaz de leur galaxie hôte. Cette consommation excessive conduit à une diminution des matériaux disponibles pour la formation de nouvelles étoiles, marquant ainsi une transition vers un feedback négatif.

Les puissants vents et jets émis par les trous noirs, qui avaient auparavant aidé à comprimer le gaz pour former des étoiles, dispersent maintenant ce même gaz, empêchant sa condensation en nouvelles étoiles. Cette inversion du feedback, de positif à négatif, marque un tournant dans la vie d’une galaxie, où le rôle des trous noirs passe de facilitateurs de la création stellaire à agents de sa suppression.

En se basant sur l’analyse des spectres lumineux et des signatures chimiques des galaxies observées, l’équipe a déterminé que ce pivot crucial s’est produit il y a environ 13 milliards d’années, soit un milliard d’années après le Big Bang. Cette découverte met en évidence l’importance d’une observation ciblée de l’univers primitif, afin d’affiner notre compréhension des galaxies en matière de structure, de composition et d’activité.

Pour étayer cette hypothèse de la coévolution des trous noirs et des étoiles, des simulations informatiques avancées sont nécessaires. Begelman et Silk, conscients des défis à relever, restent néanmoins optimistes quant à la validation future de leur modèle par la communauté scientifique. Ils anticipent que les progrès technologiques et les observations futures du JWST permettront d’explorer plus avant cette hypothèse audacieuse.

Source : The Astrophysical Journal Letters

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