L’Univers pourrait avoir une forme de beignet, suggère une étude

La topologie de l'Univers pourrait être beaucoup plus complexe qu'on le pense.

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| J. LAW/ESO
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Des chercheurs suggèrent que l’Univers pourrait avoir une topologie exotique ou « non triviale », comme un beignet ou un tore, plutôt qu’une structure plate comme le suggère la perception conventionnelle. Cette topologie complexe permettrait de former des boucles fermées au sein desquelles un vaste déplacement hypothétique en ligne droite ramènerait au point de départ. Cela pourrait potentiellement expliquer certaines anomalies de température détectées au niveau du fond diffus cosmologique (CMB).

La topologie est une branche mathématique traitant de la forme et de la structure des objets. À ne pas confondre avec la géométrie, qui elle, définit la manière dont l’espace peut se courber, tandis que la topologie en traduit la connectivité. Selon le modèle standard de la cosmologie, combinant seulement en partie la relativité générale et la mécanique quantique, la géométrie de l’Univers est considérée comme plate (ou presque).

Dans cette vision, des topologies au sein desquelles l’espace se courbe ou présente des boucles fermées ne sont donc pas envisageables. Cela signifie que pour se déplacer d’un point à un autre, il faut emprunter un chemin en ligne droite, sans virage ni boucle. Cependant, ce point de vue semble s’orienter davantage sur la relativité générale, sans considérer suffisamment la mécanique quantique. En effet, la première concerne davantage la géométrie locale (à petite échelle) de l’espace-temps, et non sa topologie globale.

Une invitation à rêver, prête à être portée.

D’un autre côté, des études ont suggéré que les processus quantiques au tout début de l’Univers auraient pu induire une topologie non triviale de l’espace-temps, qui persisterait à ce jour à de très grandes échelles. En d’autres termes, la topologie du cosmos pourrait permettre une connectivité inattendue, de sorte qu’une trajectoire qui semble linéaire pourrait en réalité faire revenir au point de départ.

Selon une équipe internationale de physiciens, certaines anomalies détectées au niveau du CMB suggèrent que l’Univers pourrait présenter ce genre de boucles fermées. « La possibilité que l’univers ait une topologie ‘intéressante’ relève entièrement de notre modèle standard de physique, mais est néanmoins généralement considérée comme exotique », explique à Phys.org l’un des experts de l’étude, Glenn D. Starkman de la Case Western Reserve University (aux États-Unis). Dans leur nouvelle étude détaillée dans la revue Physical Review Letters, les chercheurs ont exploré plusieurs topologies possibles.

Des boucles fermées faisant revenir au point de départ ?

Le CMB est un vestige de rayonnement qui s’est propagé dans le cosmos environ 380 000 ans après le Big Bang. Il fournit ainsi de précieuses informations sur le début de l’Univers ainsi que sur les processus ultérieurs qui ont conduit à la formation des structures à grande échelle, telles que les amas de galaxies. Alors que sa température est uniforme dans la plupart des observations, de subtiles fluctuations et anomalies ont été relevées au niveau de certaines régions du cosmos.

Ces variations suggèrent que l’Univers est statistiquement anisotrope, c’est-à-dire que ses propriétés diffèrent selon la direction ou l’orientation, contrairement à ce qu’avance le modèle standard. Selon les chercheurs de la nouvelle étude, cela pourrait résulter d’une topologie non triviale. « La topologie est un moyen très naturel pour l’anisotropie de ‘s’infiltrer’ dans l’Univers », explique Starkman. Les fluctuations observées au niveau du CMB donnent des informations sur la topologie du cosmos, même lorsque l’échelle dépasse l’univers observable.

Si la topologie de l’Univers était véritablement non triviale, il existerait des boucles fermées à différents points de l’espace. Pour l’analogie, l’Univers ressemblerait aux jeux d’arcade des années 1990, où traverser un côté de l’écran ferait apparaître le personnage du côté opposé. Dans cette vision, se déplacer dans l’espace en ligne droite ramènerait inexorablement au point de départ. En outre, un observateur percevrait chaque objet comme ayant plusieurs copies, comme si le cosmos était démultiplié.

En brisant l’isotropie statistique, une topologie non triviale pourrait ainsi induire des fluctuations de température et de polarisation du CMB. On pourrait observer des boucles de température appariées dans différentes parties du cosmos, car tout rayonnement provenant d’une source donnée (par exemple une étoile) parviendrait jusqu’à l’observateur depuis deux directions différentes. En d’autres termes, les mêmes températures ou autres caractéristiques physiques seraient observées au niveau de deux points distincts de l’Univers. Selon les chercheurs de l’étude, cela laisserait des fluctuations similaires à celles observées actuellement au niveau du CMB.

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Paramètres topologiques des régions de l’espace où les observateurs verraient ou non des paires de boucles de température. © Yashar Akrami et al.

Les scientifiques ont ainsi récemment étudié 17 topologies cosmologiques non triviales distinctes, dont le « donut » et les « trois tores ». Ce dernier consiste en un cube tridimensionnel qui se boucle (ou se démultiplie) sur lui-même et dans lequel sortir par un côté ramènerait du côté opposé. Selon eux, l’existence de l’une ou l’autre de ces topologies ne peut pas être exclue.

Toutefois, il est important de noter qu’il n’existe à ce jour aucune preuve de la présence de telles boucles de température. Néanmoins, les chercheurs estiment que leur absence indique que les boucles spatiotemporelles passant au niveau de notre emplacement (la Terre) sont tout simplement de petite taille. « L’absence de boucles de température correspondantes nous renseigne sur la longueur de la boucle fermée la plus courte qui nous traverse », indique Starkman.

Par ailleurs, la détection de ces anomalies au niveau du CMB nécessiterait une très grande puissance de calcul. Afin de surmonter cette difficulté, les chercheurs prévoient de s’appuyer sur les modèles d’apprentissage automatique (afin de réduire les calculs nécessaires). De nouveaux indices pourraient également être découverts dans les prochaines données du télescope spatial Euclide (de l’Agence Spatiale Européenne), concernant la distribution des galaxies.

Source : Physical Review Letters

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