Un volcan sous-marin génère des bulles de plus de 400 mètres de diamètre

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Un panache de cendres et de gaz s'élève du volcan Bogoslof, en 2017. | Dave Schneider/Alaska Volcano Observatory & U.S. Geological Survey
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Au début du 20e siècle, des marins naviguant près de l’Alaska ont déclaré avoir aperçu des bulles noires semblant s’échapper de la mer, chacune faisant « au moins la taille du dôme du Capitole des États-Unis (Washington) », selon certaines déclarations. Fait étonnant, ils n’étaient pas les seuls à avoir signalé l’étrange phénomène. Et ils ne se sont pas trompés, sauf sur un détail : les bulles sont en réalité encore plus grandes que ce qu’ils avaient estimé.

Selon une nouvelle étude, lorsque le volcan Bogoslof, situé dans les îles Aléoutiennes et étant en grande partie submergé, entre en éruption, il produit des bulles sous-marines géantes pouvant atteindre 440 mètres de diamètre. Ces bulles sont remplies de gaz volcanique et créent des nuages ​atteignant plusieurs kilomètres d’altitude, déclare l’auteur principal de l’étude, John Lyons, géophysicien à l’Alaska Volcano Observatory, de l’Institut d’études géologiques des États-Unis.

Des images des nuages ​​volcaniques ont été capturées par satellite après la dernière éruption du volcan en 2017. Cependant, les bulles elles-mêmes n’ont jamais été photographiées à ce jour.

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Pendant l’éruption, un bourdonnement sourd s’est propagé dans l’air. Quelque chose émettait des signaux de basse fréquence, appelés infrasons (des sons de fréquence inférieure à celle perceptible par l’Homme). Ces derniers pouvaient durer jusqu’à 10 secondes.

Lyons et son équipe, qui surveillent régulièrement les volcans actifs en Alaska, ont détecté, grâce à des microphones adaptés, ces signaux dans leurs données. Cependant, il leur a fallu un certain temps pour déterminer de quoi il s’agissait réellement.

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Carte du volcan Bogoslof, avec deux images satellites du sommet et du cratère partiellement submergés, durant une éruption. Crédits : Lyons et al/ Nature

C’est seulement après avoir parcouru la littérature que l’équipe a proposé son hypothèse, avançant que le son était le « murmure » de bulles de gaz géantes se développant dans le magma du volcan en éruption. Ils ont ensuite proposé un modèle informatique simulant le phénomène.

Le volcan est entré en éruption plus de 70 fois en 9 mois. Un grognement distinct (le « murmure ») d’une seconde, précédait chaque éruption, ont constaté les chercheurs. Les modèles informatiques développés ont montré que la vibration correspondait à la fréquence que les bulles éruptives généraient pendant qu’elles s’étiraient, se dilataient et éclataient. Les résultats ont été publiés le 14 octobre dans la revue Nature Geoscience.

Dans leur modèle, une bulle jaillit de la colonne de magma, sous l’eau, et commence à se développer. Une fois qu’elle atteint la surface de l’eau, une partie de la bulle émerge sous la forme d’une coupole et continue de croître encore plus rapidement. La pression à l’extérieur de la bulle devient alors plus importante que celle à l’intérieur, et la bulle commence à se contracter. Finalement, son film devient instable et se rompt, provoquant son éclatement.

Quand elle éclate, le gaz volcanique (composé de vapeur d’eau, de dioxyde de soufre et de dioxyde de carbone) est rejeté en partie dans l’eau, où il interagit avec la lave, qui le décompose et produit des cendres ainsi que des nuages ​volcaniques.

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L’équipe a émis l’hypothèse que le bourdonnement basse fréquence émanait de la croissance et de l’oscillation de chaque bulle, et que le signal haute fréquence représentait la rafale.

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Schéma résumant la formation d’une bulle autour d’un point d’éruption submergé. Du gaz jaillit de la colonne de magma pour donner naissance à une bulle. Cette dernière continue alors de croître jusqu’à son effondrement. À un moment donné, la bulle atteint son rayon maximal (là où la pression est la plus basse) : à ce moment-là, elle se contracte et finit par éclater, donnant lieu à des cendres et des nuages volcaniques pouvant atteindre des kilomètres d’altitude. Crédits : Lyons et al/ Nature

« Ces éruptions sous-marines explosives peu profondes sont très rares », a déclaré Lyons. « Il y a beaucoup de volcanisme sous-marin, mais la majorité se produit sous une grande masse d’eau (grandes profondeurs), et toute cette pression supplémentaire tend à supprimer l’incroyable éruption ».

Néanmoins, il reste des questions en suspens et les résultats sont limités par la méthodologie de l’équipe de recherche, qui repose sur un certain nombre d’hypothèses. Par exemple, il est difficile de savoir à quoi ressemble exactement l’eau autour de la bulle — s’ils s’agit d’eau de mer habituelle ou si la consistance est plus pâteuse, etc. « Ce serait bien de pouvoir enregistrer ces données ailleurs sur Terre, et de ce fait s’assurer que notre méthodologie est solide », a déclaré Lyons.

Séquence d’enregistrement du début d’une éruption, le 8 mars 2017. Sont audibles également plus de 100 signaux de bulles consécutifs. (Chaque pic dans la forme de l’onde est un signal généré par une bulle). Crédits : John Lyons

Source : Nature Géoscience

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