De l’eau pure transformée en « métal » pour la première fois

eau pure transformee en metal brillant dore
Des électrons issus d'une gouttelette de sodium et de potassium se diffusent sur une fine couche d'eau, la dorant et lui conférant des propriétés métalliques. | Philip E. Mason
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Pour la première fois, des chercheurs ont conféré des propriétés métalliques à de l’eau pure en la faisant interagir avec un mélange alcalin de sodium et de potassium. La conductivité qui en résulte ne dure que quelques secondes, mais cela suffit à renforcer notre compréhension de cette « phase » de l’eau en l’étudiant de façon directe.

L’eau que nous utilisons tous les jours (qui contient des minéraux, des sels et des impuretés) est, comme vous le savez, un conducteur électrique. L’eau pure et distillée, en revanche, est un isolant presque parfait. Elle est constituée de molécules de H2O liées les unes aux autres par des liaisons hydrogène. Les électrons de valence restent liés et ne sont pas mobiles. Pour créer une bande de conduction dans laquelle les électrons peuvent se déplacer librement, l’eau devrait être pressurisée à un point tel que les orbitales des électrons extérieurs se chevauchent.

Cependant, les calculs montrent que de telles pressions ne sont présentes que dans le noyau de grandes planètes gazeuses telles que Jupiter… Impossible donc d’obtenir une telle conductivité avec de l’eau pure en laboratoire. Les chercheurs ont donc dû trouver un autre moyen d’y parvenir.

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« Vous pouvez voir la transition de phase vers l’eau métallique à l’œil nu », a déclaré le physicien Robert Seidel du Helmholtz-Zentrum Berlin für Materialien und Energie en Allemagne. « La gouttelette argentée de sodium-potassium se couvre d’une lueur dorée, ce qui est très impressionnant ». Les résultats de l’étude ont été publiés dans la revue Nature.

Métaux alcalins : la solution pour « métalliser » l’eau pure

Sous des pressions suffisamment élevées, à peu près n’importe quel matériau pourrait théoriquement devenir conducteur. L’idée est que si vous serrez les atomes suffisamment fort, les orbitales des électrons extérieurs commenceraient à se chevaucher, leur permettant de se déplacer. Pour l’eau, cette pression est d’environ 48 mégabars, soit un peu moins de 48 millions de fois la pression atmosphérique terrestre au niveau de la mer.

Bien que des pressions supérieures à cette valeur aient été générées en laboratoire, de telles expériences ne conviendraient pas pour étudier l’eau métallique. Une équipe de chercheurs dirigée par le chimiste organique Pavel Jungwirth, de l’Académie tchèque des sciences, s’est donc tournée vers les métaux alcalins.

Ces substances libèrent très facilement leurs électrons extérieurs, ce qui signifie qu’elles pourraient induire les propriétés de partage d’électrons de l’eau pure sans la nécessité des hautes pressions. Cependant, les métaux alcalins sont très réactifs avec l’eau liquide, parfois jusqu’à l’explosion, mais l’équipe de recherche a trouvé un moyen très astucieux de résoudre ce problème de sécurité. Pour cela, au lieu d’ajouter le métal à l’eau, ils ont simplement fait l’inverse — ils ont ajouté de l’eau au métal.

Reproduire les conditions de conductivité des géantes gazeuses

Dans une chambre à vide, l’équipe a commencé par extruder à l’aide d’une buse une petite goutte d’alliage sodium-potassium, qui est liquide à température ambiante, et a ajouté très soigneusement une fine pellicule d’eau pure par dépôt de vapeur. Au contact de l’alliage, les électrons et les cations métalliques (ions chargés positivement) sont passés dans l’eau. Cela a non seulement donné à l’eau un aspect brillant et doré, mais l’a également rendue conductrice, exactement comme cela est le cas dans l’eau pure métallique à haute pression.

Ces résultats ont été confirmés par la spectroscopie de réflexion optique et la spectroscopie photoélectronique à rayons X synchrotron. Les deux propriétés, soit le reflet doré et la bande conductrice, occupaient deux gammes de fréquences différentes, ce qui a permis de les identifier clairement.

En plus de nous permettre de mieux comprendre cette transition de phase ici sur Terre, cette recherche pourrait également permettre d’étudier de près les conditions extrêmes de haute pression à l’intérieur des grandes planètes.

En effet, les scientifiques pensent que dans les planètes glacées du système solaire telles que Neptune et Uranus, par exemple, il y aurait de l’hydrogène métallique liquide. Et ce n’est que sur Jupiter que l’on pense que les pressions sont suffisamment élevées pour métalliser l’eau pure. La perspective de pouvoir reproduire certaines conditions régnant à l’intérieur de la géante gazeuse est passionnante. « Notre étude montre non seulement que l’eau métallique peut effectivement être produite sur Terre, mais caractérise également les propriétés spectroscopiques associées à son bel éclat métallique doré », déclare Seidel.

Vidéo détaillant la découverte et ses implications, publiée par Philippe E. Mason, auteur principal de l’étude :

Source : Nature

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