Une étude suggère l’odeur corporelle influence le choix de nos amis

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Dès le plus jeune âge, l’être humain se lie d’amitié avec certains de ses pairs. Ces liens se font naturellement et reposent généralement sur des centres d’intérêt communs, des tempéraments compatibles ou complémentaires, le plaisir d’être ensemble. Et si vous aviez toujours choisi vos amis également en fonction de leur odeur corporelle ? C’est ce que suggère une étude menée par une équipe de l’Institut Weizmann des sciences.

Quelle est la première chose que font deux chiens qui se rencontrent ? Ils se reniflent. C’est d’ailleurs valable pour l’ensemble des mammifères : ils se reniflent les uns les autres pour déterminer si leur congénère doit être considéré comme un ami ou comme un ennemi. Et si les humains faisaient la même chose, de manière tout à fait inconsciente, pour trouver des amis ? C’est l’hypothèse avancée par Inbal Ravreby, étudiante du laboratoire du professeur Noam Sobel, au département des sciences du cerveau de l’Institut Weizmann.

Plusieurs sources de preuves suggèrent en effet que les humains se sentent constamment eux-mêmes (la plupart du temps inconsciemment), et qu’ils font de même avec les autres. Pour autant, personne ne s’est intéressé à la fonction de ce comportement. On sait que les individus se lient d’amitié avec des personnes qui leur ressemblent, tant en apparence physique qu’en termes d’éducation, de principes et de valeurs. Il se pourrait que des odeurs corporelles similaires soient également favorables à la naissance d’une amitié.

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L’odeur comme critère inconscient de sélection

Ravreby a émis l’hypothèse que lorsqu’ils se reniflent inconsciemment et reniflent les autres, les gens peuvent faire des comparaisons subliminales, qui les amènent à graviter davantage autour de ceux dont l’odeur est similaire à la leur. Pour tester cette hypothèse, son équipe et elle ont recruté 20 paires d’amis de même sexe (10 duos de femmes et 10 duos d’hommes, âgés de 22 à 39 ans) et récolté leurs odeurs corporelles.

Certaines amitiés se développent lentement au fil du temps. Mais les amitiés des duos considérés dans cette étude se sont formées très rapidement, ce qui signifie que le sentiment d’attachement est apparu presque instantanément, avant même que les deux personnes ne se connaissent bien. La similitude physique a donc sans doute été un critère important dans l’établissement de ces relations (car seuls l’apparence physique et l’âge peuvent être évalués si rapidement). Mais peut-être que des traits physiologiques, tels que l’odeur corporelle, ont également influencé l’établissement du lien d’amitié.

similitude odeurs amis
(F) Similitude d’odeur perçue pour les duos d’amis (axe x) par rapport aux duos aléatoires (axe y). Chaque point est un évaluateur (n = 25), et le point reflète la moyenne de leurs 40 notes. La ligne diagonale reflète la ligne de pente unitaire (x=y ), de sorte que si les points s’accumulent sous la ligne, alors les valeurs sont plus grandes pour la similarité des duos d’amis. L’histogramme associé est la similarité perçue moyenne. (G) Identique à (F), mais pour des données de similarité visuelle plutôt qu’olfactive. © I. Ravreby et al.

À l’aide d’un nez électronique (eNose) et de testeurs humains indépendants, ils sont arrivés à la conclusion que les odeurs corporelles des duos d’amis étaient plus similaires que celles de duos formés de façon aléatoire. Mais Ravreby a voulu exclure la possibilité que la similitude des odeurs corporelles soit une conséquence des amitiés instantanées, plutôt qu’une cause contributive ; en effet, deux amis pourraient partager des expériences de vie influençant leur odeur corporelle de la même façon (vivre dans la même zone, manger ensemble, etc.).

Les chercheurs ont donc utilisé l’eNose pour prédire les interactions sociales entre deux individus qui ne se connaissent pas. L’appareil a senti les volontaires, puis ceux-ci ont été invités à s’engager dans des interactions sociales non verbales, par paires de même sexe.

Une odeur similaire associée à une meilleure interaction

Les participants ont été soumis au « jeu du miroir » : face l’un à l’autre, séparés de 50 cm (de manière à pouvoir se sentir), chacun devait essayer de refléter les mouvements de l’autre, pendant deux minutes. Ils n’étaient pas autorisés à parler. Au total, 66 duos ont été soumis à cette expérience. Après chaque rencontre, il a été demandé à chaque membre du duo d’évaluer la qualité de l’interaction avec leur partenaire et d’estimer la probabilité qu’il développe une amitié avec cette personne.

expérience jeu du miroir
La similitude des odeurs corporelles est liée au fait d’être enclin à tisser des liens d’amitié après le jeu du miroir. (A) Un duo jouant au jeu du miroir. (B) La distance euclidienne moyenne (ED) dans l’espace eNose entre les 22 duos qui ont déclaré mutuellement une amitié instantanée lors du jeu est indiquée par la ligne pointillée rouge. © I. Ravreby et al.

Les chercheurs ont constaté que 22 duos (8 duos d’hommes, 14 duos de femmes) ont signalé une amitié instantanée mutuelle. Ils ont donc comparé ces résultats avec les prédictions de l’eNose : il s’avère que les odeurs corporelles des duos enclins à lier une amitié étaient plus similaires chimiquement que celles des duos qui n’ont pas signalé un tel intérêt.

Compte tenu de ces résultats, l’équipe s’est demandée si les données de l’eNose pouvait prédire l’interaction sociale. À l’aide d’un classificateur des plus proches voisins, ils ont comparé les 22 duos qui ont mutuellement déclaré avoir des affinités, avec les 44 autres duos. Résultat : le modèle a pu prédire avec une précision de 71% quelles paires d’individus auraient une interaction sociale positive, en se basant uniquement sur les données eNose.

« Nous avons observé que les dyades dont les odeurs étaient plus similaires avaient des interactions dyadiques plus positives. En d’autres termes, nous avons pu prédire le lien social à l’aide d’un nez électronique », concluent les chercheurs. Le professeur Sobel émet toutefois un bémol : « Il ne s’agit pas de dire que nous agissons comme des chèvres ou des musaraignes. Les humains s’appuient probablement sur d’autres indices, bien plus dominants, dans leurs décisions sociales. Néanmoins, les résultats de notre étude suggèrent que notre nez joue un rôle plus important que prévu dans le choix de nos amis ».

Source : I. Ravreby et al., Science Advances

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