Genèse des recherches dans le domaine de la lutte contre la cancer (de 1882 à 2019)

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Souvent grave, le cancer suscite de nombreuses craintes, totalement justifiées. Tous les organismes vivants (dont les êtres humains) sont formés à partir de cellules vivantes qui naissent, grandissent et meurent. Le cancer est une maladie qui touche au processus de la croissance, de la vie et de la mort des cellules.

Dans un tissu sain, des nouvelles cellules prennent la place des anciennes et remplissent la même fonction que les cellules précédentes. Cela se fait de manière naturelle (et non contrôlée par notre volonté). Cependant, il arrive que ce processus se dérègle : une cellule se multiplie en plusieurs cellules toutes identiques et forme petit à petit un amas, plus connu sous le nom de tumeur.

Une tumeur n’est pas encore un cancer. Nous parlons de cancer lorsque cette tumeur acquiert la capacité de se déplacer. C’est-à-dire qu’elle lâche des cellules qui circulent dans le corps et se déposent sur d’autres organes. Là, elles se multiplient et forment des nouvelles tumeurs : des métastases. Celles-ci prennent du volume et peuvent empêcher le corps de bien fonctionner.

Aujourd’hui, nous vous proposons de découvrir certains éléments clés (liste non exhaustive) dans le domaine de la recherche des traitements contre le cancer, depuis presque 140 ans, avec une première date importante : 1882… :

1882 : Première mastectomie radicale

William Halsted effectue la toute première mastectomie radicale pour traiter le cancer du sein. Il enlève l’intégralité du sein du patient, le tissu lymphatique environnant et le muscle pectoral. La « mastectomie Halsted », soit la mastectomie radicale, reste le traitement standard du cancer du sein depuis près d’un siècle. Dans les années 1970, des essais cliniques ont montré qu’une chirurgie moins poussée et une radiothérapie sont tout aussi efficaces pour traiter la plupart des cancers du sein.

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Crédits : Wellcome Collection/ CC BY

1884 : Ouverture du Memorial Sloan Kettering Cancer Center

Le Memorial Sloan Kettering Cancer Center ouvre ses portes sous le nom de New York Cancer Hospital, au coin de la 106th Street et de Central Park West, à Manhattan. Cet hôpital est le premier établissement aux États-Unis exclusivement consacré au traitement du cancer, et compte parmi ses fondateurs John Jacob Astor III et son épouse Charlotte.

1891 : L’immunothérapie est utilisée pour la première fois pour traiter le cancer

William Coley, chirurgien au Memorial Sloan Kettering, est le premier à tenter un traitement non chirurgical du cancer par le biais d’une immunothérapie. Il traite les sarcomes avec des toxines d’une infection cutanée bactérienne pour renforcer les défenses naturelles de l’organisme contre le cancer.

1895 : Découverte des rayons-x

Le physicien allemand Wilhelm Roentgen découvre les rayons X alors qu’il effectue des expériences sur l’électricité dans son laboratoire. Peu de temps après, il prend une radiographie de la main gauche de sa femme. En 1902, le Memorial Sloan Kettering est le tout premier centre à utiliser les rayons X dans le traitement du cancer en faisant l’acquisition de deux appareils à rayons X.

1898 : Découverte du radium

Le célèbre couple de scientifiques, Pierre Curie, chimiste français et Marie Curie, physicienne polonaise, découvre le radium. Cette découverte marque le début d’une nouvelle ère d’investigation scientifique quant à la structure d’un atome et conduit finalement à une meilleure compréhension de la manière dont les rayonnements peuvent causer et traiter le cancer.

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Crédits : Ullstein Bild/Getty

1918 : La radiothérapie externe est développée

Le physicien Gioacchino Failla, qui travaille au Memorial Sloan Kettering, a mis au point le tout premier appareil de thérapie par radium à faisceau externe, appelé « ensemble d’éléments au radium ». Cet appareil est utilisé pour traiter les cancers du thorax, du cerveau et de l’abdomen. Depuis, la technologie du rayonnement externe a évolué pour devenir une approche de traitement importante pour de très nombreuses personnes atteintes de cancer.

1937 : Le premier National Cancer Act est signé

Le président Franklin D. Roosevelt signe le National Cancer Act de 1937 pour soutenir la recherche sur le cancer. Il fait du National Cancer Institute (NCI) l’organisme principal du gouvernement fédéral chargé de répondre aux besoins de recherche et de formation en matière de cause, de diagnostic et de traitement du cancer.

1941 : Naissance de l’hormonothérapie

Charles Huggins découvre que l’administration d’œstrogènes ou l’élimination des testicules pour réduire la production de testostérone, provoque la régression des tumeurs de la prostate. Cette manipulation hormonale, plus communément appelée thérapie hormonale, continue d’être un pilier du traitement du cancer de la prostate.

1946 : Début de l’ère de la chimiothérapie

Des équipes d’enquêteurs, notamment celles du Memorial Sloan Kettering, ont indiqué que les moutardes azotées, développées comme agents de guerre chimiques, pouvaient en réalité être utilisées efficacement contre certaines formes de cancer.

La moutarde azotée appartient à une classe de médicaments qui tuent les cellules en modifiant chimiquement leur ADN. En 1949, la FDA approuve la moutarde azotée (méchloréthamine) pour le traitement du cancer, ouvrant ainsi la voie à la chimiothérapie anticancéreuse.

1958 : Les premiers traitements contre le cancer sont obtenus grâce à une chimiothérapie par association

Emil Frei III est le premier à utiliser la chimiothérapie par association. Il dirige une étude démontrant que le traitement par de multiples agents de chimiothérapie pourrait mener à des rémissions durables, voire parfois des guérisons, chez les enfants atteints de leucémie lymphoblastique aiguë (une maladie uniformément mortelle à l’époque). La chimiothérapie par association est à présent une approche standard pour traiter de nombreux cancers chez l’adulte et chez l’enfant.

1964 : Découverte de l’agent antitumoral paclitaxel

Monroe E. Wall et Mansukh Wani découvrent que des extraits de l’écorce de l’if du Pacifique sont toxiques pour les cellules vivantes. Wall et ses collègues isolent le composé le plus cytotoxique de l’écorce de l’arbre et l’appellent paclitaxel. Puis, en 1979, Susan Band Horwitz découvre que la molécule tue les cellules cancéreuses en empêchant la division cellulaire. Le paclitaxel (Taxol ®) est actuellement utilisé pour traiter le cancer de l’ovaire, du sein et du poumon, ainsi que le sarcome de Kaposi.

1971 : Le président Nixon signe le deuxième National Cancer Act

Le président Richard Nixon signe le deuxième National Cancer Act, annonçant une « guerre contre le cancer ». L’intérêt du public pour les traitements anticancéreux augmente, de même que les fonds destinés au traitement du cancer.

1973 : Réalisation de la première greffe de moelle osseuse d’un donneur non apparenté

Richard O’Reilly, oncologue pédiatre au Memorial Sloan Kettering, réalise la toute première greffe de moelle osseuse réussie, d’un donneur non apparenté à un patient. La procédure ouvre la possibilité d’une greffe à des patients sans frère ou sœur, pouvant fournir un appariement de la moelle osseuse.

1979 : P53, le gène suppresseur de tumeur, est découvert

Découverte du gène p53, qui est le gène le plus souvent muté dans le cancer humain. Il s’agit d’un gène suppresseur de tumeur, ce qui signifie que son produit protéique, appelé p53, aide à contrôler la prolifération cellulaire et à supprimer la croissance tumorale.

1981 : Approbation du premier vaccin contre le cancer

La FDA a approuvé le vaccin contre l’hépatite B, mis au point par Maurice Hillman, de Merck, à partir d’informations fournies par Baruch Blumberg, qui a découvert le virus de l’hépatite B. Ce vaccin est considéré comme le premier vaccin contre le cancer, car il prévient les infections chroniques par l’hépatite B, l’une des principales causes du cancer du foie.

1984 : Le filgrastim se dresse comme un puissant médicament anticancéreux

Les médecins et scientifiques Malcolm Moore et Karl Welte du Memorial Sloan Kettering, isolent une protéine de cellules humaines qui stimule la croissance du sang. Appelée G-CSF, cette molécule constitue la base du filgrastim (Neupogen ®), qui réduit la fréquence et la gravité des infections chez les patients cancéreux et les aide à récupérer plus rapidement après une chimiothérapie. Il devient l’un des médicaments anticancéreux les plus importants jamais développés.

1984 : L’oncogène HER2 apparaît comme une cible pour les traitements du cancer du sein

Les chercheurs découvrent un nouvel oncogène appelé « neu » dans les cellules de rat. La version humaine de ce gène, HER2, est surexprimée dans environ 20% à 25% des cancers du sein et est associée à une maladie plus agressive. Cette percée a conduit à l’approbation par la FDA du trastuzumab (Herceptin ®) en tant que traitement ciblé pour traiter le cancer du sein HER2-positif dans les contextes adjuvant et métastatique en 1998.

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Crédits : Cultura RM Exclusive/Rolf Ritter/Getty Images

1994 : Séquençage du premier gène de prédisposition au cancer : BRCA1

D’après une étude de généalogie génétique réalisée par Mary Claire King, une équipe de Myriad Genetics, clone et séquence le gène de prédisposition au cancer BRCA1. Des mutations héréditaires spécifiques de ce gène augmentent considérablement les risques de cancer du sein, de l’ovaire et d’autres types de cancer. L’année suivante, le même groupe de recherche séquence le gène BRCA2. Ces avancées ont permis de confirmer la base génétique de certains cancers.

1996 : Naissance du traitement par inhibiteur de point de contrôle immunitaire

L’immunologiste James Allison est le premier à montrer que le blocage d’une molécule appelée CTLA-4 sur des cellules immunitaires pourrait guérir le cancer chez la souris. Cela ouvre une toute nouvelle approche au traitement du cancer. L’approche, appelée traitement par inhibiteur de point de contrôle immunitaire, vise à « relâcher les freins » du système immunitaire. Le prix Nobel de physiologie ou de médecine 2018 a été attribué aux Drs. Allison et Tasuku Honjo pour leurs travaux sur le développement de cette approche en tant que traitement du cancer.

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Crédits : Steve Gschmeissner/Science Photo Library

2001 : Approbation de l’imatinib par la FDA

La FDA approuve l’imatinib (Gleevec ®) pour le traitement de la leucémie myéloïde chronique. Le médicament, qui interfère avec l’action d’une protéine mutante appelée BCR-ABL, est l’un des premiers traitements anticancéreux ciblés à succès, et il est à présent utilisé pour traiter plusieurs types de cancer. Les scientifiques Brian Druker, Nicholas Lydon et Charles Sawyers ont partagé le prix Lasker DeBakey Award 2009 pour leurs travaux sur le développement du médicament.

2002 : Début de la thérapie cellulaire CAR T

Michel Sadelain, Renier Brentjens et Isabelle Rivière, chercheurs au Memorial Sloan Kettering, développent des cellules T génétiquement modifiées avec un récepteur d’antigène chimérique (CAR), un moyen puissant de lutter contre la leucémie et d’autres cancers du sang. Dans cette approche, les cellules T sont prélevées dans le sang d’un patient, modifiées génétiquement pour reconnaître certaines protéines présentes dans les cellules cancéreuses, puis réinjectées dans la circulation sanguine du patient.

2003 : Le génome humain est entièrement séquencé

La séquence complète du génome humain est complétée et publiée conjointement par le Human Genome Project (un programme de recherche collaboratif international dont l’objectif était la cartographie complète et la compréhension de tous les gènes de l’être humain) et Celera Genomics. L’effort public a été dirigé par Francis Collins, à présent directeur des National Institutes of Health, tandis que l’opération privée a été dirigée par le biochimiste et généticien Craig Venter.

2006 : La FDA approuve le premier vaccin contre le VPH

Dans le but de prévenir l’infection par le VPH (virus du papillome humain), responsable du cancer du col de l’utérus, la FDA a approuvé le tout premier vaccin contre le VPH : soit le vaccin contre le papillomavirus (9-Valent) (Gardasil 9 ®).

2009 : La technique de radiochirurgie stéréotaxique est développée

Les radio-oncologues du Memorial Sloan Kettering développent une technique de radiochirurgie stéréotaxique permettant un traitement journalier à dose élevée des tumeurs métastatiques du cerveau. À savoir que les thérapies conventionnelles peuvent prendre jusqu’à six semaines. L’année suivante, les chercheurs du Memorial Sloan Kettering innovent dans l’utilisation de la radiothérapie accélérée et hypofractionnée par stéréotaxie dans la prostate. Cette technique produit des doses de rayonnement extrêmement élevées en cinq séances de traitement, contre près de 50 séances de plus de 10 semaines avec une approche conventionnelle.

2010 : Le premier vaccin contre le cancer est approuvé

La FDA approuve le premier vaccin contre le cacner, Sipuleucel-T (Provenge ®) en tant que vaccin thérapeutique contre le cancer pour certains hommes atteints de cancer de la prostate. Il exploite le système immunitaire du patient pour attaquer les cellules cancéreuses.

2011 : La FDA approuve le premier inhibiteur de point de contrôle

À la suite d’essais cliniques menés par le médecin-chercheur du Memorial Sloan Kettering, Jedd Wolchok, la FDA a approuvé le premier inhibiteur immunitaire de point de contrôle, l’ipilimumab (Yervoy ®) pour le traitement du mélanome à un stade avancé. Ce médicament libère un frein sur les cellules immunitaires, leur permettant ainsi de détecter et de combattre le cancer. Ce frein est une protéine appelée CTLA-4.

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2017 : La FDA autorise MSK-IMPACT™, un test de séquençage de l’ADN

La FDA autorise le test de séquençage de l’ADN appelé MSK-IMPACT™. Développé par des chercheurs du Memorial Sloan Kettering, ce test recherche des mutations génétiques et d’autres altérations dans les tumeurs des patients. Depuis le mois de janvier 2014, MSK-IMPACT™ est utilisé au Memorial Sloan Kettering pour analyser les tumeurs de plus de 20’000 patients atteints de cancers à un stade avancé. Ces données aident à orienter les décisions de traitement et ouvrent la porte à des approches de médecine de précision.

2018 : Une nouvelle gamme de médicaments dans le domaine des inhibiteurs de points de contrôle

Le prix Nobel de médecine 2018 a été décerné à deux chercheurs en immunothérapie : l’américain James P. Allison et le japonais Tasuku Honjo. Les travaux de ces deux chercheurs ont conduit à une nouvelle classe de médicaments de type inhibiteurs de points de contrôle, qui constituent désormais le quatrième pilier du traitement du cancer après la chirurgie, la radiothérapie et la chimiothérapie.

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Crédits : Jonathan Nackstrand/AFP

2018 : Découverte d’un test permettant de détecter de manière précoce le cancer du col de l’utérus

Le papillomavirus humain est responsable de la grande majorité des cas de cancer du col de l’utérus dans le monde. Un nouveau test développé par des chercheurs britanniques basé sur l’épigénétique, a montré une efficacité approchant les 100% dans la détection précoce du cancer du col de l’utérus.

2019 : Découverte d’une protéine recombinante permettant de lutter contre le développement futur de multiples types de cancer

La protéine recombinante moléculaire SA-4-1BBL a été découverte par une équipe de chercheurs de l’Université de Louisville. Cette molécule immunitaire mise au point pour l’immunothérapie anticancéreuse, protège contre le développement futur de multiples types de cancer lorsqu’elle est administrée seule.

2019 : L’iridium pourrait être utilisé comme cure contre le cancer

Des scientifiques ont élaboré une méthode innovante pour cibler les cellules cancéreuses : en administrant un métal rare étant en grande partie originaire des météorites, l’iridium. Des scientifiques du groupe du Dr. Peter Sadler de l’Université de Warwick en Angleterre, ont développé un complexe d’iridium pour éliminer les cellules cancéreuses sans radioactivité.

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Sur cette figure, les cellules cancéreuses et le photosensibilisateur à l’iridium montrent un alignement, indiquant que l’iridium trouve les cellules ciblées. Crédits : Université de Warwick

Lorsqu’elles sont exposées à la lumière, certaines molécules, comme ce complexe d’iridium, produisent des agents oxydants auxquels les cellules cancéreuses sont plus sensibles que les cellules saines.

À suivre.

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