Des « mini-cerveaux » cultivés en laboratoire révèlent des possibilités de traitement des maladies neurodégénératives

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Un organoïde cérébral présentant des structures semblables au cortex, développé dans le cadre de l'étude. | Andras Lakatos/University of Cambridge
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Le organoïdes, des modèles primitifs d’organes humains, sont aujourd’hui utilisés dans de nombreux domaines de recherche pour étudier le développement humain et diverses maladies. Les organoïdes cérébraux, de véritables « mini-cerveaux », permettent notamment d’étudier les maladies du système nerveux. Cependant, ces derniers ont généralement une durée de vie très limitée, un obstacle majeur sachant que les maladies neurodégénératives sont généralement à évolution lente et nécessitent donc une étude prolongée pour en déceler les différents mécanismes, souvent complexes. Des chercheurs ont récemment développé et maintenu en vie des organoïdes cérébraux pendant plus d’un an, un record.

L’équipe de recherche, de l’Université de Cambridge, a maintenu en vie ses « mini-cerveaux » près de 8 mois de plus que les détenteurs du précédent record, une véritable avancée pour la recherche dans le domaine des maladies neurodégénératives. Cela leur permettra notamment d’étudier les maladies du motoneurone, un ensemble de maladies neurologiques mortelles et incurables provoquant paralysie et démence. La sclérose latérale amyotrophique (SLA), dont le célèbre physicien Stephen Hawking était atteint, représente environ 90% des cas.

Pour entamer le développement des organoïdes, les chercheurs ont cultivé des cellules cérébrales dans une boîte de Petri en les plaçant de façon sphérique, puis en découpant l’ensemble en tranches afin que l’oxygène et les nutriments puissent atteindre toutes les cellules. Avec cette technique, la structure a pu conserver son architecture tissulaire interne.

Des tranches de mini-cerveaux pour une longévité accrue ?

La méthode standard pour étudier les tissus maintenus en vie en laboratoire consiste à les cultiver en une seule couche de cellules. Mais des chercheurs avaient précédemment découvert que si les cellules pouvaient être amenées à se développer en une « boule » de la taille d’un pois, elles se développaient en différents types de cellules qui interagissent de manière plus naturelle. C’est ainsi que les premiers organoïdes ont vu le jour.

Les organoïdes peuvent même présenter l’architecture tissulaire distincte des organes qu’ils imitent. Certains organoïdes cérébraux ont même été amenés à développer des yeux rudimentaires qui réagissent à la lumière. Toutefois, ils ont tendance à se désagréger au bout de quelques mois, car ils ne sont pas irrigués par le sang et ne reçoivent donc pas suffisamment d’oxygène et de nutriments. Il est donc plus difficile de mener des expériences sur ces derniers, explique András Lakatos de l’université de Cambridge.

Alors que certains groupes de recherche tentent de développer des organoïdes comportant des vaisseaux sanguins, Lakatos et son équipe ont essayé une nouvelle tactique : découper des organoïdes cérébraux en tranches d’environ 10 cellules d’épaisseur. Dans leur étude, publiée hier dans la revue Nature Neuroscience, ils montrent qu’ils ont gardé leurs mini-cerveaux en vie pendant huit mois grâce à cette méthode. Mais selon Lakatos, certains ont en réalité survécu pendant un peu plus d’un an.

Une nouvelle façon d’étudier les maladies neurodégénératives

Certains des organoïdes cérébraux ont été fabriqués à partir de cellules prélevées sur des personnes atteintes d’une maladie du motoneurone, des affections qui entraînent une faiblesse musculaire progressive. Ces mini-cerveaux se comportaient de manière légèrement différente de ceux fabriqués à partir de cellules prélevées sur des personnes en bonne santé, ce qui pourrait un jour déboucher sur de nouvelles méthodes de traitement. D’autres maladies du système nerveux central pourraient également être étudiées de la sorte.

Les organoïdes peuvent également constituer un outil puissant pour cribler des médicaments potentiels afin de déterminer lesquels peuvent prévenir ou ralentir la progression de ces maladies. Il s’agit là d’un avantage crucial, car les modèles animaux ne présentent souvent pas les changements typiques liés à ces maladies et il serait impossible d’échantillonner le cerveau humain complet dans ce but.

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À gauche : un échantillon de tissu d’un organoïde cérébral sain. À droite : dégâts neuronaux et dépôts de protéines toxiques au sein d’un organoïde cérébral développé à partir des cellules d’un patient atteint d’une maladie du motoneurone. © A. Lakatos et al.

L’équipe de Lakatos a montré qu’un médicament, le GSK2606414, était efficace pour diminuer les altérations cellulaires ayant lieu dans la sclérose latérale amyotrophique (SLA) et la démence fronto-temporale (DFT), notamment l’accumulation de protéines toxiques, le stress cellulaire et la perte de cellules nerveuses, bloquant ainsi l’une des voies qui contribuent à la maladie. Des médicaments similaires, mieux adaptés et approuvés pour un usage humain, sont actuellement testés dans le cadre d’essais cliniques pour les maladies neurodégénératives.

« En modélisant certains des mécanismes qui conduisent à des lésions de l’ADN dans les cellules nerveuses et en montrant comment ils peuvent conduire à divers dysfonctionnements cellulaires, nous pourrions également être en mesure d’identifier d’autres cibles médicamenteuses potentielles », déclare le Dr Gabriel Balmus, de l’UK Dementia Research Institute de l’université de Cambridge.

Source : Nature Neuroscience

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