Un parasite menaçant émerge en Amérique du Nord

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Des chercheurs canadiens signalent l’apparition d’un parasite, capable de passer du chien à l’Homme. Ce parasite, une forme de ténia, est à l’origine d’une maladie similaire au cancer du foie, dont l’incidence a récemment augmenté dans la province d’Alberta, au Canada. Les experts se disent préoccupés par le fait que les cas pourraient se multiplier rapidement dans cette région, comme ailleurs.

Ce parasite a vraisemblablement été importé via des chiens provenant d’Europe et il est en train de se répandre en Amérique du Nord. « Il pourrait y avoir un certain nombre de personnes dans la communauté qui incubent la maladie et que nous n’avons pas encore détectées, mais le temps nous le dira », avertit Stan Houston, expert en maladies infectieuses à l’Université d’Alberta et auteur principal de l’article signalant cette épidémie, publié au mois de mars dans l’American Journal of Tropical Medicine and Hygiene.

Cette maladie, dénommée échinococcose alvéolaire, est une infection zoonotique à cestodes (des vers parasites de l’intestin), qui peut être mortelle si elle n’est pas traitée. La prise en charge implique une intervention chirurgicale lourde et/ou un traitement antiparasitaire prolongé. En ce début d’année, les chercheurs soulignaient que l’incidence de cette maladie était en augmentation en Europe et en Asie, les personnes immunodéprimées étant les plus à risque. Plusieurs cas se sont déclarés dans l’ouest du Canada ces dernières années.

Une maladie qui reste à ce jour relativement rare

Comment se propage la maladie et quels sont ses symptômes ? Les humains peuvent être infectés par le parasite en ingérant des aliments ou de l’eau contaminés par des œufs du ténia Echinococcus multilocularis, ou après un contact direct avec des animaux hôtes. Les symptômes qui apparaissent ensuite sont semblables à ceux du cancer du foie (douleurs abdominales, faiblesse générale, perte de poids). Malheureusement, la maladie évolue lentement — les symptômes se manifestent dans les cinq à quinze ans après l’infection — et passe souvent inaperçue. Les métastases larvaires peuvent se propager vers des organes adjacents au foie (par exemple, la rate) ou vers des sites plus éloignés (comme les poumons ou le cerveau).

Les chercheurs rapportent au total 17 cas d’échinococcose alvéolaire, dont neuf femmes, diagnostiqués entre 2013 et 2020. Ces patients, âgés de 19 à 78 ans, avaient probablement contracté l’infection en Alberta. Six d’entre eux vivaient dans des zones urbaines et la plupart (14) possédaient des chiens. Dans près de la moitié des cas, les lésions ont été découvertes par hasard, au cours d’un examen d’imagerie abdominale réalisé pour une autre raison ; six autres ont été diagnostiqués pour la première fois lors d’une intervention chirurgicale. Enfin, six de ces patients étaient immunodéprimés à des degrés divers.

L’échinococcose alvéolaire humaine est extrêmement rare — quelque 18 000 cas par an dans le monde, majoritairement en Chine. Toutefois, elle est aujourd’hui endémique de l’Amérique du Nord : « C’est sans équivoque une nouvelle maladie humaine dans l’hémisphère occidental », confirme Houston. Les experts pensent que la propagation de la maladie au Canada est due à l’introduction de la souche européenne du parasite, plus agressive et plus apte à se propager.

Les cas sont rares, mais les experts sont tout de même inquiets, car ces dernières années, ils ont commencé à augmenter non seulement dans la province d’Alberta, mais aussi dans d’autres régions du monde, tant chez les humains que chez les animaux. La pandémie de COVID-19 — comme toutes les épidémies dues aux coronavirus — ayant parfaitement illustré à quel point les zoonoses sont potentiellement dangereuses pour l’Homme, la vigilance est de mise. « Je suis très préoccupé par le fait que nous pourrions voir la vague continuer à augmenter », confie Houston.

Une bonne hygiène suffit à réduire les risques

Le cycle parasitaire nécessite un hôte définitif, un canidé (chien, renard, coyote…), qui héberge les vers adultes d’Echinococcus multilocularis (de petits ténias de quelques millimètres de long) dans son intestin. La dissémination des œufs dans le milieu extérieur se fait par les déjections. En milieu sauvage, l’hôte intermédiaire est généralement un rongeur, qui héberge les larves du parasite dans son foie. Comme l’explique la Société française d’hépatologie, l’Homme est finalement un hôte intermédiaire « accidentel », apparu suite au développement d’un cycle parasitaire « domestique » faisant intervenir le chien.

Jusqu’à récemment, la maladie n’avait pratiquement jamais été observée en Amérique du Nord. Les auteurs de l’étude estiment qu’une plus grande urbanisation des coyotes observée en Alberta, associée au nombre croissant d’individus immunodéprimés dans la population humaine pourrait conduire à une reconnaissance croissante de l’échinococcose alvéolaire humaine dans cette région. Si Alberta semble aujourd’hui être « le point chaud » de ces parasites, Houston évoque d’autres cas récemment découverts, dont deux aux États-Unis.

Quels sont les risques réels ? Pour le moment, de simples règles d’hygiène de base suffisent à se prémunir d’une telle infection : le lavage des mains après tout contact avec des chiens, en particulier ceux des zones rurales, peut réduire le risque. De même, il faut veiller à bien rincer les fruits et légumes avant de les consommer. Enfin, la vermifugation des chiens domestiques est vivement conseillée.

Source : ASTMH, S. Houston et al.

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