Un parasite transmis par les chats impliqué dans la fragilité des personnes âgées

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Toxoplasma gondii, un parasite majoritairement transmis par les chats et impliqué dans différents troubles mentaux, serait également associé à l’incidence de la fragilité (épuisement, perte de masse musculaire, …) chez les personnes âgées, suggère une nouvelle étude. Alors que l’infection au parasite est généralement asymptomatique, les résultats suggèrent qu’elle pourrait avoir des effets néfastes non négligeables plus tard dans la vie, pouvant notamment mener à la fragilité.

Alors que les chats (ainsi que les autres félins) sont les hôtes définitifs de T. gondii, les autres animaux à sang chaud tels que les oiseaux et les rongeurs sont ses hôtes secondaires. Lorsque les chats se font infecter en consommant ces animaux, le parasite s’installe et se multiplie au niveau de leurs intestins, et les œufs sont excrétés dans leurs excréments. L’infection se transmet à l’Homme par le biais de litières mal nettoyées, de l’eau et de la nourriture contaminée ou par la viande insuffisamment cuite.

En analysant les stratégies évolutives favorisant le cycle de vie de T. gondii, des enquêtes ont montré que les rongeurs infectés ont tendance à perdre leur peur des félins, permettant ainsi à ces derniers de les chasser plus facilement et d’ingérer le parasite à leur tour. En outre, les chimpanzés infectés seraient étrangement attirés par l’odeur de l’urine des léopards, qui sont leurs prédateurs naturels.

Chez les personnes en bonne santé, la toxoplasmose (l’infection à T. gondii) est généralement latente et ne se manifeste parfois que plus d’une décennie après l’infection initiale ou en cas d’immunodépression. La plupart des personnes ne savent pas qu’elles sont infectées et seuls 10% environ présentent de brefs symptômes pseudo-grippaux au début de l’infection.

Le parasite niche sous la forme de kystes au niveau des muscles squelettiques et des tissus cérébraux. Sa présence au niveau de l’amygdale pourrait perturber le traitement des émotions et serait probablement impliquée dans les troubles comportementaux observés chez certaines personnes infectées. Des études ont antérieurement révélé que ces derniers ont tendance à être plus impulsifs et sont davantage sujets à la schizophrénie, aux tendances suicidaires et à divers troubles cognitifs.

cycle vie toxoplasma
Cycle de vie de T. gondii. © CDC

D’autre part, la nouvelle étude internationale, publiée dans le Journals of Gerontology Series A, suggère que la présence du parasite pourrait avoir des impacts sur la santé plus tard dans la vie, même chez les personnes initialement asymptomatiques. « Nous pensons souvent à l’infection à T. gondii comme relativement asymptomatique, mais cette étude souligne que pour certaines personnes, elle peut avoir des conséquences importantes sur la santé plus tard », explique le co-auteur Christopher Lowry, de l’Université du Colorado à Boulder.

Un niveau d’anticorps élevé associé à la fragilité

La nouvelle enquête concerne un groupe de 601 adultes espagnols et portugais de plus 65 ans. La totalité des participants a subi des mesures concernant un syndrome gériatrique courant, appelé « fragilité ». Les symptômes incluent par exemple une perte de poids involontaire, une fatigue chronique, une perte de facultés cognitives, une inflammation chronique, etc. Parmi ces personnes, 67% étaient infectées à T. gondii et présentaient des marqueurs d’une infection latente. Ce constat a amené les chercheurs à supposer que l’infection était probablement directement impliquée dans la fragilité des personnes âgées.

En effet, des recherches ont montré que la toxoplasmose active l’enzyme indoléamine 2,3-dioxygénase 1 (IDO-1), dont la production est régulée par des cytokines inflammatoires. Il s’agit de l’une des deux enzymes clés responsables de la métabolisation du tryptophane (TRP) en kynurénine (KYN), impliqué dans certains processus immunitaires. En outre, le rapport KYN/TRP serait notamment significativement plus élevé chez des modèles animaux infectés à T. gondii et présentant des signes de fragilité, par rapport à ceux « non fragiles ». L’équipe de la nouvelle étude a alors supposé que la fragilité est positivement associée à la présence d’immunoglobulines G (des anticorps) spécifiques au parasite.

Bien que les chercheurs n’ont finalement pas trouvé de lien direct entre l’infection au parasite et la fragilité, ils ont constaté que les personnes présentant une séro-intensité élevée (c’est-à-dire qui ont un taux élevé d’anticorps) sont plus susceptibles d’être fragiles. Cela pourrait notamment refléter une infection plus virulente, des infections multiples ou une réactivation récente d’une infection latente, ce qui semble cohérent avec la présence de marqueurs associés. Ces personnes présentaient également des niveaux plus élevés de certains marqueurs inflammatoires, suggérant que le parasite pourrait exacerber l’inflammation chronique inhérente au vieillissement.

« Cet article est important, car il fournit, pour la première fois, la preuve de l’existence d’un lien entre la fragilité chez les personnes âgées et l’intensité de la réponse à l’infection à T. gondii », suggère la co-auteure de la recherche, Blanca Laffon, de l’Université de La Corogne. D’ailleurs, étant donné que le parasite niche au niveau des muscles squelettiques, les experts soupçonnent son implication dans l’accélération de la sarcopénie liée à l’âge (diminution significative de la masse et de la force musculaires).

En vue de ces résultats, les chercheurs encouragent l’adoption de mesures préventives essentiellement basées sur l’hygiène (nettoyage de litières, rinçage des fruits et légumes, …). Les mesures devraient s’appliquer non seulement aux personnes immunodéprimées et aux femmes enceintes, mais également aux personnes saines dont les fonctions immunitaires déclineront avec l’âge.

Source : The Journals of Gerontology Series A

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